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15/07/2014

Antoine Blondin

Antoine_Blondin.jpgAntoine Blondin, Mes petits papiers (La Table Ronde, 2006)

Qu'il est agréable de découvrir les textes inédits de ce marginal mélancolique, célèbre pour ses chroniques du Tour de France, mais surtout pour deux de ses romans: Un singe en hiver et Monsieur Jadis. Du premier il raconte avec beaucoup d'humour qu'il fut injustement objet de réprobation pour publicité scandaleuse de l'ivresse, alors que le propos de l'auteur soulignait simplement que l'alcool permet de recréer un passé enseveli, de rendre la vie acceptable et, dans la solitude, de mieux comprendre autrui... Il y a aussi des pages admirables sur Verlaine et Rimbaud, ses amis Marcel Aymé - une critique saisissante d'Uranus -, René Fallet, Roger Nimier, Kléber Haedens et Albert Vidalie. Critique aussi au vitriol des anniversaires: Verdun, la Libération et le regret des foules pour les graciés... Bien sûr il y a aussi quelques pages sublimes sur Jacques Anquetil et Eddy Merckx, sans oublier un certain match de football de 1954 entre la France et l'Italie, où ce qui fit défaut aux Bleus n'était pas la technique, mais le caractère... Un régal !

07:19 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; chroniques; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

09/07/2014

Le poème de la semaine

Alexandre Voisard

J’ai dit Amour.
J’ai dit Liberté.
Et tout mon corps se tend, falaise abrupte
Dont les racines tremblent dans le sang des origines.
J’ai dit Amour
Et les forêts ne cesseront plus
De frissonner sous les haillons durables de l’enfance.
 
J’ai dit Liberté
Et la pierre est riche de sa dureté
Et ma voix parcourt sans fin les vallées.
J’ai dit Liberté
Et le pays redevient terre,
Humus propice au verbe renaissant.
J’ai dit Liberté
Et la détresse jamais plus ne sèmera sous la trique.
J’ai dit Liberté
Et jamais plus le fer
N’aura de chance à nos poignets.
J’ai dit Liberté
Et jamais plus mes frères
Ne paraferont la poussière des jougs.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

06/07/2014

La citation du jour

André Gide

citation; livres

A dire vrai, les devoirs envers l'Etat sont ceux que j'ai mis le plus de temps et eu le plus de mal à apprendre. Je suis resté longtemps à leur égard dans cette confiance naïve de l'enfant qui s'imagine que son chocolat du matin arrive tout chaud quotidiennement sur sa table, en vertu de quelque nécessité cosmique. Il est bon, pour l'éducation de l'enfant, que, par quelque perturbation familiale, son chocolat, de temps à autre, soit renversé. La peur de ne plus avoir de chocolat du tout est salutaire.

André Gide, Journal 1889-1939 (Bibliothèque de la Pléiade/Gallimard, 1982)

02:49 Écrit par Claude Amstutz dans La citation du jour, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : citation; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

04/07/2014

Lire les classiques - Henri-Frédéric Amiel

Henri-Frédéric Amiel

1.jpg

Petite perle cristalline 
Tremblante fille du matin, 
Au bout de la feuille de thym 
Que fais-tu sur la colline?
 
Avant la fleur, avant l'oiseau, 
Avant le réveil de l'aurore, 
Quand le vallon sommeille encore 
Que fais-tu là sur le coteau?

Henri-Frédéric Amiel, Poème (poesie.webnet.fr)

image:  Alfred William Strutt, Children of the Hills / 1890 (commons.wikimedia.org)

02/07/2014

Le poème de la semaine

Nicolas Bouvier

Depuis que le silence
n'est plus le père de la musique
depuis que la parole a fini d'avouer
qu'elle ne nous conduit qu'au silence
les gouttières pleurent
il fait noir et il pleut
 
Dans l'oubli des noms et des souvenirs
il reste quelque chose à dire
entre cette pluie et Celle qu'on attend
entre le sarcasme et le testament
entre les trois coups de l'horloge
et les deux battements du sang
 
Mais par où commencer
depuis que le midi du pré
refuse de dire pourquoi
nous ne comprenons la simplicité
que quand le cœur se brise.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

25/06/2014

Le poème de la semaine

Georges Jean

Se ramasse au fond du Temps
Le secret des longues routes
 
Visages emplis de vent
Marais ouverts au soleil
 
Promenade d’un enfant
J’entends le bruit sec des feuilles
 
Sillons abandonnés où rouillent des charrues
 
Sombres forêts perdues où passait une fille
Et ses cheveux d’ardoise et ses mains de genêts
 
Le soir est écarté aux limites du ciel
 
L’immobilité me convient
 
Alors les mots
comme des bulles
montent.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

00:11 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

23/06/2014

Béatrice Wilmos

9782081223349.gifBéatrice Wilmos, L'Album de Menzel (Flammarion, 2010)

Parfois, ce qui est improbable arrive. Andrei Mayerov, conservateur du musée de l'Hermitage à Léningrad, chargé de récupérer les oeuvres d'art volées par les allemands au cours de la deuxième guerre mondiale, le réalise quand il rencontre Anna, restauratrice de dessins, dont la famille a été massacrée par ses compatriotes. Ils s'aiment et se promet de lui restituer l'album du peintre Menzel: J'aime la façon dont il allonge les jambes quand il s'assied avec nous pour bavarder et ce regard qu'il pose alors sur moi, longuement, comme s'il s'attendait que je lui parle. J'aime quand il se tient en retrait et me regarde travailler en silence. (...) J'aime ses mains quand il prend un dessin et du doigt, très légèrement, suit un tracé pâli ou le contour d'une déchirure. J'aime sa manière vive de tourner les pages de son carnet de croquis et de dessiner hâtivement, assis sur un muret, à la terrasse d'un café ou, même, marchant et me parlant, le pas à peine ralenti, le visage baissé, sa main qui tient le carnet, toujours un peu en biais, ses doigts qui vont et viennent très vite sur la page, présent près de moi et pourtant absorbé par tant d'images qui me demeurent étrangères...

Je n'en irai pas davantage, sinon que bien au-delà d'une histoire d'amour, ce livre parle de la folie des hommes, des horreurs de la guerre avec ses haines, ses souffrances, ses vengeances perpétrées par l'armée de Staline, marchant sur Berlin. Une belle écriture pour relier le destin individuel de quelques-uns à l'un des épisodes les plus abjects de notre époque. Ponctué d'observations fines sur l'art, ce récit servi par une trame romanesque délicate et poignante, mériterait à son auteur discret un emplacement privilégié dans nos librairies ou nos bibliothèques!

Béatrice Wilmos a déjà publié La dernière sonate de l'hiver (Flammarion, 2007) ainsi que Le cahier des mots perdus (Belfond, 2013). L'Album de Menzel est son second roman.

 

08:58 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature: roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

21/06/2014

Philippe Jaccottet

images.jpegSébastien Labrusse, Au coeur des apparences - Poésie et peinture selon Philippe Jaccottet / précédé de: En compagnie des peintres - Entretien avec Philippe Jaccottet (Editions de la Transparence, 2012)

Précédé d'un entretien avec Philippe Jaccottet - En compagnie des peintres - tout le mérite de Sébastien Labrusse revient à débroussailler et mettre en perspective l'univers de l'auteur de La promenade sous les arbres à travers quelques motifs rarement traités, tels le contraste entre la force de l'émotion transcrite et l'insignifiance de ce qui la cause; le sens du sacré et son approche du paradis récusant toute représentation; enfin, le thème de la joie dans ses écrits en contrepoint à la finitude omniprésente dans toute son oeuvre: Je pense quelquefois que si j'écris encore, c'est, ou ce devrait être avant tout pour rassembler les fragments, plus ou moins lumineux et probants, d'une joie dont on serait tenté de croire qu'elle a explosé un jour, il y a longtemps, comme une étoile intérieure, et répandu sa poussière en nous. (Cahier de verdure)

Approche du paysage, regard d'un peintre des mots, des frontières visibles et invisibles qui l'épanouissent ou le hantent - à l'épreuve de la mort - Philippe Jaccottet est admirablement cerné, autant qu'il se peut, dans cet essai de Sébastien Labrusse dont l'intelligence est d'accorder un vaste espace à la parole de l'auteur lui-même, dont on se réjouit de mieux découvrir les textes qui à ce jour auraient échappé à notre curiosité: Sur le jeune figuier épargné par l'incendie, une première feuille verte, tel un nouveau phénix. Plus que jamais est-on tenté de relire, après Silesius: Dieu est le vert des prés. (La seconde Semaison)  

00:03 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Littérature suisse, Philippe Jaccottet | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; essai; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

18/06/2014

Le poème de la semaine

Lucie Delarue-Mardrus

L’odeur de mon pays était dans une pomme.
Je l’ai mordue avec les yeux fermés du somme
Pour me croire debout dans un herbage vert.
L’herbe haute sentait le soleil et la mer,
L’ombre des peupliers, y allongeait ses raies,
Et j’entendais le bruit des oiseaux, plein les haies,
Se mêler au retour des vagues de midi.
Je venais de hocher le pommier arrondi,
Et je m’inquiétais d’avoir laissé ouverte,
Derrière moi, la porte au toit de chaume mou…
 
Combien de fois, ainsi, l’automne rousse et verte,
Me vit-elle au milieu du soleil et, debout,
Manger, les yeux fermés, la pomme rebondie
De tes prés, copieuse et forte Normandie!…
Ah! Je ne guérirai jamais de mon pays.
N’est-il pas la douceur des feuillages cueillis
Dans leur fraîcheur, la paix et toute l’innocence?
Et qui donc a jamais guéri de son enfance?…
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

00:01 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

09/06/2014

Noëlle Châtelet

9782234048041-1.gifNoëlle Chatelet, La femme coquelicot (Stock, 1998)

C'est une bien jolie histoire que celle de Marthe, qui à soixante-dix ans, rêve de vivre une passion partagée avec Félix, un séduisant peintre de quatre-vingts ans. Elle en oublie son âge, ses douleurs physiques, ses habitudes de vieille dame. Ses enfants et petits-enfants n'en croient pas leurs yeux. Une amitié amoureuse, une illusion du regard, une attirance platonique? Pas le moins du monde, car dans les yeux de Marthe et de Félix brille cette flamme qui dit le désir, l'admiration, la beauté, le romantisme et les couleurs de la vie. Ce roman délicat montre avec beaucoup de justesse la turbulence juvénile retrouvée, les réactions embarrassées de l'entourage, l'harmonie que suscite l'amour tardif à découvert. Un savoureux mélange de tendresse, de pudeur et de grâce.     

également disponible en coll. Livre de poche (LGF, 1999)

02:13 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : littérature; roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |