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09/05/2014

Morceaux choisis - John Donne

John Donne

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Je ne sais trop, ma foi, ce que nous pouvions faire
Avant de nous aimer: n'étions-nous donc sevrés?
Nous paissions-nous, enfants, de plaisirs terre à terre?
Ou chez les Sept Dormants étions-nous à ronfler?
Certes: ce plaisir seul ne fut imaginé,
Et si jamais je vis et désirai beauté
Et la pris, c'est alors que de toi je rêvai.
 
Et maintenant, bonjour, nos âmes qui s'éveillent,
Et qui de crainte encor ne s'osent regarder:
Car Amour tient l'amour de toute autre merveille
Et fait d'une chambrette un univers entier.
Qu'aillent navigateurs vers des mondes nouveaux,
Que cartes fassent voir des mondes tant et trop:
Soyons monde chacun, nul autre ne nous faut.
 
Nos visages l'un et l'autre en nos yeux se reflètent,
Sur nos visages sont nos coeurs simples et francs;
Où mieux qu'ici trouver mappemonde parfaite
Sans l'âpreté du Nord, le déclin du Couchant?
Ce qui meurt est le fruit d'un mélange mal fait:
N'ayant qu'un seul amour, ou si bien partagé
Que nul ne peut faiblir, nous ne mourrons jamais.
 

John Donne, Le bonjour, dans: Poèmes - édition bilingue (coll. Poésie/Gallimard, 1991)

traduit de l'anglais par Jean Fuzier et Yves Denis

image: Elisabeth Vigée Le Brun, Autoportrait (passionlectures.wordpress.com)

00:03 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie; anthologie; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

05/05/2014

La citation du jour

Virginia Woolf 

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Le soleil est très chaud. Je vois la rivière. Je vois des arbres mouchetés et roussis par la lumière de l’automne. Des bateaux passent, traversent le rouge, traversent le vert. Au loin une cloche sonne, mais ce n’est pas pour la mort. Il y a des cloches qui sonnent pour la vie. Une feuille tombe, de joie. Oh, je suis amoureux de la vie.

Virginia Woolf, Les vagues (coll. Livre de poche/LGF, 2004)

image: http://us.123rf.com

05:28 Écrit par Claude Amstutz dans La citation du jour, Littérature étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; essai; morceaux choisis; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

28/04/2014

Benjamin Black

51IPaX3h-LL._SL500_AA300_.jpgBenjamin Black, Les disparus de Dublin (coll. 10/18, 2011)

Voici un roman policier vraiment sensationnel, écrit par un certain Benjamin Black, pseudonyme de John Banville, auteur de La mer chez Robert Laffont. Comme dans une certaine tradition britannique, l'intrigue sert à révéler une réalité sociale. Ici, un trafic d'orphelins, orchestré par qui? Je n'en dirai rien, ce serait vraiment dommage! Sachez toutefois que l'Eglise catholique y joue un rôle plutôt inquiétant et que le personnage de Quirke, médecin légiste, veuf, secrètement amoureux de sa belle-soeur depuis toujours, porté sur la bouteille et nouveau venu sur la scène du crime - en traduction française - est particulièrement réussi, attachant, humain, autant qu'un certain Thomas Lynley créé par Elizabeth George, ce qui ne constitue pas le plus banal des compliments. Un style éblouissant, des caractères originaux, des liens familiaux complexes, une histoire qui, de Dublin à Boston, ne  fléchit à aucun moment, voilà qui suffit à notre bonheur...

Chez le même éditeur, vous pouvez lire de cet auteur La double vie de Laura Swan (2012) et La disparition d'April Latimer (2014). Son dernier roman, Mort en été, a paru aux éditions Nil (2014).

 

07:41 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Littérature policière | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; policier; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

27/04/2014

La citation du jour

Giacomo Leopardi 

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De même que le mépris blesse et irrite bien plus que la haine, de même l'estime est plus douce que la bienveillance; et en général les hommes se soucient beaucoup plus d'être estimés que d'être aimés, c'est même leur souhait le plus cher. 

Giacomo Leopardi, Pensées (Allia, 2002)

11:53 Écrit par Claude Amstutz dans La citation du jour, Littérature étrangère, Littérature italienne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : citation; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

24/04/2014

Carson McCullers

9782234060166.gifCarson McCullers, Le coeur est un chasseur solitaire, suivi de: Ecrivains, écriture et autres propos (Stock, 2007)

 

Une petite ville poussiéreuse du sud des Etats-Unis, dans les années trente - et dont Carson McCullers recrée, avec un génie singulier, l'atmosphère de chaleur moite et d'ennui profond - sert de décor à ce roman baigné dans l'angoisse, la violence et la tendresse. Autour de John Singer, le mystérieux sourd-muet, ami dévoué jusqu'à l'obsession d'un Grec obèse et attardé dont il ne supporte pas d'être séparé, gravitent quatre personnages, compagnons improbables, enfermés dans une commune solitude dont ils cherchent désespérément à s'échapper : Mick l'adolescente éprise de musique, Jake le révolutionnaire militant incompris, Copeland le vieux médecin noir aux ambitions déçues, et Biff le cafetier maniaque. Mais la vie ne renonce que rarement à sa cruauté ordinaire...

 

Récit magistral sur la différence - un sourd-muet et un attardé – et, quelque part, réponse apaisante à la solitude et aux angoisses pour leur entourage, ce grand classique moderne illustre aussi, face au monde qui nous entoure, l’inégalité des armes dont disposent les plus faibles pour survivre à la violence, à l'égoïsme ou à l’indifférence des autres.

 

Cette édition comprend également l'esquisse de ce grand roman ainsi que l'ensemble des essais et des articles que Carson McCullers a publiés de son vivant. Ces textes précisent les références de ce prodige de la littérature américaine tout en mettant en valeur sa sensibilité et son engagement.

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19/04/2014

Jay McInerney

9782879295336.gifJay McInerney, La belle vie (Editions de l'Olivier, 2007) 

 

Deux couples, incarnant la réussite américaine, voient leur vie voler en éclat – avec en toile de fond la tragédie du 11 septembre – en proie au poids des habitudes, à l’érosion des sentiments, au conflit des valeurs. Rarement traité en littérature, le thème du traumatisme collectif avec ses doutes, son poids de responsabilité et son chaos qui imprègnent ou envahissent l’individu, est traité magistralement. Une peinture lucide, humaine, un brin mélancolique de la société actuelle.

 

également disponible en coll. Points (Seuil, 2008)

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18/04/2014

La citation du jour

Graham Greene

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Les saints ont employé le langage de l'amour humain pour décrire leur vision de Dieu; de même, je suppose, pourrions-nous faire usage des mots prière, méditation, contemplation, pour traduire l'intensité de l'amour que nous ressentons pour une femme. Nous aussi, nous renonçons à la mémoire, à l'intelligence et à la science, et nous aussi nous subissons l'épreuve du dépouillement, de la noche sombre, avec parfois, en manière de récompense, une sorte de paix.

Graham Greene, La fin d'une liaison (coll. 10-18/UGE, 2000)

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13/04/2014

Fabio Geda

littérature; récit; livresFabio Geda, Dans la mer il y a des crocodiles - l'histoire vraie d'Enaiatollah Akbari (coll. Piccolo/Liana Levi, 2012)

Enaiatollah Akbari, âgé de dix ans à peine, est né dans la province de Ghazni, au sud-est de l'Afghanistan. Il est hazara, une ethnie méprisée et souvent réduite à l'esclavage tant par les talibans que les patchounes. Son père est mort. Sa famille - comme bien d'autres - connaît l'oppression, la sueur et les larmes, mais surtout la peur face à la violence et aux menaces qui les entourent. Un jour - la plus terrible des preuves d'amour - sa mère, fuyant leur maison de Nava, l'abandonne à Quetta, un village pakistanais non loin de la frontière afghane, avec trois commandements pour tout bagage: Ne pas prendre de drogues, ne pas utiliser d'armes, ne pas voler.

Commence alors pour Enaiatollah Akbari un périple de cinq ans, le conduisant du Pakistan à l'Italie, en passant par l'Iran, la Turquie, la Grèce. Un voyage long, dangereux, à haut risque. Il apprend à se débrouiller pour survivre et même s'il côtoie l'horreur ou la misère, son regard toujours tourné vers l'avenir reste sensible à la beauté des sentiments - qui lui sera marquée à certaines heures en raison de sa bonne éducation, de sa politesse, de son habileté - traduite par un sourire de gratitude qui ne le quitte jamais.  

Ce livre est le récit de son incroyable aventure, transcrite par Fabio Geda avec un souci de coller au plus près de sa vérité, non sans nous partager une oeuvre littéraire à part entière. Si son odyssée racontée avec naturel et simplicité nous touche tant, c'est qu'elle transpire de l'empathie de son auteur, lui-même éducateur depuis une dizaine d'années auprès de mineurs immigrés à Turin et qui ne nourrit d'autre souci que de décliner une histoire dont il ne se veut que le témoin. Mais au-delà de ces fragments de vie que nous expose Enaiatollah Akbari, ce livre nous sensibilise aux réalités de l'immigration - le trafic des êtres humains, les coups qui pèsent sur les clandestins, la fuite par nécessité - dont Dans la mer il y a des crocodiles montre avec une douce ironie qu'elle n'est ni noire, ni blanche.

Aujourd'hui, notre jeune rescapé a 22 ans, un permis de séjour depuis 2007, étudie, profite enfin d'une vie bien à lui, a des amis et parle l'italien comme un turinois! Dans le dernier chapitre du livre - l'un des plus émouvants que je vous laisse découvrir - vous verrez qu'il renoue avec les siens. Il rêve de repartir en Afghanistan pour s'y rendre utile ou devenir - en Italie - le porte-parole de sa communauté, nous dit Fabio Geda. Une belle leçon de vie qui n'occulte malheureusement pas l'aventure d'autres enfants semblables à lui qui ont fait le voyage avec la même détermination, mais qui n'ont survécu à l'enfer. Ce livre est aussi la trace de leur histoire, transparente, invisible, engloutie dans le ventre des baleines ou des crocodiles... 

Du même auteur ont paru trois autres livres: Pendant le reste du voyage, j'ai tiré sur les indiens (coll. Piccolo/Liana Levi, 2011), La séquence des gestes (Gaïa, 2011) et Le dernier été du siècle (Albin Michel, 2014).

12/04/2014

La citation du jour

Fernando Pessoa

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J'entends passer le vent, et je trouve que rien que pour entendre passer le vent, il vaut la peine d'être né. 

Fernando Pessoa, Le gardeur de troupeaux - suivi de: Poésies d'Alvaro de Campos (coll. Poésie/Gallimard, 1987)

image: laplumediroise.superforum.fr.over-blog.com

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07/04/2014

Morceaux choisis - Susan Sontag

Susan Sontag

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Installés devant nos petits écrans - de télévision, d'ordinateur, de téléphone portable - nous avons la possibilité de surfer d'une image à l'autre et d'accéder aux comptes rendus sommaires des désastres infligés au monde. On a l'impression que le nombre de ces nouvelles est plus important que dans le passé. C'est sans doute une illusion. La différence, c'est que les nouvelles se diffusent partout. Et que certaines souffrances présentent en elles-mêmes beaucoup plus d'intérêt pour le public (étant donné qu'il faut admettre l'existence d'un public pour la souffrance) que d'autres. Que l'actualité relative à la guerre fasse aujourd'hui l'objet d'une diffusion mondiale ne signifie pas que la capacité à réfléchir aux souffrances des gens éloignés ait augmenté dans des proportions significatives. Dans la vie moderne - une vie dispensant une surabondance de choses auxquelles nous sommes invités à prêter attention -, il paraît normal que nous nous détournions des images qui nous indisposent. Un nombre encore plus grand de spectateurs changeraient de chaîne si les médias consacraient plus de temps aux détails de la souffrance humaine induite par la guerre et les autres infamies. Mais il n'est sans doute pas vrai que les gens réagissent moins.

Que nous ne soyons pas totalement transformés, que nous puissions nous détourner, tourner la page, changer de chaîne, ne porte pas atteinte à la valeur éthique de l'assaut produit par les images. Il n'y a nulle déficience dans le fait de n'être pas marqué au fer rouge, de ne pas souffrir assez, lorsqu'on voit ces images. Et la photographie n'est pas censée remédier à notre ignorance quant à l'histoire et aux causes de la souffrance qu'elle choisit de cadrer. Ces images ne peuvent guère faire plus que nous inviter à prêter attention, à réfléchir, à apprendre, à examiner les rationalisations par lesquelles les pouvoirs établis justifient la souffrance massive. A qui doit-on ce que l'image montre? Qui est responsable? Est-ce excusable? Est-ce inévitable? Y a-t-il un état des choses que nous avons accepté jusqu'à présent et qu'il faille désormais contester? Tout cela assorti de la conscience que l'indignation morale, pas plus que la compassion, ne peut nous dicter une manière d'agir.

La frustration que l'on éprouve de ne rien pouvoir faire à ce que les images montrent peut se traduire en une accusation contre l'indécence qu'il y a à regarder ces images, ou l'indécence des procédés employés pour les diffuser - qui les font volontiers voisiner avec des publicités pour crèmes hydratantes, antalgiques ou monospaces. Si nous pouvions faire quelque chose face à ce que les images montrent, nous ne nous sentirions peut-être pas aussi concernés par ces questions.

Susan Sontag, Devant la douleur des autres (Bourgois, 2013)

traduit de l'anglais par Fabienne Durand-Bogaert

09:19 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; essai; morceaux choisis; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |