11/02/2015
Le poème de la semaine
Jules Supervielle
Il vous naît un poisson qui se met à tourner
Tout de suite au plus noir d'une lame profonde,
Il vous naît une étoile au-dessus de la tête,
Elle voudrait chanter mais ne peut faire mieux
Que ses soeurs de la nuit les étoiles muettes.
Il vous naît un oiseau dans la force de l'âge,
En plein vol, et cachant votre histoire en son coeur
Puisqu'il n'y a que son cri d'oiseau pour la montrer.
Il vole sur les bois, se choisit une branche
Et s'y pose, on dirait qu'elle est comme les autres.
Où courent-ils ainsi ces lièvres, ces belettes,
Il n'est pas de chasseur encor dans la contrée,
Et quelle peur les hante et les fait se hâter,
L'écureuil qui devient feuille et bois dans sa fuite,
La biche et le chevreuil soudain déconcertés?
Il nous naît un ami, et voilà qu'il vous cherche
Il ne connaîtra pas votre nom ni vos yeux
Mais il faudra qu'il soit touché comme les autres
Et loge dans son coeur d'étranges battements
Qui lui viennent de jours qu'il n'aura pas vécus.
Et vous, que faites-vous, ô visage troublé
Par ces brusques passants, ces bêtes, ces oiseaux,
Vous qui vous demandez, vous, toujours sans nouvelles,
"Si je croise jamais un de ces amis lointains
Au mal que je lui fis vais-je le reconnaître?"
Pardon pour vous, pardon pour eux, pour le silence
Et les mots inconsidérés,
Pour les phrases venant de lèvres inconnues
Qui vous touchent de loin comme balles perdues,
Et pardon pour les fronts qui semblent oublieux.
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle
00:03 Écrit par Claude Amstutz dans Jules Supervielle, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : textes; poésie | | Imprimer | Facebook |
04/02/2015
Le poème de la semaine
René Char
L’heureux temps
Chaque cité était une grande famille
Que la peur unissait
Le chant des mains à l’œuvre
Et la vivante nuit du ciel
L’illuminaient
Le pollen de l’esprit
Gardait sa part d’exil
Mais le présent perpétuel
Le passé instantané
Sous la fatigue maîtresse
Otèrent les lisses
Marche forcée au terme épars
Enfants battus chaume dorée
Hommes sanieux
Tous à la roue
Visée par l’abeille de fer
La rose en larmes s’est ouverte
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle
03:44 Écrit par Claude Amstutz dans Quelques traces de craie dans le ciel - Anth, René Char | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : textes; poésie | | Imprimer | Facebook |
28/01/2015
Le poème de la semaine
Louis Aragon
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Tous deux adoraient la belle
Prisonnière des soldats
Lequel montait à l'échelle
Et lequel guettait en bas
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Qu'importe comment s'appelle
Cette clarté sur leur pas
Que l'un fut de la chapelle
Et l'autre s'y dérobât
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Tous les deux étaient fidèles
Des lèvres du coeur des bras
Et tous les deux disaient qu'elle
Vive et qui vivra verra
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles
Au coeur du commun combat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Du haut de la citadelle
La sentinelle tira
Par deux fois et l'un chancelle
L'autre tombe qui mourra
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Ils sont en prison Lequel
A le plus triste grabat
Lequel plus que l'autre gèle
Lequel préfère les rats
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Un rebelle est un rebelle
Nos sanglots font un seul glas
Et quand vient l'aube cruelle
Passent de vie à trépas
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Répétant le nom de celle
Qu'aucun des deux ne trompa
Et leur sang rouge ruisselle
Même couleur même éclat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Il coule, il coule, il se mêle
À la terre qu'il aima
Pour qu'à la saison nouvelle
Mûrisse un raisin muscat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
L'un court et l'autre a des ailes
De Bretagne ou du Jura
Et framboise ou mirabelle
Le grillon rechantera
Dites flûte ou violoncelle
Le double amour qui brûla
L'alouette et l'hirondelle
La rose et le réséda
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle
23:10 Écrit par Claude Amstutz dans Louis Aragon, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | | Imprimer | Facebook |
21/01/2015
Le poème de la semaine
Philippe Soupault
Rien que cette lumière que sèment tes mains rien que cette flamme et tes yeux ces champs cette moisson sur ta peau rien que cette chaleur de ta voix rien que cet incendie rien que toi Car tu es l’eau qui rêve et qui persévère l’eau qui creuse et qui éclaire l’eau douce comme l’air l’eau qui chante celle de tes larmes et de ta joie Solitaire que les chansons poursuivent heureux du ciel et de la terre forte et secrète vivante ressuscitée Voici enfin ton heure tes saisons tes années L’automne sur le toit fait un bruit de pigeons l’or coule Il est midi Les arbres ont peur La mort vole L’odeur de l’agonie comme une trop longue musique sème des gouttes de sang une femme dort près d’une fleur gonflée d’eau. Quelques traces de craie dans le ciel,Anthologie poétique francophone du XXe siècle
00:01 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |
14/01/2015
Le poème de la semaine
Paul Eluard
Dans le château des pauvres je n’ai pu t’offrir
Que de dire ton cœur comme je dis mon cœur
Sans ombre de douleur sans ombre de racines
En enfant frère des enfants qui renaîtront
Toujours pour confirmer notre amour et l’amour
Le long effort des hommes vers leur cohésion
Cette chaîne qui sort de la géhenne ancienne
Est soudée à l’or pur au feu de la franchise
Elle respire elle voit clair et ses maillons
Sont tous des yeux ouverts que l’espoir égalise
La vérité fait notre joie écoute-moi
Je n’ai plus rien à te cacher tu dois me voir
Tel que je suis plus faible et plus fort que les autres
Plus fort tenant ta main plus faible pour les autres
Mais j’avoue et c’est là la raison de me croire
J’avoue je viens de loin et j’en reste éprouvé
Il y a des moments où je renonce à tout
Sans raisons simplement parce que la fatigue
M’entraîne jusqu’au fond des brumes du passé
Et mon soleil se cache et mon ombre s’étend
Vois-tu je ne suis pas tout à fait innocent
Et malgré moi malgré colères et refus
Je représente un monde accablant corrompu
L’eau de mes jours n’a pas toujours été changée
Je n’ai pas toujours pu me soustraire à la vase
Mes mains et ma pensée ont été obligées
Trop souvent de se refermer sur le hasard
Je me suis trop souvent laissé aller et vivre
Comme un miroir éteint faute de recevoir
Suffisamment d’images et de passions
Pour accroître le poids de ma réflexion
Il me fallait rêver sans ordre et sans logique
Sans savoir sans mémoire pour ne pas vieillir
Mais ce que j’ai souffert de ne pouvoir déduire
L’avenir de mon cœur fugitif dis-le toi
Toi qui sais comment j’ai tenté de m’associer
A l’espoir harmonieux d’un bonheur assuré
Dis-le toi la raison la plus belle à mes yeux
Ma quotidienne bien-aimée ma bien-aimante
Faut-il que je ressente ou faut-il que j’invente
Le moment du printemps le cloître de l’été
Pour me sentir capable de te rendre heureuse
Au cœur fou de la foule et seule à mes côtés
Nul de nous deux n’a peur du lendemain dis-tu
Notre cœur est gonflé de graines éclatées
Et nous saurons manger le fruit de la vertu
Sa neige se dissipe en lumières sucrées
Nous le reproduirons comme il nous a conçus
Chacun sur un versant du jour vers le sommet
Oui c’est pour aujourd’hui que je t’aime ma belle
Le présent pèse sur nous deux et nous soulève
Mieux que le ciel soulève un oiseau vent debout
C’est aujourd’hui qu’est née la joie et je marie
La courbe de la vague à l’aile d’un sourire
C’est aujourd’hui que le présent est éternel
Je n’ai aucune idée de ce que tu mérites
Sauf d’être aimée et bien aimée au fond des âges
Ma limite et mon infini dans ce minuit
Qui nous a confondus pour la vie à jamais
En nous abandonnant nous étions davantage
Ce minuit-là nous fûmes les enfants d’hier
Sortant de leur enfance en se tenant la main
Nous nous étions trouvés retrouvés reconnus
Et le matin bonjour dîmes-nous à la vie
A notre vie ancienne et future et commune
A tout ce que le temps nous infuse de force
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle
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07/01/2015
Le poème de la semaine
Rosemonde Gérard
merci à Marie-Elisabeth C
L’autre matin, sous la feuillée,De soleil rose ensoleillée,Je rêvais à toi, - tu passas!Et je vis à ta boutonnière,Penchant ses graines de lumière,Une branche de mimosas. "Oh! donne-la moi, je t’en prie,Cette petite fleur flétrie…"Murmurai-je. Et tu refusas!D’un œil foncé qui me regarde,Tu refusas. Tu dis: "Je gardeCette branche de mimosas." Et, sans voir qu’à cette secondeJe ne voulais plus qu’elle au monde,De mon tourment tu t’amusas:"Il y en a sur la pelouse…- Non, je veux, car je suis jalouse,Cette branche de mimosas! Si tu l’aimes, toute fanée,C’est qu’alors on te l’a donnée,En te taisant, tu t’accusas.Parle! nomme-moi ma rivale!Regarde-moi… je suis plus pâleQue la branche de mimosas!" Mais toi, d’une voix attendrie,Tu t’écrias: "O ma chérie,A mes regards tu proposasCent visages: des fous, des sages,D’autres plus fins que les feuillagesDe la branche de mimosas. Mais, très curieux de nature,Je rêvais de voir la figure- Car je ne la connaissais pas –Que vous faites, alors qu’on oseVous refuser la moindre chose…Tiens, les voilà, les mimosas!" Quelques traces de craie dans le ciel,Anthologie poétique francophone du XXe siècle
00:13 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |
17/12/2014
Le poème de la semaine
Maurice Fombeure
Sur la route couleur de sable,En capuchon noir et pointu,Le "moyen", le "bon", le "passable"Vont à galoches que veux-tuVers leur école intarissable. Ils ont dans leurs plumiers des gommesEt des hannetons du matin,Dans leurs poches du pain, des pommes,Des billes, ô précieux butinGagné sur d'autres petits hommes. Ils ont la ruse et la paresseMais l'innocence et la fraîcheurPrès d'eux les filles ont des tressesEt des yeux bleus couleur de fleur,Et des vraies fleurs pour leur maîtresse. Puis les voilà tous à s'asseoir.Dans l'école crépie de luneOn les enferme jusqu'au soir,Jusqu'à ce qu'il leur pousse plumePour s'envoler. Après, bonsoir! Quelques traces de craie dans le ciel,Anthologie poétique francophone du XXe siècle
00:21 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |
10/12/2014
Le poème de la semaine
Jacques Chessex
Je venais de le rêver C'était peut-être celui que j'appelle "le rêve de Purcell" Ce matin-là je ne savais plus rien de la lumière Ni de son harmonie d'avant Tout à coup survint l'oiseau des alarmes heureuses Et se posa à contre-jour "Oiseau, dis-je Que me veux-tu dans ta sérénité Moi qui hésite toujours entre deux maîtres" Je vis que l'oiseau riait "Sans doute as-tu raison de rire, dis-je Mais tu m'attristes, messager de l'aube En te moquant de ma candeur Ah détourne de moi le buisson de ta tête Regagne tes passerelles vers le vide" "Je ne serais qu'une métaphore à ton regarddit le sac de plumes Un mot entre les vivants et les morts?" Il s'envola aussitôtEt je demeurai tout le jourLes heures vides qui m'attendaientAvec le prophète persifleurLe messager à la face fleurie de feu blanc Quelques traces de craie dans le ciel,Anthologie poétique francophone du XXe siècle
00:02 Écrit par Claude Amstutz dans Jacques Chessex, Littérature francophone, Littérature suisse, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |
03/12/2014
Le poème de la semaine
Georges Perros
Les guerres n'est-ce pasÇa éclate ça mobiliseÇa fait quitter son foyerLes hommes trouvent normal D'aller à la guerreComme on va aux champignonsLes hommes ne sortiront jamaisDe cette ornièreLa guerre est un bail à renouvelerLa guerre est devenueLa condition de la paixLa révolte de la sérénité. Tant que les hommes sagesDiront ouiA la guerreOù on les envoieSans qu'ils sachent très bien pourquoiTant que les hommes ne diront pasNonA ce goût qu'ils ont de l'aventureQuand elle les rend plus amisQu'ils n'auraient jamais osé l'êtreDans la quotidiennetéTant qu'on tuera des hommesComme on tue des puces, des moustiques,En disant que c'est terrible, ces petites bêtesDe les tuer,Tant que la passion d'êtreAura partie liée avec le meurtreTant qu'il y aura des comédiensQui joueront avec talentCe qui fut vécuCe qui le seraMais ce qui ne l'est jamaisCe qui ne peut l'êtrePendant leur propre, leur pauvre existenceTant que nous aurons besoinDe nous dédoubler, de nous divertirD'apprendre avec émotionNostalgieCulpabilitéQue des hommes meurentPour des raisonsQui nous paraissent vraiesIncomparablesEt que nous en parleronsAvec émotionFrissons dans le dosUn whisky-soda s'il vous plaîtCe sera non. La guerre entre les hommesEst peut-être inévitableUn mauvais rêve du bon DieuTout le troupeau en uniformeOn y court tous comme des lapinsA la guerre. Nous avons fini par comprendreQue nous sommes tous colonisésQue l'homme est une colonieApte à la liberté d'êtreQui commencePar le partage du pain et du vinEt si personne ne fait ce painN'écrase ce raisinEh bien nous apprendrons à faireÀ écraser, à sulfater, à pétrirNous deviendrons des paysansCe que nous sommes tousMalgré la citadinetéQui nous enveloppecomme des saucissons, des momies. La terre n'en tournera pas moinsComme une folleAutour du fou par excellenceDe ce sanglant dégoulinantQui sait si bienNous foutre mal au crâneEt nous noircir la peauDe cet ivrogne dans l'azurQui fait mûrirQui fait pourrirQui dit le sec et le mouilléSur nos fronts partitions striésSans la moindre musique à l'intérieurRengaine où sanglote la sourceBarques sur le dosO nos révoltes grains de sablePoussière dans le vent fanéQui nous redira folle courseLa joie faroucheDes chevaux du langageQuand tout était encore tremblantD'avoir liberté de mourirQuand tout faisait encore semblantDe l'oublier dans un sourireLes temps sont venus de la mortDe qui portes-tu le deuil, Terre,Grosse de tant de cadavresQue leur innocence a trompésMais dont l'âme flotteEn nos rêvesNous ne pourrons jamais plus vivreA marcher sur vos jeunes osA piétiner votre colèreNous ne pourrons jamais plus rireComme il faudrait de bas en hautLa glotte folle,Avec cet ogre en nos poitrinesQui nous ronge nous fend la peauAllezCar nous serons bientôt ensembleDans la bohème du caniveauNous fuirons en faisant la plancheVers d'autres rêves d'autres feuxAutour desquels perdre nos rimesQui ne sont plus d'amourNi d'aiseIl est fondu, notre métalNous nous retrouverons bientôt. Quelques traces de craie dans le ciel,Anthologie poétique francophone du XXe siècle
00:14 Écrit par Claude Amstutz dans Georges Perros, Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |
26/11/2014
Le poème de la semaine
Jacques Prévert
Cet amour Si violent Si fragile Si tendre Si désespéré Cet amour Beau comme le jour Et mauvais comme le temps Quand le temps est mauvais Cet amour si vrai Cet amour si beau Si heureux Si joyeux Et si dérisoire Tremblant de peur comme un enfant dans le noirEt si sûr de lui Comme un homme tranquille au milieu de la nuitCet amour qui faisait peur aux autres Qui les faisait parler Qui les faisait blêmir Cet amour guetté Parce que nous le guettions Traqué blessé piétiné achevé nié oublié Parce que nous l'avons traqué blessé piétiné achevé nié oublié Cet amour tout entier Si vivant encore Et tout ensoleillé C'est le tien C'est le mien Celui qui a été Cette chose toujours nouvelle Et qui n'a pas changé Aussi vraie qu'une plante Aussi tremblante qu'un oiseau Aussi chaude aussi vivante que l'été Nous pouvons tous les deux Aller et revenir Nous pouvons oublier Et puis nous rendormir Nous réveiller souffrir vieillir Nous endormir encore Rêver à la mort Nous éveiller sourire et rire Et rajeunir Notre amour reste là Têtu comme une bourrique Vivant comme le désir Cruel comme la mémoire Bête comme les regrets Tendre comme le souvenir Froid comme le marbre Beau comme le jour Fragile comme un enfant Il nous regarde en souriant Et il nous parle sans rien dire Et moi j'écoute en tremblant Et je crie Je crie pour toi Je crie pour moi Je te supplie Pour toi pour moi et pour tous ceux qui s'aiment Et qui se sont aimés Oui je lui crie Pour toi pour moi et pour tous les autres Que je ne connais pas Reste là Là où tu es Là où tu étais autrefois Reste là Ne bouge pas Ne t'en va pas Nous qui sommes aimés Nous t'avons oublié Toi ne nous oublie pas Nous n'avions que toi sur la terre Ne nous laisse pas devenir froids Beaucoup plus loin toujours Et n'importe où Donne-nous signe de vie Beaucoup plus tard au coin d'un bois Dans la forêt de la mémoire Surgis soudain Tends-nous la main Et sauve-nous. Quelques traces de craie dans le ciel, Anthologie poétique francophone du XXe siècle
00:02 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |