Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

30/04/2014

Le poème de la semaine

Georges-Emmanuel Clancier

Amis le soir au bord des villages.
Voix d'ombre dormeuse
Ou cascade solaire.
C'est toujours avec vous une longue jeunesse
Malgré les deuils, malgré la vie.
Au cœur de vos paroles
Le monde reste clairière,
Saison promise
Au fil du silence.
Mes amis de campagne.
 
C'est toujours juin pour notre souvenir,
Les chemins d'herbe et de jacinthes,
Les foins qu'on fane dans l'odeur de la joie,
La rue devient forêt, devient rivière,
Les hommes sur leur poussière
Sont dignes de l'amour,
Mes amis au soir de la longue journée.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

00:13 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

23/04/2014

Le poème de la semaine

Guillevic

Douceur,
Je dis: douceur.
 
Je dis: douceur des mots
Quand tu rentres le soir du travail harassant
Et que des mots t'accueillent
Qui te donnent du temps.
 
Car on tue dans le monde
Et tout massacre nous vieillit.
 
Je dis: douceur,
Pensant aussi
A des feuilles en voie de sortir du bourgeon,
A des cieux, à de l'eau dans les journées d'été,
A des poignées de main.
 
Je dis: douceur, pensant aux heures d'amitié,
A des moments qui disent
Le temps de la douceur venant pour tout de bon,
 
Cet air tout neuf,
Qui pour durer s'installera.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

00:01 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

16/04/2014

Le poème de la semaine

Fernand Gregh

Il pleut, 
Les vitres tintent. 
 
Le vent de Mai fait dans le parc un bruit d’automne. 
Une porte, en battant sans fin, grince une plainte 
Mineure et monotone. 
Il pleut... 
 
On dirait par moments qu’un million d’épingles 
Se heurte aux vitres et les cingle. 
Il pleut, 
Les vitres tintent. 
 
Le ciel cache un à un ses coins légers de bleu 
Sous de rapides nuées grises. 
Il pleut: 
La vie est triste! 
 
— N’importe! 
Souffle le vent, batte la porte, 
Tombe la pluie! 
N’importe! 
 
J’ai dans mes yeux une clarté qui m’éblouit; 
J’ai dans ma vie un grand espace bleu; 
J’ai dans mon cœur un jardin vert ombré de palmes 
Que balancent en plein azur les brises calmes: 
Je songe à elle! 
 
Il pleut... 
 
— La vie est belle! 
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

00:16 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

09/04/2014

Le poème de la semaine

Andrée Chedid

Par les jardins de la terre,
Par les fontaines du seul amour,
Par le blé et le liseron,
Par l'élan et le roitelet,
Par ma jeunesse tant promise,
Par l'ami retrouvé,
Par tous les mots que je veux dire,
Par les mortels que j'aimerai:
Que je vive, ah! que je vive
Encore un espace de ce temps,
De ce temps qui nous est compté.
 
 
Quelques traces de craie dans le ciel, 
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

02/04/2014

Le poème de la semaine

Boris Vian

Je me souviens de vous
Tout au fond d'un jardin secret
Dans le soleil léger de mai
J'étais à vos genoux
Je me souviens de vous
Nous vivions à cent lieues de tout
L'amour nous tenait lieu de tout
Vos yeux guidaient mon rêve fou
Dans le verger plein de parfum
Chantaient de gais oiseaux
Les feuilles frissonnaient
Là-haut
Je me souviens de vous
Les ombres bleues du soir tombaient
Tout contre moi vous vous serriez
La vie allait danser pour nous
 
La ville dort sous la chaleur de juin
Voici l'Église et le marché au pain
Voici la rue, le vieux portail disjoint
Qui cède et s'ouvre sous ma main
 
Je me souviens de vous
Fantôme d'un amour pâli
Amer plaisir des jours jolis
Jeunesse au coeur cassé
Je me souviens de vous
J'étais entré heureux, soudain
Je vous ai vus dans le jardin
Sa joue collée à votre joue
Dans le verger plein d'oiseaux gris
S'est arrêtée ma vie
Et je me suis sauvé
Bien loin
Je me souviens de vous
Amie perdue, ma vie, mon coeur
Voici que se ferment les fleurs
Et voici que je pleure...
 
 
Quelques traces de craie dans le ciel, 
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

02:19 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

25/03/2014

Le poème de la semaine

Edmond Jabès

Je suis à la recherche
d’un homme que je ne connais pas,
qui jamais ne fut tant moi-même
que depuis que je le cherche.
A-t-il mes yeux, mes mains
et toutes ces pensées pareilles
aux épaves de ce temps ?
Saison des mille naufrages,
la mer cesse d’être la mer
devenue l’eau glacée des tombes.
Mais, plus loin, qui sait plus loin ?
Une fillette chante à reculons
et règne la nuit sur les arbres,
bergère au milieu des moutons.
Arrachez la soif au grain de sel
qu’aucune boisson ne désaltère.
Avec les pierres, un monde se ronge
d’être, comme moi, de nulle part.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

10:36 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

19/03/2014

Le poème de la semaine

Charles Vildrac

Au long des jours et des ans,
Je chante, je chante.
 
La chanson que je me chante
Elle est triste et gaie:
La vieille peine y sourit
Et la joie y pleure.
 
C’est la joie ivre et navrée
Des rameaux coupés,
Des rameaux en feuilles neuves
Qui ont chu dans l’eau;
 
C’est la danse du flocon
Qui tournoie et tombe,
Remonte, rêve et s’abîme
Au désert de neige;
 
C’est, dans un jardin d’été.
Le rire en pleurs d’un aveugle
Qui titube dans les fleurs;
 
C’est une rumeur de fête
Ou des Jeux d’enfants
Qu’on entend du cimetière.
 
C’est la chanson pour toujours,
Poignante et légère,
Qu’étreint mais n’étrangle pas
L’âpre loi du monde;
 
C’est la détresse éternelle,
C’est la volupté
D’aller comme un pèlerin
Plein de mort et plein d’amour!
 
Plein de mort et plein d’amour,
Je chante, je chante!
 
C’est ma chance et ma richesse
D’avoir dans mon coeur
Toujours brûlant et fidèle
Et prêt à jaillir;
 
Ce blanc rayon qui poudroie
Sur toute souffrance;
Ce cri de miséricorde
Sur chaque bonheur.
 
Quelques traces de craie dans le ciel, 
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

05:07 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

12/03/2014

Le poème de la semaine

Anne Perrier

Si j'étais la vallée profonde
Je vous cacherais dans mes fleuves
Si j'étais la mer
Je vous emporterais vers mes abîmes
Si j'étais le torrent
Je me jetterais en vous
Si j'étais le sentier
J'irais me coucher à vos pieds
Si j'étais la vigne et le vin
Je vous enivrerais toute la nuit
Si j'étais le blé mûr
Je vous couvrirais d'or
Si j'étais l'abeille de juin
Je vous butinerais le coeur
Si j'étais le lézard
Vous me trouveriez dans vos murs
Mais que suis-je?
Rien rien
Pour toujours ce visage en larmes
Blotti dans vos mains
 
Quelques traces de craie dans le ciel, 
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

05/03/2014

Le poème de la semaine

Marie Noël

La Morte et ses mains tristes…
Arrive au Paradis.
 
"D’où reviens-tu, ma fille,
Si pâle en plein midi?
 
- Je reviens de la terre
Où j’avais un pays,
 
De la saison nouvelle
Où j’avais un ami.
 
Il m’a donné trois roses
Mais jamais un épi.
 
Avant la fleur déclose,
Avant le blé mûri,
 
Hier il m’a trahie.
J’en suis morte aujourd’hui.
 
- Ne pleure plus, ma fille
Le temps en est fini.
 
Nous enverrons sur terre
Un ange en ton pays,
 
Quérir ton ami traître,
Le ramener ici.
 
- N’en faites rien, mon Père
La terre laissez-lui.
 
Sa belle y est plus belle
Que belle je ne suis,
 
Las! et faudra, s’il pleure
Sans elle jour et nuit
 
Que de nouveau je meure
D’en avoir trop souci."
 
Quelques traces de craie dans le ciel,  
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

00:05 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

26/02/2014

Le poème de la semaine

Emile Nelligan

Hier, j’ai vu passer, comme une ombre qu’on plaint, 
En un grand parc obscur, une femme voilée: 
Funèbre et singulière, elle s’en est allée, 
Recélant sa fierté sous son masque opalin. 
  
Et rien que d’un regard, par ce soir cristallin, 
J’eus deviné bientôt sa douleur refoulée; 
Puis elle disparut en quelque noire allée 
Propice au deuil profond dont son cœur était plein. 
  
Ma jeunesse est pareille à la pauvre passante: 
Beaucoup la croiseront ici-bas dans la sente 
Où la vie à la tombe âprement nous conduit. 
  
Tous la verront passer, feuille sèche à la brise 
Qui tourbillonne, tombe et se fane en la nuit; 
Mais nul ne l’aimera, nul ne l’aura comprise. 
 
 
Quelques traces de craie dans le ciel, 
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

08:11 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |