25/09/2013
Ann Beattie
Bloc-Notes, 25 septembre / Curio - Cologny
Ann Beattie est à peu près inconnue chez nous, en Suisse ou en France. Pourtant, cette américaine née en 1947, a immédiatement attiré l'attention, au début des années 70, en publiant des nouvelles dans diverses revues, dont le prestigieux New Yorker. On l'a souvent comparée à Raymond Carver et son succès tient à sa manière personnelle d'appréhender une classe moyenne passive et déboussolée - celle de son époque - qui a perdu ses illusions, revenue de ses rêves d'un meilleur des mondes possible. A ce jour, une dizaine de recueils de nouvelles ont été édités aux Etats-Unis, ainsi que huit romans. En France, seul Promenades avec les hommes a été traduit l'année dernière, avant Nouvelles du New Yorker, que je vous recommande vivement de lire.
Chez Anne Beattie, s'il fallait déterminer un lien récurrent à tous ses textes, c'est celui d'êtres qui connaissent - ou survivent à - l'érosion de leur couple, sans nécessairement franchir le pas, appuyés au passé qui a souvent l'apparence d'un mensonge, en proie à un inconfort ainsi que l'explique Kate à son nouveau compagnon Howard, dans That's where you will find me: J'ai l'impression d'être un oiseau dont la cage a été recouverte d'un tissu pour la nuit. Je m'apitoie sur mon sort, puis je vois mon bras comme une aile brisée, tout paraît si triste soudain que mes yeux se remplissent de larmes.
A mon âge on n'a pas nécessairement envie de connaître très bien quelqu'un. On veut juste être... en arriver au point où on est compatible, dit la mère à sa fille Ann dans Au suivant, lui annonçant son prochain mariage. Ce mal-être se retrouve de même dans Les estivants, où Tom réfléchit sur son ex-femme, Jo, qui lui manque, mais que même si elle revenait à cet instant, quelque chose manquerait encore.
Le langage de Ann Beattie est très concret, voisin souvent de la peinture ou de la photographie . L'introspection y joue un rôle mineur, l'auteur se contentant de montrer les failles - et parfois les lueurs - de ce que son oeil perçoit, sans juger. Instantanés de vie baignés de mélancolie, de moments volés sans nécessaire conclusion, captés avec la précision d'une entomologiste pour dire la solitude profonde, l'isolement dans l'espace, les choses qui changent comme dans un puzzle et prennent une direction qui n'a pas été envisagée sous l'angle juste, les rencontres espérées, mais jamais concrétisées. Il en va ainsi de la narratrice de Entre secrets et surprises qui attend ses amis de toujours, Corinne et Lenny: Nos échanges sont souvent ternes, pourtant j'attends leurs visites avec impatience. Ils sont ma famille de substitution.
Ce désarroi est particulièrement sensible dans les personnages masculins, souvent irrésolus, faibles ou fuyant les discussions, se réfugiant dans l'alcool ou autres paradis artificiels. Emouvants, pourtant, à l'image de Drew qui va revoir son ancienne petite amie Charlotte dans Coney Island: Ils sont sortis ensemble pendant deux ans. Un monde les rapprochait. Comment les gens peuvent-ils échanger des propos futiles quand ils ont partagé un monde? Elle l'aimait réellement, et elle en a épousé un autre? Elle s'est lassée d'essayer de le convaincre qu'elle l'aimait?
La famille - avec ses oeillères et ses fractures entre générations - est un autre thème majeur de ces nouvelles, à l'image de Cynthia dans Rêves de loups, dont les parents prédisent qu'elle ne sera heureuse nulle part, et qui, paupières closes, voit une haute montagne dont elle découvre le sommet enneigé, glacial - haut, immaculé, pas un arbre - et frissonne de froid.
Parmi les seize nouvelles de ce recueil, il en est deux particulièrement réussies: La première, La maison de Marie, nous raconte l'histoire de Marie vue par son compagnon qui réalise ses erreurs, son égoïsme, ses rentrées tardives, ses pertes d'argent au jeu et peine à comprendre pourquoi leur couple vole en éclats: Je n'ai jamais quitté ma femme (...) La plupart du temps, nous nous efforçons d'être joyeux. Or, tandis que Marie prépare une réception - qui, croit-il va sceller leur réconciliation - et qu'il attend les invités, il voit Marie descendre l'escalier et lui lancer: Il n'y a pas de réception, dit-elle. Je souhaite que tu comprennes ce que c'est d'avoir préparé de la nourriture - même si ce n'est pas toi qui a préparé la cuisine - et d'attendre ensuite. D'attendre encore et encore. Peut-être qu'alors tu comprendras ce que c'est.
Quant à la seconde de ces nouvelles, Le terrier de lapin - une explication plausible, elle rassemble à elle seule, dans toute sa complexité, l'ensemble des thèmes chers à Ann Beattie: Une mère qui a des absences et perd un peu la tête, entre impuissance et rage; une fille - la narratrice - revenue dans ce village de Virginie pour s'occuper d'elle; un fils, Tim, sur le point de se remarier, en retrait sur cette grave situation familiale; et, en point de mire, une intégration en milieu hospitalier au long cours. Plus chaleureuse et compatissante qu'en d'autres textes, Ann Beattie y développe en contrepoint un humour doux-amer. Vic et moi avons pensé à nous marier, dit la narratrice, mais j'avais beaucoup de difficultés à m'occuper de ma mère, et je ne pouvais jamais lui accorder assez d'attention. Lorsque nous avons rompu, Vic a consacré tout son temps au chien de sa secrétaire, Banderas. Je pense que s'il a pleuré, c'était quand il allait au parc canin.
A cette douleur répond celle de la mère, confiant à sa fille: Peut-être que toutes ces années où nous avons été une famille t'ont paru être une longue fête de Halloween: nous étions costumés en enfants, et ensuite nos déguisements sont devenus trop petits pour nous, car nous avions atteint l'âge adulte. Une éclaircie toutefois, quand celle qui nous raconte cette histoire s'adresse à Vic: Pourquoi penses-tu que ça pourrait marcher? Nous n'avons jamais été bien assortis. J'ai plus de cinquante ans. Ce serait mon troisième mariage, et qu'il lui répond: Allons-y doucement, alors. Tu pourrais m'inviter à t'accompagner le soir de Thanksgiving.
Une succession de mises en perpective dans laquelle bon nombre de lecteurs, au-delà des années 70, sauront se reconnaître, au rythme des chansons qui accompagnent les récits de Ann Beattie: In my solitude et Gloomy Sunday de Billie Holiday ainsi que That's where you'll find me de Judy Garland.
Sur La scie rêveuse - dans Morceaux choisis - vous pouvez retrouver un extrait de l'une de ces épatantes nouvelles: Sur une colline du Vermont. Bien du plaisir à tous!
Ann Beattie, Nouvelles du New Yorker (Bourgois, 2013)
Ann Beattie, Promenades avec les hommes (Bourgois, 2012)
traduits par Anne Rabinovitch
19:30 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Littérature étrangère | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; nouvelles; livres | | Imprimer | Facebook |
La musique sur FB - 1239 C.Franck
César Franck
Ce qu'on entend sur la montagne - poème symphonique
Orchestre Symphonique de la RTBF
Brian Priestman
08:53 Écrit par Claude Amstutz dans La musique sur Facebook, Musique classique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique classique; facebook | | Imprimer | Facebook |
Le poème de la semaine
Jacques Prévert
Démons et merveillesVents et maréesAu loin déjà la mer s'est retiréeEt toiComme une algue doucement caressée par le ventDans les sables du lit tu remues en rêvantDémons et merveillesVents et maréesAu loin déjà la mer s'est retiréeMais dans tes yeux entr'ouvertsDeux petites vagues sont restéesDémons et merveillesVents et maréesDeux petites vagues pour me noyer.Quelques traces de craie dans le ciel,Anthologie poétique francophone du XXe siècle
00:33 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |
24/09/2013
Patricia MacDonald
Patricia MacDonald, Rapt de nuit (Albin Michel,2008)
Certains auteurs ont le don de jouer avec nos nerfs, y mettant un malin plaisir et beaucoup d’habileté, jusqu’au dénouement. C’est le cas le Patricia MacDonald. Dans ce roman, nous suivons Tess, témoin de l’enlèvement de sa sœur, que l’on retrouvera violée et assassinée. Sur la foi de son témoignage, un coupable est arrêté, puis exécuté. Seulement voilà : vingt ans plus tard, il s’avère que l’ADN n’appartient pas au meurtrier. L’enquête – au point mort – reprend, et Tess va s’acharner à retrouver le véritable tueur… Suspense garanti !
Egalement disponible en coll. Livre de poche (LGF, 2009)
09:23 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Littérature policière | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature: roman; livres | | Imprimer | Facebook |
23/09/2013
Musica présente - 72 Guiomar Novaes
Guiomar Novaes
pianiste brésilienne, 1896 - 1979
*
Frédéric Chopin
Etudes, Op 10
Etudes, Op 25
06:50 Écrit par Claude Amstutz dans Frédéric Chopin, Musica présente, Musique classique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique classique | | Imprimer | Facebook |
22/09/2013
Lire les classiques - Victor Hugo
Victor Hugo
Or, nous cueillions ensemble la pervenche. Je soupirais, je crois qu'elle rêvait. Ma joue à peine avait un blond duvet. Elle avait mis son jupon du dimanche; Je le baissais chaque fois qu'une branche Le relevait. Et nous cueillions ensemble la pervenche. Le diable est fin, mais nous sommes bien sots. Elle s'assit sous de charmants berceaux Près d'un ruisseau qui dans l'herbe s'épanche; Et vous chantiez dans votre gaîté franche, Petits oiseaux. Et nous cueillions ensemble la pervenche. Le paradis pourtant m'était échu.En ce moment, un bouc au pied fourchuPasse et me dit: Penche-toi. Je me penche.Anges du ciel! je vis sa gorge blancheSous son fichu! Et nous cueillions ensemble la pervenche. J'étais bien jeune et j'avais peur d'oser.Elle me dit: Viens donc te reposerSous mon ombrelle, et me donna du mancheUn petit coup, et je pris ma revanchePar un baiser. Et nous cueillions ensemble la pervenche.
Victor Hugo, Toute la vie d'un coeur / 1819, dans: Toute la lyre / Poésie, vol. 4 (coll. Bouquins/Laffont, 2002)
image: Janine Niepce, Le pont des Arts (janineniepce.com)
09:00 Écrit par Claude Amstutz dans Lire les classiques, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie; anthologie; livres | | Imprimer | Facebook |
21/09/2013
Morceaux choisis - Laurent Costantini
Laurent Costantini
Beyrouth, tu es pour moi la ville la plus mystérieuse du monde. Beyrouth, pardonne-moi, j'ai écrit que tu te donnes au premier venu, ce n'est pas vrai. Beyrouth, les étrangers ne te connaissent pas, ils ne font que passer, ce sont des amants de passage, même pas des amants puisqu'ils ne t'aiment pas. Ils me le disent. Comment osent-ils dire du mal de toi? Beyrouth, je ne répéterai pas ce qu'ils disent de toi. Non, Beyrouth, tu ne t'offres pas au premier venu, il faut marcher dix heures par jour dans tes rues comme je le fais pour mériter les surprises que tu dérobes aux yeux du visiteur trop pressé.
Beyrouth, quelquefois j'ai l'impression que tu es une ville fantôme, je marche dans tes rues et ce ne sont que maisons vides, fenêtres brisées et rideaux déchirés qui volent au vent.
Beyrouth, parfois je ne te comprends pas, tu laisses détruire tes vieilles maisons qui ont réussi à survivre à la guerre alors que tu as déjà tant perdu. Beyrouth, tu as tort de vendre ton âme au diable. Beyrouth, charmouta, tu fais ça pour de l'argent.
Beyrouth, j'aime entendre le chant des klaxons qui s'élève dans le ciel le matin comme le cri des oiseaux. Sa mélodie lointaine me rappelle que je suis dans une ville d'Orient.
Beyrouth, tu fumes trop et parfois je me demande comment tu fais pour tenir encore debout.
Beyrouth, lorsque je suis loin, la nuit, je rêve de toi.
Dans l'ombre de tes jardins où je pénètre en escaladant des murs démolis à moitié, je frissonne parfois devant le mystère du temps arrêté. Ici, la nature a commencé à reprendre ses droits et l'homme n'a pas encore fait valoir les siens.
Derrière les arbres immenses émerge en filigrane la façade oubliée d'une grande maison à triple arcade. Et si sa présence incertaine dans un monde qui l'a fuie depuis longtemps perdurait quelques années encore et continuait de nourrir mes rêves d'abandon et d'oubli...
Beyrouth au mois de mai on cueille les fleurs de gardénia qui embaument dans les jardins. Et tu en portes une à ton oreille. Beyrouth, tu es brune ce jour-là et je ne parviens pas à détacher mon regard de cette fleur blanche dans tes cheveux noirs. Beyrouth, approche-toi, je veux sentir la fleur, je veux t'embrasser.
Laurent Costantini, Beyrouth Beyrouth - récit poétique (Editions Z, 2013)
préface de Gilberte Favre
00:05 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie; voyages; morceaux choisis; livres | | Imprimer | Facebook |
20/09/2013
Lyonel Trouillot
Bloc-Notes, 20 septembre / Curio - Cologny
Parmi les quelques 555 nouveautés de la rentrée littéraire, ce roman de Lyonel Trouillot, Parabole du failli, est sans doute l'un des plus réussis. Des plus bouleversants aussi.
En introduction à son roman, l'auteur nous prévient: Le 12 novembre 1997, le comédien haïtien Karl Marcel Cassèus décédait à Paris dans des circonstances tragiques. Si on peut trouver des ressemblances entre lui et le personnage principal de ce livre, cette oeuvre de fiction ne raconte pas sa vie. Ni sa mort. Car Lyonel Trouillot veut nous raconter bien d'autres choses que le simple plongeon de Pedro - la figure centrale de son livre - qui s'est jeté d'un immeuble de douze étages, à l'étranger, loin de chez lui.
C'est, à la première lecture, l'histoire d'une amitié qui a soudé trois fêlés de la vie: Pedro, le poète et comédien, venu d'une famille aisée rejoindre ses compagnons moins bien lotis que lui dans le quartier pourri de Saint-Antoine - il dit préférer la musique des rues aux vestibules des palais des rois -, seul avec ses manques au bout du compte, alors qu'il rêvait de changer le monde, les yeux plein de pays et funambule des mots - ceux des autres: Baudelaire, Musset, Hikmet, Aragon, Ferré, Trenet ou encore Charles Dumont -, trop libre pour être heureux, le coeur trop grand pour des amours qui l'ont rendu triste; l'Estropié - surnommé ainsi parce que boiteux à la suite des mauvais traitements de son père, le Méchant - qui par ses prédispositions a pu fuir la misère et devenir enseignant; le narrateur enfin, héritier d'un deux-pièces partagé avec ses amis, à la mort de ses parents fauchés par un camion, et à qui, modeste rédacteur nécrologique dans un journal, est confiée la tâche de rédiger un papier sur le défunt Pedro.
Il faut ajouter à ce trio Madame Armand, prêteuse sur gages, aujourd'hui impitoyable en affaires, n'aimant plus les gens - elle avait adoré les contes de fées avant d'étrangler son Armand, dit-on, un minable au cadavre jamais retrouvé - dont le seul plaisir est de jouer aux cartes avec sa femme de ménage, et parfois avec Pedro qui lui rend visite - avec ou sans ses amis - et lui confiant ses écrits personnels, Parabole du failli, dont la restitution au narrateur constitue un des passages les plus émouvants du livre: Il fallait chercher pour la voir, traverser le mur du visage, repérer les yeux perdus, enfoncés, trop petits pour cette grosse tête de masque de carnaval à effrayer les enfants les plus téméraires, aller jusqu'au fond, sous le blanc, dans un coin, pour y reconnaître un petit point d'argent. Une presque larme qui n'osait pas couler, avait honte de sa fragilité, immobile, suspendue, incapable de bouger ni de disparaître.
Chacun des personnages de ce roman, a connu son poids d'irrémédiables blessures, de rêves, de rencontres chaleureuses, de désillusions, incarnant tour à tour un des visages de Port-au-Prince, tableau de grands coeurs aux petits destins, de la grisaille et de la pauvreté, mais aussi chant d'amour envers cette terre, pour ses odeurs et couleurs après la pluie.
De belles images jalonnent ce livre, telles: Tu disais qu'il faut parler aux hommes comme dans le dos du vent, en retard de vitesse, ou Un homme qui tombe de si haut est une défaite sans visage. Un récit épique qui ressemble à un fleuve généreux, servi par un style poétique, flamboyant, où se mêlent le drame, l'innocence et l'ironie.
Avec Parabole du failli, Lyonel Trouillot signe un chef-d'oeuvre, à la fois intimiste et engagé: hommage à un pays, ainsi qu'aux poètes du monde entier, qui adoucissent les brûlures, atténuent les différences et rapprochent les êtres les uns des autres.
A Pedro, le mot de la fin, avec ce titre, Prophétie: Hommes de malfaisance et de mauvais augures, hommes de lassitude et de désespérance, regardez! Apprenez comme moi à suivre son passage à la distance de son choix. Et, ouverts à l'amour, le regard clair enfin, vous lirez dans ses yeux vos devoirs de merveilles, vous suivrez dans ses mains lignes de chances pour nous tous. Et revenus de vos faiblesses et anciennes frayeurs, vous direz: pardon à toute vie, nous nous étions trompés, nous avons mal aimé.
Sur La scie rêveuse ont été présentés deux extraits de ce texte, dans Morceaux choisis et La citation du jour.
Lyonel Trouillot, né en 1956 à Port-au-Prince, est l'auteur - parmi d'autres ouvrages: une vingtaine! - de Les fous de Saint-Antoine (Deschamps, 1989), Rue des pas perdus (Actes Sud, 1998), L'amour avant que j'oublie (Actes Sud, 2007), Eloge de la contemplation (Riveneuve, 2009), Vanvalou pour Charlie (Actes Sud, 2009),La belle amour humaine (Actes Sud, 2011) et Le doux parfum des temps à venir (Actes Sud, 2013).
Lyonel Trouillot, Parabole du failli (Actes Sud, 2013)
01:05 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; roman; livres | | Imprimer | Facebook |
19/09/2013
Morceaux choisis - Guillaume Apollinaire
Guillaume Apollinaire
L’amour est mort entre tes brasTe souviens-tu de sa rencontreIl est mort tu la referasIl s’en revient à ta rencontre Encore un printemps de passéJe songe à ce qu’il eut de tendreAdieu saison qui finissezVous nous reviendrez aussi tendre Dans le crépuscule fanéOù plusieurs amours se bousculentTon souvenir gît enchaînéLoin de nos ombres qui reculent O mains qu’enchaîne la mémoireEt brûlantes comme un bûcherOù le dernier des phénix noirePerfection vient se jucher La chaîne s’use maille à mailleTon souvenir riant de nousS’enfuir l’entends-tu qui nous railleEt je retombe à tes genoux Tu n’as pas surpris mon secretDéjà le cortège s’avanceMais il nous reste le regretDe n’être pas de connivence La rose flotte au fil de l’eauLes masques ont passé par bandesIl tremble en moi comme un grelotCe lourd secret que tu quémandes Le soir tombe et dans le jardinElles racontent des histoiresÀ la nuit qui non sans dédainRépand leurs chevelures noires Petits enfants petits enfantsVos ailes se sont envoléesMais rose toi qui te défendsPerds tes odeurs inégalées Car voici l’heure du larcinDe plumes de fleurs et de tressesCueillez le jet d’eau du bassinDont les roses sont les maîtresses Tu descendais dans l’eau si claireJe me noyais dans ton regardLe soldat passe elle se pencheSe détourne et casse une branche Tu flottes sur l’onde nocturneLa flamme est mon cœur renverséCouleur de l’écaille du peigneQue reflète l’eau qui te baigne O ma jeunesse abandonnéeComme une guirlande fanéeVoici que s’en vient la saisonEt des dédains et du soupçon Le paysage est fait de toilesIl coule un faux fleuve de sangEt sous l’arbre fleuri d’étoilesUn clown est l’unique passant Un froid rayon poudroie et joueSur les décors et sur ta joueUn coup de revolver un criDans l’ombre un portrait a souri La vitre du cadre est briséeUn air qu’on ne peut définirHésite entre son et penséeEntre avenir et souvenir O ma jeunesse abandonnéeComme une guirlande fanéeVoici que s’en vient la saisonDes regrets et de la raisonGuillaume Apollinaire, Vitam impendere amori, dans: Poèmes à Lou, précédé de: Il y a (coll. Poésie/Gallimard, 2007)
image: Louise de Coligny-Châtillon, dite Lou (angelomainardi.it)
16:50 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie; anthologie; livres | | Imprimer | Facebook |
Katherine Pancol
Katherine Pancol, Un homme à distance (Albin Michel, 2002)
Ceci est l'histoire de Kay Bartholdi. Un jour, Kay est entrée dans mon restaurant. Elle a posé une grosse liasse de lettres sur la table. Elle m'a dit : Tu en fais ce que tu veux, je ne veux plus les garder. Ainsi commence ce roman par lettres comme on en écrivait au XVIIIe siècle. Il raconte la liaison épistolaire de Kay Bartholdi, libraire à Fécamp, et d'un inconnu qui lui écrit pour commander des livres. Au fil des lettres, le ton devient moins officiel, plus inquisiteur, plus tendre aussi. Kay et Jonathan parlent de leurs lectures, certes, mais entament un vrai dialogue amoureux. Ils se font des scènes, ils se font des confidences, ils se tendent des pièges, s'engagent dans une relation que Kay, hantée par le souvenir d'une déchirure ancienne, s'efforce de repousser. Mais qui pourrait prédire vers quelle révélation l'emmène ce nouveau lien noué à travers des livres dont chacun des correspondants se sert comme de masques pour cacher ses vrais sentiments ?
Correspondance attachante entre une libraire et un mystérieux client qui l’entraîne dans un rapport plus personnel, non exempt de danger, qui la confronte à des réminiscences douloureuses. Kay est un très émouvant portrait de femme, fragile et volontaire à la fois. De plus, ce récit est un hommage au pouvoir émotionnel des livres.
également disponible en coll. de poche (Livre de poche, 2004)
00:16 Écrit par Claude Amstutz dans Katherine Pancol, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | | Imprimer | Facebook |