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18/10/2013

La citation du jour

H.B. dit Stendhal

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Je viens d'éprouver ce soir que la musique, quand elle est parfaite, met le coeur exactement dans la même situation où il se trouve quand il jouit de la présence de ce qu'il aime; c'est-à-dire qu'elle donne le bonheur apparemment le plus vif qui existe sur cette terre. S'il en était ainsi pour tous les hommes, rien au monde ne disposerait plus à l'amour.

H.B. dit Stendhal, De l'amour (Coll. Garnier-Flammarion, 1965)

image: Michael Mao, Morning Light (tuttartpitturasculturapoesiamusica.com)

10:50 Écrit par Claude Amstutz dans H.B. dit Stendhal, La citation du jour, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : citation; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

Morceaux choisis - Sylvie Germain

Sylvie Germain

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Un reliquat de sens résiste, il glisse, insaisissable. C'est ainsi que le désir court, sans fin, et qu'il s'accroît - désir de voir encore, davantage, autrement, désir de comprendre plus, et mieux. Désir de caresser la peau de la réalité, d'en palper la chair, d'en sonder l'épaisseur, d'en sentir battre le pouls - comme ces mains aux doigts écartés dont les hommes des temps préhistoriques ont laissé des traces, en négatif et en positif, sur les parois des grottes. Mains à l'écoute de la roche, de la pénombre, des énergies de la terre, de la vie et aussi de la mort. Paumes offertes et demandeuses, posées contre le flanc du corps prodigieux du monde. Mains de gloire et de quête.

Le désir court, il tâte le monde, il se collette avec la réalité, il empoigne et étreint l'humanité dans l'espoir d'accéder à leur coeur, d'en comprendre le fonctionnement, le processus, mais parfois il s'arrête, saisi d'effroi, d'impuissance...

Sylvie Germain, Rendez-vous nomades (Albin Michel, 2012)

image: Sylvie Germain (mediatecafranceza.wordpress.com)

00:20 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; essai; morceaux choisis; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

17/10/2013

Kim Thuy

Bloc-Notes, 17 octobre / Les Saules

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Si vous avez aimé le premier livre de Kim Thuy, Ru - paru chez le même éditeur en 2010, et présenté dans ces colonnes - vous tomberez à nouveau sous le charme de son nouveau livre, Man, écrit à la première personne. Parcours d'une femme qui a choisi de toujours rester debout, et qui, évoquant le visage de sa mère restée au Vietnam, nous parle de sa terre en guerre et de sa nouvelle patrie, le Canada - conquise à la faveur d'un mariage arrangé - à travers des retours en arrière, des anecdotes, des différences de coutumes, de langages ou de comportements entre les deux pays, montrés tels des estampes délicates au lecteur attentif: récit d'un déracinement et d'une quête identitaire où la joie se mêle à la tristesse sans jamais sombrer dans la sociologie populaire ou les clichés: Peut-être parce que nous acceptons les choses telles qu'elles sont, telles qu'elles nous arrivent, sans jamais questionner le pourquoi ni le comment.

Tenant un restaurant, la cuisine est l'un des ressorts importants dont elle dispose pour cerner l'espace de sa mémoire qui la relie à sa terre des origines: L'un des clients était originaire de Rach Gia, une ville côtière où l'on a inventé une soupe-repas au poisson poché avec des vermicelles, rehaussée de porc et de crevettes caramélisées dans les oeufs de crevettes. Des larmes ont coulé sur sa joue lorsque j'ai arrosé son bol d'une petite cueillerée d'ail mariné au vinaigre. En mangeant cette soupe, il m'a susurré qu'il avait goûté sa terre, la terre où il avait grandi, où il était aimé.

Préparée au bonheur - assimilé à la protection, au bien-être, à la sécurité - davantage qu'à l'amour, la première partie du récit de Man peut se résumer ainsi: Je m'appelle Man, ce qui veut dire "parfaitement comblée" ou "qu'il ne reste plus rien à désirer", ou "que tous les voeux ont été exaucés". Je ne peux rien demander de plus, car mon nom m'impose cet état de satisfaction et d'assouvissement. Contrairement à la Jeanne de Maupassant, qui rêvait de saisir tous les bonheurs de la vie à sa sortie du couvent, j'ai grandi sans rêver.

Mais Man est aussi l'histoire d'un apprentissage, d'une libération intérieure et d'un accomplissement dont je vous laisse le soin de découvrir les contours. Nous baladant de Saïgon à Montréal en passant par Paris, l'écriture de Kim Thuy est sensuelle, poétique et tendre, même si son propos demeure grave, douloureux sous une apparente frivolité.

Kim Thuy est née en 1968 à Saigon, la capitale du Sud du Vietnam qui est devenue Hô Chi Minh Ville. Elle a quitté le pays avec d’autres boat people à l’âge de 10 ans, pour se retrouver dans un sordide campement de réfugiés en Malaisie. C'est le Québec qui a fini par l'accueillir. Elle y vit depuis trente ans, mère de deux enfants maintenant, et est retournée plusieurs fois au Vietnam. Son parcours est quelque peu atypique. En effet, elle a été couturière, interprète, avocate, restauratrice, chroniqueuse culinaire avant de devenir écrivain en langue française...

Sur La scie rêveuse - dans Morceaux choisis - vous pouvez découvrir un extrait de son dernier livre.

Kim Thuy, Man (Liana Levi, 2013)

Kim Thuy, Ru (coll. Piccolo/Liana Levi,  2011)

07:33 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; récit; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

16/10/2013

Le poème de la semaine

Robert Desnos

merci à Christiane H

Se glisser dans ton ombre à la faveur de la nuit.
Suivre tes pas, ton ombre à la fenêtre.
Cette ombre à la fenêtre c'est toi, ce n'est pas une autre, c'est toi.
N'ouvre pas cette fenêtre derrière les rideaux de laquelle tu bouges.
Ferme les yeux.
Je voudrais les fermer avec mes lèvres.
Mais la fenêtre s'ouvre et le vent, le vent
qui balance bizarrement la flamme
et le drapeau entoure ma fuite de son manteau.
La fenêtre s'ouvre: ce n'est pas toi.
Je le savais bien.

 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle
 

00:02 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

15/10/2013

Pierre Magnan

9782221116586.gifPierre Magnan, Elégie pour Laviolette (Robert Laffont, 2010)

Je l’aime décidément beaucoup, ce commissaire Laviolette: émouvant, drôle, érudit, malicieux, fin limier de surcroît. Aucune de ses enquêtes tortueuses à souhait - situées au pays de Giono en Provence – ne m’a déçu à ce jour et cette dernière pas davantage, dans laquelle un cimetière joue une nouvelle fois un rôle déterminant… Laissé pour mort dans un précédent roman - Le parme convient à Laviolette - le nez dans une touffe de thym, et baignant dans une mare de sang, guéri de ses sept impacts de chevrotine dans le dos, il est chargé d’une nouvelle enquête: la routine, soi-disant, comme l’affirme le conseiller Honnoraty. Presque rien, en somme : un homme vient de mourir à l’hôpital de Gap, et les neveux spoliés portent plainte pour captation d’héritage. Le coup classique, quoi! Pas de quoi fouetter un chat. On a même demandé une autopsie et ça n’a rien donné: la mort est naturelle. Deux détails pourtant: la veuve avait célébré ses noces avec le mourant quatre jours auparavant en évinçant la maîtresse en titre, et on avait trouvé sur les mains de la victime d’abondantes traces de talc… C’est ainsi que Laviolette et le juge Chabrand se retrouvent pour l’enterrement à  La Roque-du-Champsaur...

Pierre Magnan est l'auteur de plusieurs romans - tous disponibles en coll. Folio policier/Gallimard - qui mettent en scène son personnage fétiche: Les secrets de Laviolette, Le tombeau d'Hélios, Le commissaire dans la truffière, Le secret des Andrônes, Les charbonniers de la mort, Le parme convient à Laviolette. Cinq titres - dont Les courriers de la mort et Le sang des Atrides - ont été fidèlement adaptés à la télévision, avec un Victor Lanoux convaincant dans le rôle du commissaire Laviolette.

Pierre Magnan compte parmi les plus belles plumes de France, usant d’un langage poétique ancré dans la terre pour déchiffrer le secret des âmes. Aucun auteur n’a fait mieux depuis Simenon! Découvrez vite les autres livres de cet écrivain talentueux - qui nous a quittés en avril 2012 à lâge de 89 ans - parmi lesquels Laura du bout du monde, La folie Forcalquier, Périple d'un cachalot, La maison assassinée et Pour saluer Giono (coll. Folio/Gallimard) ou encore l'album illustré Les romans de ma Provence (Editions du Chêne), sans oublier un très beau texte autobiographique, Apprenti (coll. Folio/Gallimard).

Elégie pour Laviolette est également disponible en format de poche (coll. Folio Policier/Gallimard, 2012).

09:03 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Littérature policière | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature: roman; livresé | |  Imprimer |  Facebook | | |

14/10/2013

Philippe Labro

littérature: roman; livres Philippe Labro, Franz et Clara (Gallimard, 2006)

Elisabeth est violoniste dans un orchestre, à Lucerne. En proie au doute, elle surmonte avec peine un premier échec amoureux. Jusqu'au jour où elle rencontre un jeune garçon attachant, Franz, qui lui ressemble comme un frère. Il va chercher à apprivoiser Elisabeth, et lui avouer ses sentiments. Mais il n'a que douze ans, elle en a vingt... Dix ans plus tard, lors d'un concert à Boston. Franz est là. Ont-ils oublié, l'un et l'autre, les moments heureux de leur adolescence?

Il n’y a pas d’amour impossible, et ce récit est là pour le prouver. Histoire fleur bleue ? Peut-être, mais l’écriture est fine, sensible et on se surprend à croire à cette histoire. Un bien joli livre.

Egalement disponible en coll. Folio (Gallimard, 2007)

08:05 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature: roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

13/10/2013

Lire les classiques - Charles Baudelaire

Charles Baudelaire

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La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d'une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l'ourlet;
 
Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
 
Un éclair... puis la nuit! - Fugitive beauté
Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l'éternité?
 
Ailleurs, bien loin d'ici! trop tard! jamais peut-être!
Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
O toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais! 
 

Charles Baudelaire, A une passante - Les fleurs du mal , dans: Oeuvres complètes (Bibliothèque de la Pléiade/Gallimard, 1961)

image: Une passante / Paris (dinosoria.com)

10/10/2013

Morceaux choisis - Maurice Chappaz

Maurice Chappaz

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O juillet qui fleurit dans les artères
je désire toutes les choses
 
Dans la rouge mémoire de mon sang
bougent les limons et les chairs vivaces
sécheresse sécheresse
là chantent les écumes
mes soifs fument
 
Mais toi tu es délicatesse
tu me seras livrée la nuit comme la forêt
qui dira alors ce qu'est ton coeur?
la pleine nuit de ton coeur?
quel silence
puis quelle voix superbe chantera dans l'ombre.
 
Quand tu seras penchée vers moi
alors mes bras deviendront beaux
tu reposeras sur ma poitrine
et tu seras sur moi comme une source
comme le chant de la source
ô tendresse qui éveille les eaux
et leur abondance douce
 
Je sais que tu es semblable à la terre
que pareille
tu apportes de rustiques présents
que ton corps est comme le vrai froment
tu donnes le pain
le don simple et bon
de ce qui se touche et qui se voit
tu couvres l'homme de moisson
tu es pareille aux fruits des arbres
apportant leur soleil et leur douceur
et je t'appellerai 
le lait le miel le raisin.
 
Puis vient la joie
vous saisons vous matières
vous êtes cédées
oh! j'ai envie de dire merveille merveille
femme combien tu es belle
paraît ta grande nature
tu glisses dans les bras de celui qui t'aime
tout soleil est perdu
 
C'est maintenant le silence frais de la nuit
c'est dans ton coeur qu'il faut chercher l'été
qu'il faut tout chercher
je n'ai plus qu'envie de dire
merveille merveille
 
Qui dira la nuit?
qui dira l'été?
 

Maurice Chappaz, La merveille de la femme / extrait, dans: Verdures de la nuit (Fata Morgana, 2004)

image: Albert Anker, Die kleine Kartoffelschälerin (picstopin.com)

09/10/2013

Le poème de la semaine

Antonin Artaud

Ce triangle d’eau qui a soif
cette route sans écriture
Madame, et le signe de vos mâtures
sur cette mer où je me noie
 
Les messages de vos cheveux
le coup de fusil de vos lèvres
cet orage qui m’enlève
dans le sillage de vos yeux.
 
Cette ombre enfin, sur le rivage
où la vie fait trêve, et le vent,
et l’horrible piétinement
de la foule sur mon passage.
 
Quand je lève les yeux vers vous
on dirait que le monde tremble,
et les feux de l’amour ressemblent
aux caresses de votre époux.
 
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle
 

00:07 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

08/10/2013

La citation du jour

François Mauriac

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Croire c'est aimer.

François Mauriac, Ce que je crois (Grasset, 1961)

image: Gaby Pontarollo (monjura.actifforum.com)