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25/12/2014

La citation du jour

William Shakespeare

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Non, jamais je ne planterai une seule de ces boutures dans mon jardin. De même que je ne voudrais pas que ce garçon me dise, si j'étais maquillée: c'est bien, et que ça lui donne envie de me faire l'amour. Prenez ces fleurs, c'est de la chaude lavande, de la sarriette, de la marjolaine, et puis le souci, qui se couche en même temps que le soleil et se lève en larmes en même temps que lui. Oui, toutes ces fleurs me manquent pour vous en faire des couronnes, et vous, mon doux ami, pour vous en couvrir tout entier. 

 William Shakespeare, Un conte d'hiver (Minuit, 1988) 

traduit par Bernard-Marie Koltès

image: Le Titien, Vénus d'Urbino / détail (ahsonic.tumblr.com)

08:16 Écrit par Claude Amstutz dans La citation du jour, Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : citations; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

15/11/2013

Les pièces de Shakespeare 10a

Henry V

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Avec une certaine ironie, le public français considère souvent Henry V - comme on a pu le lire voici quelques années dans les colonnes de Libération - l'une des pièces les moins palpitantes de Shakespeare! Il n'est pas étonnant non plus qu'au Royaume-Uni, elle demeure l'une des plus populaires: et pour cause...

En effet, si Henry V nous raconte la vie de ce roi dont le règne n'aura duré que neuf ans, l'histoire a retenu qu'après le règne agité de son père, Henry IV, il a incarné - en quelques traits de sa personnalité - la vertu, la droiture, la sincérité, la foi. Mais ces dispositions ne pèseraient pas lourd sans la puissance étendue de l'Angleterre sous son ère, dont le point déterminant se situe lors de la célèbre Bataille d'Azincourt, où, avec 6'000 hommes à peine, il inflige l'une des plus cinglantes défaites au Royaume de France, malgré ses 18'000 combattants. A Hardricourt - alors que la progression de l'armée anglaise a vu tomber Rouen et marche sur Paris - Henry V demande la main de Catherine de Valois, fille du roi Charles VI, héritant du même coup de l'Aquitaine et de la Normandie. Reconnu par le Traité de Troyes comme héritier et régent de France, tous les états d'Europe sont désormais sous son influence, mais son ascension fulgurante est interrompue à Vincennes, en 1422, où il meurt d'une dysenterie à l'âge de 35 ans: jeune donc, comme Alexandre le Grand...

La pièce de Shakespeare s'attache en priorité à faire revivre sous nos yeux un homme d'état - un vrai - pour lequel il éprouve une authentique admiration. Redoutable diplomate, fin stratège militaire, habile en paroles et doté d'un charisme politique exceptionnel, il se révèle aussi manipulateur, refoulant au fond de lui-même ses doutes, les incertitudes de l'histoire, notamment avant la Bataille d'Azincourt où il prononce devant ses troupes un discours célèbre entre tous - voir l'annexe 1b - dont la détermination affichée n'est peut-être pas le reflet de son intime conviction. Mais qu'importe, puisque seul le résultat compte et que les soldats lui emboîtent le pas et se reconnaissent en lui!

Shakespeare s'est sans doute laissé emporter par sa vénération pour un roi personnifiant l'unité de la Nation, le courage et la domination de l'Angleterre, à travers ses caricatures et moqueries envers la France, plongée alors dans un chaos indescriptible. Bien des critiques littéraires anglo-saxons - dont Harold Bloom - soulignent non sans humour, que Henri V est un homme qu'on admire certainement, auquel on ne peut résister en raison de sa force de persuasion; mais l'aimer? Rien n'est moins sûr, car sa sécheresse de coeur - le prix payé pour sa réussite et ses victoires -, son insolence typiquement britannique ou son autoritarisme n'abondent pas dans ce sens.   

Mais l'histoire effacera ces ombres singulières pour retenir ces mots: Faites-nous jurer que vous valez autant que vos origines, ce dont je ne doute pas, puisqu'à aucun de vous, si modeste qu'il soit ne manque dans les yeux l'éclat de la noblesse... 

Et comme on voudrait aujourd'hui que nos politiques sachent parler ainsi... 

William Shakespeare, Henry V (coll. Folio Théâtre/Gallimard, 1999)

traduit de l'anglais par Jean-Michel Déprats

Harold Bloom, Shakespeare - The Invention of the Human (Fourth Estate, 1998)

00:03 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; théâtre; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

Les pièces de Shakespeare 10b

Henry V

En 1989, Kenneth Branagh - après Laurence Olivier et les adaptations télévisées de la Royal Shakespeare Company - porte à l'écran Henry V. Aux côtés de Derek Jacobi, Simon Shepherd et James Larkin, Kenneth Branagh interprète le rôle de Henri V. La scène III de l'Acte IV, présentée ici, est celle du célèbre discours que Henry V déclame devant ses troupes avant la Bataille d'Azincourt. La traduction française - de Jean-Michel Dépratsen extrait - a été ajoutée ci-dessous.

 

Cette histoire, l'homme de bien l'apprendra à son fils,
Et la Crépin Crépinien ne reviendra jamais
À compter de ce jour jusqu'à la fin du monde
Sans que de nous on se souvienne,
De nous, cette poignée, cette heureuse poignée d'hommes, cette bande de frères.
Car quiconque aujourd'hui verse son sang avec moi
Sera mon frère; si humble qu'il soit,
Ce jour anoblira sa condition.
Et les gentilshommes anglais aujourd'hui dans leur lit
Se tiendront pour maudits de ne pas s'être trouvés ici,
Et compteront leur courage pour rien quand parlera
Quiconque aura combattu avec nous le jour de la Saint-Crépin.
 

William Shakespeare, Henry V (coll. Folio Théâtre/Gallimard, 1999)

traduit de l'anglais par Jean-Michel Déprats

00:03 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; cinéma | |  Imprimer |  Facebook | | |

11/08/2013

Les pièces de Shakespeare 9b

La tempête

En 1980, la BBC a réalisé sous la direction de John Gorrie, une superbe adaptation de La tempête, avec Michael Hordern, Warren Clarke, Pipa Guard et l'ensemble de la Royal Shakespeare Company. En voici l'épilogue, précédé du texte français et suivi du texte original en anglais, dont l'harmonie est sans équivalent.

Maintenant, mes charmes sont abolis.
A mon chétif pouvoir je suis réduit.
Maintenant c'est à vous de décider
Si je reste ici confiné
Ou si je suis à Naples renvoyé.
Mais puisque j'ai mon duché reconquis
En pardonnant à qui me l'avait pris,
Ne me laissez pas sur ce rocher nu,
Par votre pouvoir retenu,
Mais libérez-moi de mes liens
A l'aide de vos bonnes mains.
Que le souffle de bienveillants murmures
Vienne souffler dans la mâture,
Gonflant ma voile, car, sinon,
J'aurai manqué mon but: vous plaire.
Je n'ai plus d'esprits pour règner
Ni de magie pour enchanter.
Faut-il donc que je désespère?
Non, si m'assiste la prière
Qui du Ciel force la Merci
Et toutes les fautes délie.
Vous voudriez être pardonnés pour vos offenses?
Moi de même.
Ainsi donc, que me délie votre indulgence.
 

 
Now my charms are all overthrown, 
And what strength I have's mine own, 
Which is most faint: now, 'tis true, 
I must be here confined by you, 
Or sent to Naples. Let me not, 
Since I have my dukedom got 
And pardon'd the deceiver, dwell 
In this bare island by your spell; 
But release me from my bands
With the help of your good hands: 
Gentle breath of yours my sails 
Must fill, or else my project fails, 
Which was to please. Now I want 
Spirits to enforce, art to enchant, 
And my ending is despair, 
Unless I be relieved by prayer, 
Which pierces so that it assaults 
Mercy itself and frees all faults. 
As you from crimes would pardon'd be,
Let your indulgence set me free.
 

La tempête, traduit par Jean-Louis Curtis (coll. Papiers/Actes Sud, 1986)

00:24 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; théâtre; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

Les pièces de Shakespeare 9a

La tempête

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S'il me fallait emporter sur une île déserte une seule pièce du grand William Shakespeare, je crois bien que je choisirais La tempête, malgré mon admiration pour Comme il vous plaira, Le songe d'une nuit d'été et Un conte d'hiver, entre autres chefs-d'oeuvre.

On y retrouve en effet tous les thèmes chers à son auteur, mais jugez plutôt: Prospero, le duc de Milan, après avoir été déchu et exilé par son frère, se retrouve avec sa fille Miranda sur une île déserte. Grâce à la magie que lui confèrent ses livres, il maîtrise les éléments naturels et les esprits; notamment Ariel, esprit de l'air et de la joie de vivre ainsi que Caliban, être sombre et instinctif symbolisant la terre, la violence et la mort. Le premier acte s'ouvre sur le naufrage - orchestré par Prospero et executé par Ariel - d'un navire portant le roi de Naples, son fils Ferdinand ainsi que le frère parjure de Prospero, Antonio. Usant de ses pouvoirs surnaturels, Prospero fait subir aux trois personnages échoués sur l'île diverses épreuves destinées à les punir de leur trahison, mais qui contiennent aussi, peut-être, un caractère salvateur. Au dernier acte, Prospero se réconcilie avec son frère et le roi, marie sa fille avec Ferdinand, libère Ariel et Caliban puis renonce à la magie pour retrouver son duché.

Critique de la société, de la démocratie et du pouvoir - comme dans Coriolan, Jules César, Richard III ou Henry VI - l'humour, la fantaisie et la féérie occupent néanmoins dans La tempête une place prépondérante, au fil de cette plongée au coeur des méandres de la nature humaine: avec Prospero qui dans son exil amer, médite sur la vieillesse et la mort, mais dans sa solitude, aspire de même à la paix du coeur, la justice et la compassion; avec Ariel au service de Prospero, de nature joyeuse et amoureux des arts, sensible au malheur des hommes; avec Miranda, incarnant l'amour véritable dans toute sa simplicité, sa fraîcheur, sa sincérité envers son père, mais aussi de Ferdinand qui nous réserve une des plus belles scènes d'amour, aux côtes de celles de Roméo et Juliette et Un conte d'hiver.

Le portrait de Caliban est plus complexe: souvent décrit comme un monstre, un médiocre dépourvu de sens moral, il symbolise l'insoumission, la félonie, la sauvagerie, le désir irréfléchi. Oui, sans doute, et pourtant, n'est-il pas le personnage le plus émouvant - le plus humain - de cette pièce, incarnant à lui seul un monde privé de grâce, voué au désespoir, et dont Prospero croit que le destin n'est pas définitivement tracé, s'il est traversé d'affection et d'une patiente éducation capable de l'enrichir de valeurs qui lui sont inconnues?  

En Angleterre, cette oeuvre n'est pas assimilée à une comédie - terme souvent galvaudé chez nous - mais à une romance pastorale. A la différence de Un conte d'hiver qui aboutit aussi au pardon et à la réconciliation, cette pièce est celle de l'apprentissage et de la sagesse dans laquelle tous les questionnements - comme au sein d'une prison sans barreaux - aboutissent au triomphe de l'amour en dissolvant les rancoeurs, les haines, les illusions, devant la précarité de la vie qui prend ses distances.

Pour terminer, sachez que c'est dans La tempête qu'on trouve ce célèbre extrait: Nous sommes de la même étoffe que nos songes et notre infime vie est cernée de sommeil...

En annexe, vous pouvez découvrir - en version bilingue - l'éblouissant épilogue de Prospero...  

La tempête, traduit par Jean-Louis Curtis (coll. Papiers/Actes Sud, 1986)

00:15 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; théâtre; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

07/01/2013

Les pièces de Shakespeare 8b

Roméo et Juliette


17:05 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; théâtre; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

Les pièces de Shakespeare 8a

Roméo et Juliette

littérature; théâtre; livres

Dans l'oeuvre de William Shakespeare, la pièce de théâtre Roméo et Juliette - écrite au début de sa carrière - demeure certainement la plus populaire entre toutes.

L'action se passe à Vérone et met en scène deux grandes familles ennemies, les Montagu et les Capulet. A un bal masqué donné par les Capulet, Roméo - un Montagu - tombe follement amoureux de Juliette, une Capulet promise en mariage au comte Paris, un jeune noble. Il la retrouve à la nuit tombée, sous son balcon, pour lui déclarer son amour. Eperdument amoureux, ils demandent le lendemain au frère Laurent de les marier. Mais leur bonheur sera bref. Tybalt, cousin de Juliette, provoque Roméo en duel, qui refuse. Mercutio, le confident et ami de Roméo, courageux, intelligent, et doué pour la poésie, accepte de le remplacer. Il se bat donc contre Tybalt et meurt. Roméo veut venger la mort de son ami. Il provoque à son tour Tybalt en duel et le tue. Roméo est alors banni de la ville. Le père de Juliette oblige sa fille à épouser le comte Paris. Le mariage doit avoir lieu le lendemain. Juliette s'y refuse et court chez le frère Laurent qui lui remet une potion pouvant lui donner l'apparence de la mort pendant quarante heures. Le frère promet d'avertir Roméo de l'astuce. Mais Roméo ne reçoit pas le message à temps et, croyant Juliette morte, décide d'aller la rejoindre pour l'éternité. Il se rend sur la tombe de Juliette et y rencontre Paris. Un duel a lieu entre les deux jeunes hommes et Paris, mourant, demande à Roméo de l'amener près de Juliette. Celui-ci accepte. Roméo embrasse Juliette avant de boire du poison et de mourir à son tour. À son réveil, Juliette découvre Roméo mort près d'elle. Ne pouvant imaginer la vie sans lui, elle se poignarde et meurt à ses côtés.

Pourquoi ce drame de la passion connaît-il aujourd'hui encore un si vif succès? Aimons-nous tout particulièrement, dans nos humeurs mélancoliques, les histoires d'amour qui finissent mal? Oubien derrière cette querelle de familles rivales entre Capulet et Montagu, y lisons-nous les conséquences inévitables du pouvoir aveugle, exercé sans mesure, et qui en d'autres temps, dans un autre contexte, aurait emprunté les masques obscurs de la religion ou de la politique avec autant de véracité pour fracasser ce qu'il se peut trouver de noble et de précieux sur terre?

Sans doute un peu de tout cela mais, une fois n'est pas coutume, Shakespeare n'a semble-t-il pas cherché autre chose que de projeter sur la scène l'image d'un amour pur, sincère et absolu, qui n'est pas le fruit d'intrigues de cour et qui, jusqu'à sa fin tragique, ne se laisse ni corrompre, ni décourager:

Beauté trop précieuse pour la possession,
trop exquise pour la terre!
Telle la colombe de neige dans une troupe de corneilles,
telle apparaît cette jeune dame au milieu de ses compagnes.
Cette danse finie, j'épierai la place où elle se tient,
et je donnerai à ma main grossière le bonheur de toucher la sienne.
Mon coeur a-t-il aimé jusqu'ici?
Non ; jurez-le, mes yeux!
Car jusqu'à ce soir, je n'avais pas vu la vraie beauté. 

Même la mort n'altère la beauté de leurs sentiments. Ce n'est pas du coeur - propre aux malentendus, aux enchantements imaginaires ou à l'ignorance - que naît le drame de Roméo et Juliette, mais de la seule malveillance - voire la haine - des hommes: un thème cher à son auteur et qu'on retrouve par la suite dans nombreuses de ses pièces, avec davantage d'ironie, de noirceur ou d'amertume.

Si Roméo et Juliette a inspiré maints écrivains, on peut être surpris d'apprendre que la musique n'en est pas le parent pauvre. Ainsi, Charles Gounod et Vincenzo Bellini pour l'opéra; Hector Berlioz, Piotr Ilitch Tchaïkovski et Serge Prokofiev dans leurs oeuvres orchestrales; sans oublier, plus récemment, Leonard Bernstein et son célèbre West Side Story...

traduit par Olivier Py (coll. Papiers/Actes Sud, 2011)

16:54 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; théâtre; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

11/12/2012

William Shakespeare

Bloc-Notes, 11 décembre / Les Saules 

littérature; théâtre; films; livres

Il m'arrive d'être émerveillé de ce que la télévision, parfois, peut ajouter une dimension supplémentaire à une oeuvre en elle-même d'une richesse au-delà de toute mesure. Pour les plus anciens parmi vous, peut-être vous souvenez-vous qu'entre 1978 et 1985, la chaîne française FR3 - à l'époque une coproduction de La Sept - a diffusé l'intégralité des pièces de William Shakespeare, soit 37 oeuvres, tous les samedis après-midi. Un rendez-vous inmanquable dont je conserve aujourd'hui encore les cassettes VHS, comme l'un des plus beaux fleurons de ce que la télévision est capable de créer.

Produite par la BBC, cette réalisation respecte scrupuleusement le texte des pièces de théâtre, mais y ajoute les décors naturels, précieux dans les oeuvres telles Le conte d'hiver, Comme il vous plaira, La tempête ou Cymbeline. Les acteurs sont ceux de la célèbre Royal Shakespeare Company, et parmi les interprétations exceptionnelles, il me plaît de citer Derek Jacobi dans Hamlet, Michel Hordern dans Le roi Lear et La tempête, Jeremy Kemp dans Le conte d'hiver, Kenneth Colley dans Mesure pour mesure, enfin Helen Mirren dans Comme il vous plaira et Le songe d'une nuit d'été.

De nombreux autres acteurs - parfois inconnus du public francophone - méritent d'être cités ici: John Gielgud, John Shrapnel, Trevor Peacock, Anna Calder-Marshall, John Cleese, Jane Lapotaire, Patrick Ryecart, Rebecca Saire, Celia Johnson, Bob Hoskins, Charles Gray, Mike Gwilym, Anthony Hopkins, Amanda Redman, Claire Bloom, Cherie Lunghi, Leonard Rossiter, Peter Benson et tant d'autres!

Aujourd'hui, dans un magnifique coffret, ces 37 pièces de théâtre - disponibles en VO sans sous-titres - sont enfin éditées avec un sous-titrage en français ou anglais moderne, à choix - tirage limité, semble-t-il - présentées pour chacun des titres par Jean-Pierre Richard, contributeur aux oeuvres de William Shakespare pour la Bibliothèque de la Pléiade consacrée à cet auteur.

Un mot encore sur le prix: entre 87 et 92 euros pour ce coffret, voilà qui n'est pas excessif et vaut largement une restriction sur un autre achat! Cela dit, sur le site de la Royal Shakespeare Company, les pièces de théâtre de cette édition peuvent être achetées séparément. En France, c'est seulement le cas pour les Comédies et les Tragédies, à ce jour.

Enfin, ci-dessous, voici un extrait de la production de Hamlet, avec Derek Jacobi et Lalla Ward. D'autres extraits sont disponibles sur YouTube ou ont déjà été intégrés à propos des pièces de Shakespeare sur La scie rêveuse...


littérature; théâtre; films; livres

pour une commande en VO sans sous-titres: http://www.rsc.org.uk/shop/category/d2a2c7b8-e77c-4687-a9d1-8064e86271ab

pour une commande en VO avec sous-titres: http://www.touslesprix.com/comparer/fiche346953.html

10/03/2012

Les pièces de Shakespeare - 7b

Peines d'amour perdues

Voici un extrait de cette pièce de Shakespeare - Acte V, Scène II - qui conclut pour ainsi dire cette comédie. Il est lu par Francis Jeater, dans sa langue originale. Ci-dessous, vous en trouvez la traduction.


Le printemps, chante les deux couplets suivants:
 
Quand la marguerite étoilée et la violette azurée,
Quand la primevère argentée
Et les marguerites d'or
Émaillent les prés de riantes couleurs,
Le coucou alors, de feuillage en feuillage,
Se moque des maris en chantant
Coucou,
Coucou, coucou. ô mot redoutable!
Fatal à l'oreille d'un époux.
 
Quand les bergers enflent leur chalumeau d'avoine;
Quand l'alouette joyeuse sonne le réveil du laboureur;
Quand les tourterelles se caressent, et roucoulent et murmurent,
Et que la jeune bergère blanchit son linge,
Le coucou alors, de feuillage en feuillage,
Se moque des maris en chantant
Coucou,
Coucou, coucou. ô mot redoutable!
Fatal à l'oreille d'un époux.
 
L'hiver, chante à son tour:
 
Quand les glaçons brillent aux toits;
Quand le berger Guillot souffle dans ses doigts;
Quand Pierrot entasse des souches dans le foyer ;
Quand le lait gèle et durcit dans le vase,
Que le sang se glace et que les chemins se salissent,
Alors la chouette effrayante chante dans la nuit
Toou oüe,
Tou oüe, to oüe, note faite pour plaire!
 
Quand la grosse Jeanne écume son pot ;
Quand tous les vents sifflent déchaînés ;
Que la toux emporte le prône du pasteur,
Que les oiseaux sont blottis dans la neige ;
Quand le froid rougit le nez de Marianne ;
Quand les pommes rôties sifflent sur le feu,
Alors la chouette effrayante chante dans la nuit
Toou oüe,
Tou oüe, to oüe, note faite pour plaire!

traduit par Pierre Messiaen (Comédies - Desclée de Brouwer, 1961)

02:42 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Imprimer |  Facebook | | |

Les pièces de Shakespeare - 7a

Peines d'amour perdues

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Cette pièce de théâtre, écrite probablement vers 1596 - l'époque de Songe d'une nuit d'été et de Roméo et Juliette - s'inscrit dans le cycle des comédies de Shakespeare, ou des romances dans la classification anglaise.

De quoi s'agit-il ici? De Ferdinand, roi de Navarre, ainsi que de ses trois compagnons: Biron, Longueville et Dumaine. Ensemble, ils font serment de se consacrer à l'étude et de renoncer à la frivolité, aux excès, aux plaisirs, et de redonner ainsi à la cour son sérieux, son intelligence, sa noblesse. Cette promesse - bien entendu - inclut le renoncement à toute conquête féminine... Ainsi, ils seront mis à très rude épreuve lorsqu'arrivent parmi eux la reine de France accompagnée de ses dames de compagnie: Rosalinde, Marie, et Catherine. Leurs coeurs vont s'enflammer comme fétus de paille, et les voici éperdument amoureux. Oubliés leurs engagements? Le destin - une fois encore - vient mettre un peu d'ordre dans cette comédie libertine: la princesse, apprenant la mort de son père, rejoint ses terres de France avec ses suivantes, non sans que toutes ensemble promettent à leurs galants, un an plus tard - le temps du deuil familial - un rendez-vous qu'on suppose prometteur pour ces jeunes gens, à la seule condition que, pendant leur absence, ils se consacrent à des oeuvres charitables afin d'effacer le parjure et leur prouver par ce sacrifice, la sincérité de leurs sentiments.

Injustement considérée comme une pièce mineure de Shakespeare, c'est pourtant l'une des seules qui soit tout à fait originale, c'est-à-dire non inspirée de textes antérieurs. D'autre part, pour qui ne maîtrise pas la langue anglaise classique, c'est l'une des oeuvres les plus ardues à lire, avec ses jeux de mots, son mélange d'érudition et de moquerie, de tendresse et d'insouciance, de prétention et d'ingénuité. Probablement un cauchemar pour les traducteurs!

Une romance vraiment, Peine d'amour perdues? Sans aucun doute, mais comme toujours avec cet auteur, sous les rires, les caricatures et la pétulence de la jeunesse, on peut y lire la précarité des voeux, la trahison des promesses, les vélléités de l'ascétisme et le passage difficile de la séduction à la preuve de l'amour. Pourtant, Peine d'amour perdues demeure une comédie pleine de charme qu'il vaut la peine de découvrir.

On y retrouve aussi l'un des plus beaux poèmes de Shakespeare: Si l'amour m'a rendu parjure, comment pourrai-je faire serment d'aimer? Ah! il n'est de serments constants que ceux qui sont faits à la beauté; quoique parjure à moi-même, je n'en serai pas moins fidèle à toi. Ces pensées, qui étaient pour moi comme des chênes, s'inclinent devant toi comme des roseaux. L'étude abandonne ses livres pour ne lire que dans tes yeux où brillent tous les plaisirs que l'art peut comprendre. Si la science est le but de l'étude, te connaître suffit pour l'atteindre. Savante est la langue qui peut bien te louer. Ignorante est l'âme qui te voit sans surprise... (Acte IV, Scène II)

On voudrait avoir écrit ces vers...

traduit par Pierre Messiaen (Comédies - Desclée de Brouwer, 1961)

02:42 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; théâtre; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |