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29/09/2014

Clémence Boulouque

Clémence Boulouque.jpgClémence Boulouque, Nuit ouverte (Flammarion, 2007)

Connaissez-vous l’histoire de Régina Jonas, première femme rabbin ordonnée à Berlin en 1935, déportée et assassinée à Auschwitz en décembre 1944? Non? Alors lisez vite ce très beau roman qui prête la voix à cette disparue et nous dévoile en contrepoint, le parcours ambigu de la famille d’Elise Lermont, la narratrice, de Champagne à Paris sous l’Occupation. Outre un tableau de la pensée juive de cette époque émaillé de citations jamais pesantes – Benjamin, Rilke, Celan, Mandelstam ou Akhmatova - ce récit nous révèle le comportement des entreprises champenoises pendant la guerre et l’interrogation de son héroïne, bien au-delà de ce contexte historique précis, nous interpelle tous : Comment accepter les siens, ni plus lâches ou désinvoltes que d’autres, se réconcilier avec eux dans le souvenir et le pardon? Aux liens de notre sang qui parfois nous écrasent par le poids de la culpabilité filiale, ceux de notre choix – pour Elise, il s’agit de Régina Jonas - peuvent-ils nous délivrer de la honte, nous propulser dans l’avenir avec force et nous épanouir, malgré les blessures irréparables du temps?

24/09/2014

Le poème de la semaine

Claude Roy

L'enfant qui a la tête en l'air 
Si on se détourne, il s'envole. 
Il faudrait une main de fer 
pour le retenir à l'école.
 
L'enfant qui a la tête en l'air 
ne le quittez jamais des yeux: 
car dès qu'il n'a plus rien à faire 
il caracole dans les cieux.
 
Il donne beaucoup de soucis 
à ses parents et à ses maîtres: 
on le croit là, il est ici, 
n'apparaît que pour disparaître.
 
Comme on a des presse-papiers 
il nous faudrait un presse-enfant 
pour retenir par les deux pieds
l'enfant si léger que volant.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

00:06 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

23/09/2014

Morceaux choisis - Jean-Michel Maulpoix

Jean-Michel Maulpoix

citation; livres

L'écriture est la chambre du temps. C'est là qu'il vient dormir. Qu'il se réveille et se rhabille. Qu'il range ses papiers. Que de longues insomnies lui gardent les yeux ouverts entre souvenirs et projets. Là que s'arrête l'horloge. Que se referment les livres sous une main engourdie. Que l'obscurité fait son repas d'ombres. Là que des anges - simples lueurs de lune en vérité - viennent coller leur peau blanche et remuer leurs ailes contre le carreau. Là que les rêves froissent leur costume et que les portes font un bruit de sépulcre en se refermant. Là que les miroirs conservent longtemps les visages qui s'y sont regardés. Là que l'espace se recroqueville en signes noirs.

Jean-Michel Maulpoix, Pas sur la neige (Mercure de France, 2004)

00:22 Écrit par Claude Amstutz dans Jean-Michel Maulpoix, La citation du jour, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : citation; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

22/09/2014

La citation du jour

Anne-Marie Schwarzenbach

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Si nous nous libérons un instant de la croyance angoissante que seul le présent compte, que seule l’heure présente est vivante, alors notre oreille et notre œil s’aiguisent, alors nous sommes à même de sentir à l’œuvre l’esprit du passé envoyant jusqu’à nous ce qu’il a d’immortel, sanctifiant le lieu, enrichissant sa vie, et nourrissant ses forces vives pour aujourd’hui et pour demain.

Anne-Marie Schwarzenbach, De monde en monde - Reportages 1934-1942 (Zoé, 2012)

01:51 Écrit par Claude Amstutz dans La citation du jour, Littérature francophone, Littérature suisse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : citations; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

18/09/2014

Morceaux choisis - Jean-Baptiste Pedini

Jean-Baptiste Pedini

littérature; récit; morceaux choisis; livres

Ce soir les rires roulent sur la plage. On les entend tomber des gorges avant de s'évanouir. Ils ne ressortent pas mais leur écho traîne encore quelques secondes. Quelques secondes bien mûres pendant lesquelles la légèreté se répand sur les doigts. Quelques secondes trop juteuses. Quelques secondes que l'on dévore comme de petits matins sucrés. Et frais. Délicieusement fragiles.

La nuit est claire. Le feu crépite. La fumée nous pique les yeux. On est repu.

*

Enlever les chaussures et goûter à la fraîcheur du sable. A l'apaisement. A la rudesse. Escalader les dunes pour voir ce qui se prépare derrière. Le sel dans la bouche. L'écume invisible. Le ciel qui s'écroule dans une eau bleue et noire. Grimper pour en finir avec l'envie et le regret. Avec cette nostalgie qui se mêle à la corne. Laisse des traces infimes. Les morts et les vivants. La callosité de l'enfance. Les petits corps qui coulent dans un même regard.

Sacrifier la tempête. Poser une joue sur le sable. Sourire. Et dévaler la pente, lentement, jusqu'à demain.

*

Le soleil brille. Les rayons traversent la ville comme des rouleaux compresseurs. Ils sont lourds et opaques et quand ils happent les passants on ne voit plus rien après. Certains s'empressent de disparaître au hasard d'une rue. D'autres dégainent une ombrelle. Peut-être pensent-ils sincèrement repousser la chaleur. Lui barrer le chemin avec quelques grammes de toile. Pourtant même les nuages semblent avoir disparu. Le ciel est vide et la touffeur enserre l'été. On souhaite que cet instant ne finisse pas.

Jean-Baptiste Pedini, Passant l'été (Cheyne, 2012)

image: Edward Hopper, Sun on Prospect Street (wikiart.org)

00:16 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; récit; morceaux choisis; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

17/09/2014

Le poème de la semaine

Georges Haldas

Humbles choses, que je vous aime
Cours désertes
Rues sans voix
Chaises qui sous l'averse, attendez
Attendez quoi?
Comme nous, que survienne
le temps de la rencontre
et celui de l'éclair
qui sera la présence
 
Mais la présence
Elle-même est un nuage
Elle vient et s'en va
Et maintenant vous revoilà
Cours désertes
Rues sans voix
O chaises de l'absence
Qui après la Venue
- comme nous  -
attendez quoi?
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

16/09/2014

La citation du jour

François Cheng

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Lorsque, devant une scène de la nature, un arbre qui fleurit, un oiseau qui s'envole en criant, un rayon de soleil ou de lune qui éclaire un moment de silence, soudain, on passe de l'autre côté de la scène. On se trouve alors au-delà de l'écran des phénomènes, et l'on éprouve l'impression d'une présence qui va de soi, qui vient à soi, entière, indivise, inexplicable et cependant indéniable, tel un don généreux qui fait que tout est là, miraculeusement là, diffusant une lumière couleur d'origine, murmurant un chant natif de cœur à cœur, d'âme à âme.

François Cheng, Cinq méditations sur la beauté (coll. Livre de Poche/LGF, 2010)

image: http://abbyloves.over-blog.com

01:34 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : citations; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

14/09/2014

Lire les classiques - Marceline Desbordes-Valmore

Marceline Desbordes-Valmore 

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merci à Christiane H

Je voulais, mais en vain, par un effort suprême, 
En me sauvant de toi, me sauver de moi-même; 
Mon œil, voilé de pleurs, à la terre attaché, 
Par un charme invincible en fut comme arraché. 
 
À travers les brouillards, une image légère 
Fit palpiter mon sein de tendresse et d'effroi; 
Le soleil reparaît, l'environne, l'éclaire, 
Il entr'ouvre les cieux... Tu parus devant moi. 
 
Je n'osai te parler; interdite, rêveuse, 
Enchaînée et soumise à ce trouble enchanteur, 
Je n'osai te parler: pourtant j'étais heureuse; 
Je devinai ton âme, et j'entendis mon cœur.
 
Mais quand ta main pressa ma main tremblante, 
Quand un frisson léger fit tressaillir mon corps, 
Quand mon front se couvrit d'une rougeur brûlante, 
Dieu! qu'est-ce donc que je sentis alors? 
 
J'oubliai de te fuir, j'oubliai de te craindre; 
Pour la première fois ta bouche osa se plaindre, 
Ma douleur à la tienne osa se révéler, 
Et mon âme vers toi fut près de s'exhaler.

Marceline Desbordes-Valmore, Promenade d'automne, dans: Poésies (coll. Poésie/Gallimard, 1983)

image: John William Waterhouse, Lady Clare (artmagick.com)

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13/09/2014

Morceaux choisis - Yasmina Khadra

Yasmina Khadra

littérature; roman; morceaux choisis; livres

La vie est faite de hauts et de bas, et personne ne saurait en situer le juste milieu. Le malheur qui nous frappe ne prémédite pas son coup. Comme la foudre il nous tombe dessus, comme la foudre il se retire, sans s'attarder sur les drames qu'il nous inflige et sans les soupçonner. Si tu veux pleurer, pleure; si tu veux espérer, prie; mais de grâce, ne cherche pas de coupable là où tu ne trouves pas de sens à ta douleur.

Yasmina Khadra, Ce que le jour doit à la nuit (Pocket, 2009)

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11/09/2014

Jacques Chardonne

9782710307082.jpgJacques Chardonne, Romanesques (Coll. La petite Vermillon/Table Ronde, 1996)

On devrait lire Jacques Chardonne - charentais né en 1884 et décédé en 1968 - auteur un peu oublié d'une trentaine de livres parmi lesquels deux de ses plus célèbres: Claire et Vivre à Madère (réédités en coll. Cahiers Rouges/Grasset). Thème central de la plupart de ses romans, le langage de l'amour dans la vie de couple, s'exprime tout particulièrement dans Romanesques, sous le regard d'un narrateur qui nous conte l'histoire d'Octave et d'Armande, pris dans l'engrenage d'une passion amoureuse qui dure mais se lézarde, laissant poindre le doute, la jalousie, la possessivité, le défi, le renoncement, en apparence tout au moins...

Si la trame du récit en elle-même s'avère assez classique, elle s'incrit dans une atmosphère étrange qui sait nous charmer, à mi-chemin entre le monde réel et celui de l'imaginaire, signe caractéristique de son auteur. De plus, même si les couleurs qu'il prête à l'amour sont souvent bien sombres - c'est triste de n'être jamais vu tel qu'on est - Jacques Chardonne émaille son récit de réflexions souvent pertinentes: Il me semble que la sensualité de l'homme est plus cérébrale, et celle de la femme plus enfoncée dans la chair, plus proche de la nature, moins distincte. Et plus loin: Les hommes sont bêtes avec leur égoïsme, leur sécurité, leurs principes! Ils tuent la femme qu'ils aiment. Ils ne connaissent pas la joie que donne un être vivant qui n'est pas étriqué et faussé par la domination masculine... 

Un auteur à découvrir et qu'affectionnait tout particulièrement François Mitterand!

01:01 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |