19/09/2013
Morceaux choisis - Guillaume Apollinaire
Guillaume Apollinaire
L’amour est mort entre tes brasTe souviens-tu de sa rencontreIl est mort tu la referasIl s’en revient à ta rencontre Encore un printemps de passéJe songe à ce qu’il eut de tendreAdieu saison qui finissezVous nous reviendrez aussi tendre Dans le crépuscule fanéOù plusieurs amours se bousculentTon souvenir gît enchaînéLoin de nos ombres qui reculent O mains qu’enchaîne la mémoireEt brûlantes comme un bûcherOù le dernier des phénix noirePerfection vient se jucher La chaîne s’use maille à mailleTon souvenir riant de nousS’enfuir l’entends-tu qui nous railleEt je retombe à tes genoux Tu n’as pas surpris mon secretDéjà le cortège s’avanceMais il nous reste le regretDe n’être pas de connivence La rose flotte au fil de l’eauLes masques ont passé par bandesIl tremble en moi comme un grelotCe lourd secret que tu quémandes Le soir tombe et dans le jardinElles racontent des histoiresÀ la nuit qui non sans dédainRépand leurs chevelures noires Petits enfants petits enfantsVos ailes se sont envoléesMais rose toi qui te défendsPerds tes odeurs inégalées Car voici l’heure du larcinDe plumes de fleurs et de tressesCueillez le jet d’eau du bassinDont les roses sont les maîtresses Tu descendais dans l’eau si claireJe me noyais dans ton regardLe soldat passe elle se pencheSe détourne et casse une branche Tu flottes sur l’onde nocturneLa flamme est mon cœur renverséCouleur de l’écaille du peigneQue reflète l’eau qui te baigne O ma jeunesse abandonnéeComme une guirlande fanéeVoici que s’en vient la saisonEt des dédains et du soupçon Le paysage est fait de toilesIl coule un faux fleuve de sangEt sous l’arbre fleuri d’étoilesUn clown est l’unique passant Un froid rayon poudroie et joueSur les décors et sur ta joueUn coup de revolver un criDans l’ombre un portrait a souri La vitre du cadre est briséeUn air qu’on ne peut définirHésite entre son et penséeEntre avenir et souvenir O ma jeunesse abandonnéeComme une guirlande fanéeVoici que s’en vient la saisonDes regrets et de la raisonGuillaume Apollinaire, Vitam impendere amori, dans: Poèmes à Lou, précédé de: Il y a (coll. Poésie/Gallimard, 2007)
image: Louise de Coligny-Châtillon, dite Lou (angelomainardi.it)
16:50 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie; anthologie; livres | | Imprimer | Facebook |
Commentaires
Redécouvrir Apollinaire,, ses poèmes, sa vie , c'est un peu retourner aux études. Mais c'est une découverte tellement enrichissante, au constat qu'une belle poésie, avec le temps parait encore plus belle ! Merci à vous Claude pour ce poème qui illustre très bien la qualité magnifique des poèmes de cet auteur! Justement je relis quelques uns de ces poèmes ...Encore Merci
Écrit par : Josette Attuel | 19/09/2013
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