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12/07/2013

Bel Paese 1b

Morceaux choisis - Giancarlo De Cataldo

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Lettre de Giuseppe Mazzini à Elena Sacchi, le jour de son vingtième anniversaire.

29 septembre 1854.

La vague de la mer est salée et amère: la lèvre refuse de s'y désaltérer. Mais quand le vent souffle sur elle et la soulève très haut dans l'atmosphère, elle retombe douce et fécondante. Et la vie est comme la vague: elle se dépouille de l'amertume qui l'envahit, en s'élevant. Ne demande pas le bonheur à la vie: tu pécherais, et inutilement, par égoïsme. Ne désespère pas de la vie: le désespoir es l'athéisme de l'âme. La vie est un devoir. Souvent, pour qui le remplit avec une sérénité résignée, Dieu envoie, dans les affections, un rayon de bonheur, il envoie son rayon à travers les nuages ou diffracte sa lumière, après la tempête, en arc-en-ciel. Et là où même le rayon ne descendrait pas pour rendre joyeuse ta vie, conserve, oh jeune fille, ta foi: l'espérance est sa compagne insurpassable, et l'espérance est le fruit en graine. Comme la fleur a ses racines souterraines et se fait beauté et parfum en passant dans un autre élément, les aspirations, les saints concepts de ta vie, sont des promesses de bonheur et se développeront en fleurs de vérité à d'autres stades de ton être, dont celui-ci est une étape et une préparation.

Giancarlo De Cataldo, L'anti-Italien / extrait, dans Bel Paese - Introduction, sélection et traduction de Serge Quadruppani (Métailié, 2013)

à propos de Elena Sacchi-Casati: http://www.veronainblog.it/wp/2011/03/21/verso-la-primavera-profili-le-donne-del-risorgimento-elena-casati

image: Giuseppe Mazzini (totalita.it)

Bel Paese 1a

Bloc-Notes, 12 juillet / Curio - Cologny

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Si vous ne voulez pas égratiner vos plus beaux souvenirs de l'Italie - du Pont des soupirs à Venise à la Via Veneto de Rome, bercé par le chant populaire O Sole Mio ou la musique du film Le Parrain signée Nino Rota - peut-être que ce livre, Bel Paese, qui présente treize auteurs italiens actuels, n'est pas pour vous, car cette anthologie se veut être l'expression d'une génération contestataire, comme le souligne très bien Serge Quadruppani dans son introduction: Tous nous permettent de vérifier qu'en temps de catastrophe, sous des régimes où la culture officielle est entièrement soumise aux forces de l'argent ou prise dans le carcan d'une idéologie, la création en général et la littérature en particulier peuvent incarner une des formes d'opposition réelle et porteuse d'avenir. Des livres peuvent aujourd'hui encore contribuer à résister aux agressions de la vieille société et peut-être contribuer à la changer. Cette Italie-là est bien l'avenir qu'on peut souhaiter au monde.

Tour à tour drôle ou tragique, empruntant la voie de la nouvelle, du conte ou du document, l'ensemble de ces textes est à même de délivrer un message aux italiens, mais aussi aux touristes et aux fervents de littérature. Reflet de la déstabilisation de l'individu dans un ordre du monde qui change, Des gens perdus de Gioacchino Criaco exprime au mieux ce malaise de la société, par la voix de Ciccio Tucci, rattaché au ROS, le service des opérations spéciales: Jusqu'à il y a quelques années, je t'aurais dit que nous avions fait le bon choix. Que nous avons été du bon côté de la barricade. Aujourd'hui, je regarde autour de nous et je ne distingue plus le bien du mal. Malgré nos sacrifices, d'ici peu, nous serons considérés comme de sales canailles. Le monde a pris un tour bizarre ces derniers temps. On nous a donné cet Etat et nous, nous l'avons conservé, s'ils en avaient construit un meilleur, nous l'aurions fait plus volontiers, en nous évitant peut-être le dégoût.

Francesco De Filippo, pour sa part - auteur d'un roman âpre et dur, L'offense - sur fond de misère sociale, d'exploitation des immigrés et de mafias, nous raconte avec Ordures, le scandale des déchets à Pianura, un quartier de Naples. Le monologue grinçant de Totore, un marin qui répond à un journaliste de la RAI, se joue délibérément des clichés attribués aux italiens pour mieux asséner ses quatre vérités, contre ceux qui ont débarqué, ne se contentaient pas de prendre les maisons, les commerces et la terre, mais voulaient tout. Parce que les ordures, c'est une richesse! Cette nouvelle particulièrement réussie, ressemble à un documentaire décrivant méticuleusement les mécanismes du pouvoir, et donne la parole aux victimes anonymes, broyées dans un système offrant peu de perspectives d'espoir: On s'en est même pas aperçus, et on est devenus africains, on a glissé vers le Sud, alors qu'on pensait être immobiles. Y'a rien d'autre à gagner de cette vie: nous sommes Gaza et nous sommes Kochogoro. On meurt comme les thons, enfermés dans la dernière cage, l'air nous manque. Aidez-nous, aidez les gens de bien, passqu'ici, on vit plus...

Cette anthologie fait aussi la part belle à la légèreté, avec un conte de Michele Serio, Noël Trans, où la créature d'un artisan, Geppino Capece, construite avec un tas de terreau trouvé juste à côté de l'entrée de la chapelle de San Severo - et qu'il affuble du nom de Gros Nez - prend vie. Très beau, à la fois homme et femme, il interpelle sans distinction les passants, hommes, femmes, vieux, gamins: Tu veux faire l'amour avec moi? Et voilà qu'il devient rapidement l'amour de tous... Sauf que soudain, de nombreux habitants de cette ville des Pouilles déambulent voilés, en raison d'une brusque proéminence nasale! Une sympathique allégorie sur la beauté, la différence, l'hypocrisie et la vérité.

Enfin, dans ce recueil, vous trouverez quelques textes purement documentaires, tels celui de Giancarlo De Cataldo, L'anti-Italien, consacré à Giuseppe Mazzini, révolutionnaire et patriote, fervent républicain et combattant pour la réalisation de l'unité italienne. Quant à Andrea Camilleri, avec Qu'est-ce qu'un italien?, il s'interroge sur le fascisme et dresse un portrait peu flatteur de l'italien, ayant davantage le sens de l'historiette que celui de l'histoire, plus ignorant aujourd'hui que par le passé, soucieux de choisir soigneusement - en politique, par exemple - sur quel char triomphal sauter à la dernière minute en fonction de de ce qui lui revient en poche. Un peu excessif, tout de même... En revanche, il insiste à juste titre sur un aspect essentiel de la conscience italienne: La méfiance envers la Justice est totale, fondée sur la conviction répandue qu'elle est un instrument des riches.

Le dernier mot revient à Momodou, le héros malheureux de Wu Ming, victime d'une bavure policière: Il se plaignait: le froid, la brume, les journées toutes pareilles. Et la solitude, surtout ça. J'ai pas beaucoup d'occasions de parler avec quelqu'un, disait-il. Le soir, je suis épuisé. Une fois, je suis rentré tard, et j'ai dû rentrer à pied, je suis arrivé en pleine nuit et, à six heures, j'étais déjà à l'usine. Demander qu'on m'emmène, inutile d'essayer: si t'es noir, la seule voiture qui s'arrête, elle a un gyrophare sur le toit. Quelquefois, je vais dans les pubs au village, je bois une orangeade ou un jus de fruits assis au comptoir, mais personne ne m'adresse la parole...

Un pays somme toute semblable au nôtre, et pourtant unique au monde!  

Bel Paese - Introduction, sélection et traduction de Serge Quadruppani (Métailié, 2013)

images: Gioacchino Criaco, Giancarlo De Cataldo, Francesco De Filippo, Michele Serio, Andrea Camilleri

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10/07/2013

Luigi Carletti

Bloc-Notes, 10 juillet / Curio - Cologny

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En Italie - contrairement à la France - le calcio est à bien des égards une radiographie de la société contemporaine, comme le démontre avec beaucoup d'habileté et d'originalité Luigi Carletti avec Six femmes au foot. Toute l'action de ce roman se déroule en une journée, au stade Giuseppe-Meazza - ou San Siro, si vous préférez - lors du derby opposant l'Inter Milan au Milan AC, avec à la clef un possible titre de champion d'Italie à l'issue de la partie. Tout autour de l'arène, la foule aspire au combat et invoque ses héros: Kakà et Materazzi, Balotelli et Seedorf. Si elle le pouvait elle déboulerait des gradins pour les étreindre, les embrasser et s'imprégner de leur sueur. Dans deux heures tout sera terminé. Mais maintenant, des hommes se dressent contre d'autres hommes. Des hommes aux visages transfigurés, prêts à sacrifier toute idée de dignité. Et puis des femmes. Nombreuses. La plupart ne font qu'escorter leurs compagnons, par devoir dominical. D'autres sont ici en habituées, par passion. Mais certaines d'entre elles ne sont pas venues pour voir le match.

Six femmes que tout sépare vont être ainsi, malgré elles, les marionnettes d'un destin qui, le temps d'une fête sportive, les conduira à se rencontrer: pour le meilleur ou pour le pire? Il y a Letizia qui cache un Beretta sous la veste de son tailleur et un Glock 26 à sa cheville droite; Guendalina, belle comme une sainte ou une madone avec ses longs cils et ses lèvres pleines; Annarosa, qui accompagne son mari pour comprendre la crise que traverse leur couple; Lola, la meilleure et la plus belle reporter à la radio, brésilienne de surcroît; Renata, une handicapée en fauteuil roulant qui espère un miracle nommé Materazzi; Gemma enfin, qui parle à son défunt mari, immergée dans ce fleuve humain.

Chacun de ces protagonistes cache soigneusement une part d'ombre qui, le moment venu, rendra le paysage méconnaissable et ceux qui s'y fondent, à tout jamais. Sans vous raconter toute l'histoire - ce serait vraiment dommage - sachez que si ce roman conduit comme un bolide s'apparente à un polar dont la progression dramatique est remarquablement construite, Luigi Carletti y mêle d'autres visages de la réalité italienne, ainsi qu'il l'a fait dans Prison avec piscine: la frontière incertaine entre le bien et le mal, le handicap, l'immigration et la clandestinité, le racisme ordinaire, la volonté d'être autre. Le monde dans lequel nous vivons n'est qu'une vaste foire aux apparences. Chacun de nous, au fond, aimerait passer pour quelqu'un d'autre. C'est un mécanisme naturel, même les plantes et les animaux y obéissent. En général, on le fait pour améliorer son existence. Parfois, c'est une question de survie.

Luigi Carletti pointe aussi du doigt les politiques, évoquant au-delà du rêve multiculturel qui se matérialise sur le terrain, une déshumination qui expose ses dérives identitaires: Si ces nègres et autres crève-la-faim nous envahissent, les coupables sont une bande d'hypocrites qui veulent avoir l'air ouvert et démocrate et leur ont fait croire qu'ils peuvent faire tout ce qu'ils veulent chez nous! dit Renata, autrefois renversée par deux nigérians exploités par des mafieux. 

Toujours aussi proche des marginaux, des écorchés et des exclus, l'auteur nous parle aussi d'une femme disparue en mer, partie avec son rêve dans le ventre, morte là où deux mers se rejoignent en séparant deux mondes et deux idées du monde

Toute la douleur méditerranéenne prend ainsi, imperceptiblement, le pas sur l'intrigue proprement dite et s'achève tel un conte, semblable à une mer soudain lavée de son sang et qui perpétue l'illusion que malgré la foudre bleue, rien n'a vraiment changé.

Certains signes ont un sens. Ils en ont presque toujours un... 

Luigi Carletti, Six femmes au foot (Liana Levi, 2013)

Luigi Carletti, Prison avec piscine (Liana Levi, 2012)

image: Marco Materazzi (spaziointer.it)

06/07/2013

Norma Huidobro

9782867464980.gifNorma Huidobro, Le lieu perdu (Liana Levi, 2009)

Sous un soleil de plomb, quelque part en Argentine, se déroule cette poignante histoire d’amour au temps de la dictature. Entre Marita et Matilde, compagne d’un militant recherché par l’inquiétant et vulnérable Ferroni, Le lieu perdu scelle aussi l’histoire d’une amitié indéfectible face à la répression militaire. Avec une plume fine et subtile, l’auteur distille tour à tour  la suspicion, la crainte, le désir, la cruauté ou la folie dans un récit tendu à l’extrême, intense et envahissant comme un orage imprévu et dévastateur.

Disponible également en collection de poche Piccolo (Liana Levi, 2010)

06:45 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Littérature sud-américaine | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

04/07/2013

Andrea Camilleri

9782265086050.gifAndrea Camilleri, Un été ardent (Fleuve Noir, 2009)

 

D'abord il y a une invasion de cafards, puis de souris, et enfin de rats : la villa que le commissaire Montalbano a trouvée à Vigàta pour les amis de sa fiancée Livia semble vraiment maudite. La série de catastrophes atteint son paroxysme lorsque le petit garçon du couple disparaît, pour être finalement retrouvé sain et sauf dans un sous-sol dont même les locataires ignoraient l'existence. Mais une autre découverte y attend le commissaire: le cadavre d'une jeune fille du village disparue plusieurs années auparavant. Dans la chaleur étouffante du mois d'août en Sicile, Montalbano se lance dans une nouvelle enquête dont la progression est perturbée par la soeur jumelle de la défunte, la ravissante Adriana...


Le plus beau compliment que l’on peut adresser à Camilleri, c’est qu’on ne se lasse pas de découvrir les multiples facettes de la personnalité complexe de son flic – le plus célèbre de la péninsule – Montalbano, et que l’originalité de ses enquêtes demeure au rendez-vous, après tant d’années ! De plus, les personnages qui l’entourent contribuent à notre plaisir : Ses coéquipiers Fazio et Catarella, sans oublier sa compagne Livia dont les scènes de ménage sont légendaires … Enfin, il y a la Sicile, le soleil, une chaleur étouffante qui exacerbe les passions, comme cet épisode ne manquera pas de vous en convaincre !


Egalement disponible en coll. Pocket (Pocket, 2010)

28/06/2013

Donna Leon 1b

Bloc-Notes, 28 juin / Les Saules

Extrait du CD d'accompagnement de Curiosités vénitiennes consacré à Antonio Vivaldi, interprété par Il Complesso Barocco sous la direction de Riccardo Minasi, voici le premier mouvement / allegro du Concerto pour violon en mi mineur RV 277, Il Favorito...


Donna Leon, Curiosités vénitiennes / avec un CD d'Antonio Vivaldi (Calmann-Lévy, 2013)

00:10 Écrit par Claude Amstutz dans Antonio Vivaldi, Littérature étrangère, Musique classique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique classique | |  Imprimer |  Facebook | | |

Donna Leon 1a

Bloc-Notes, 28 juin / Les Saules

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Si vous aviez la chance d'habiter Venise, songeriez-vous à abandonner la Sérénissime en plein été? Vous, peut-être non, mais le commissaire Guido Brunetti, oui! Accablé par une chaleur suffocante, il prépare ainsi tant bien que mal ses vacances, alors que la ville tout entière fonctionne au ralenti, que même les malfrats en tous genres se montrent réticents à faire les poches des touristes ou cambrioler les maisons inoccupées pendant la période estivale.

Avant son départ, il lui reste tout de même un peu de temps libre pour recueillir les confidences de son fidèle inspecteur Vianello, soucieux à propos de sa tante, Zia Anita, fascinée ou abusée par un cartomancien qui lit dans l'avenir et résout les problèmes, inclus ceux qui touchent à la santé, non sans succès. Ancien séminariste, ce dernier a exercé en qualité de psychologue clinicien - sans la moindre licence en ce domaine, ce qui lui a valu une amende salée - puis guérisseur avant de se livrer à ses bonnes oeuvres.

Brunetti va ainsi enquêter discrètement sur cette affaire, avec la complicité inévitable de la signorina Elettra - secrétaire du vice-questeur Patta - spécialiste en contournement des autoroutes informatiques.  Ses investigations, en marge d'un autre dossier, vont le conduire à de troubles dossiers immobiliers, à des décisions de justice déconcertantes: reports de comparutions, retards, renvois... Avec, au coeur de cette exploration, un certain Araldo Fontana, greffier au palais de justice - un monsieur très bien, très gentil, honnête homme - et une femme, la juge Coltellini, qui, en apparence tout au moins, semble subjuguer ce fonctionnaire exemplaire. Mais je m'arrête ici, et pour en connaître davantage, ce sera à vous de le découvrir dans Brunetti et le mauvais augure!

Sachez toutefois, que, sur le point de rejoindre sa famille à Malles - dans la province de Bolzano - notre commissaire devra faire marche arrière, à la suite de l'assassinat du monsieur très bien, très gentil, honnête homme, soit Araldo Fontana... Et l'autopsie révèlera un détail inattendu s'inscrivant dans la lignée d'autres secrets obscurs bien gardés à Venise. L'enquête, dès lors, prendra une toute autre orientation, et, plongé dans les Pensées de Marc Aurèle, Brunetti s'approchera peu à peu de la vérité, contenue dans les premières lignes de ce dix-neuvième épisode, signée Lorenzo da Ponte, dans le Don Giovanni de Wolfgang Amadeus Mozart: L'empio crede con tal frode di nasconder l'empietà / L'impie croit par la ruse pouvoir cacher son impiété...

Je vous invite à lire aussi un opuscule de Donna Leon, paru simultanément chez le même éditeur - autour de son autre passion, la musique - Curiosités vénitiennes: un ensemble de légendes qui font partie du patrimoine vénitien. Est inclus à cet ouvrage richement illustré par Pietro Longhi, Giovanni Antonio Canal et Jacopo Robusti dit Le Titien, un magnifique CD consacré à Antonio Vivaldi, fil rouge et illustrateur de chacune des histoires contées.

N'hésitez donc pas à emporter ces deux livres dans vos bagages, cet été: de délicieux moments en perspective, sans prétention ni arrière-pensées. Simplement pour le plaisir...

Agréables vacances à toutes et à tous! 

Donna Leon, Brunetti et le mauvais augure (Calmann-Lévy, 2013)

Donna Leon, Curiosités vénitiennes / avec un CD d'Antonio Vivaldi (Calmann-Lévy, 2013)

image: www.crystalinks.com

00:05 Écrit par Claude Amstutz dans Antonio Vivaldi, Littérature étrangère, Wolfgang Amadeus Mozart | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Imprimer |  Facebook | | |

25/06/2013

Morceaux choisis - Ramon Gomez de la Serna

Ramon Gomez de la Serna

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Cher Ramon,

La moitié du monde veut attaquer l'autre moitié et la guerre qui prend aujourd'hui le nom de guerre froide est la sempiternelle guerre de toujours. L'ennui ce serait qu'on nous agresse et qu'on démantibule la table sur laquelle, noblement accoudés, nous écrivons, lisons et pensons. Dans cette agression des uns contre les autres même notre maison est sans dessus dessous et on la retrouve un jour à des milliers de kilomètres de là où elle était.

Les forces du monde ont augmenté et la loi veut que les unes soient toujours négatives et les autres positives, en une perpétuelle alternance, sans accord possible, sans qu'elles se confondent désastreusement. Stabiliser ces forces a été l'un des prodiges du passé, peut-être parce qu'elles n'avaient pas atteint le voltage d'aujourd'hui. Nous qui sommes nés avec assez d'humour, nous savons nous maintenir au milieu des deux courants, sans que l'inquiétude et la crainte soient trop pénibles. Nous gagnons des jours, des nuits, parfois des matins et grâce à nos blagues nous pouvons entretenir des correspondances superflues et constantes comme celle-ci.

Parce que nous pouvons dire ce que nous voulons nous damons le pion aux bornés et aux fanatiques. Au coeur de la violence il est beau de prononcer la phrase inouïe. Aujourd'hui, et sous l'enveloppe de cette lettre, nous passons au travers du feu criminel et je peux te dire qu'il y a des larmes qui sont des vers blancs et que le mouchoir est le linceul du nez.

Voler au faire le non-faire est l'un des charmes de la vie et les tasses qui ne servent pas sont plus heureuses que nous précisément parce qu'elles sont et ne servent pas. Tout est dans l'erreur et Dieu sourit à celui qui a l'habileté de ne pas se laisser prendre aux bobards et aux soucis, en profitant de ces moments neutres où il contemple les heures libres de devoir, sans ployer sous le fardeau d'aucune pensée solennelle. On veut nous enlever cette faculté d'enfants de Dieu d'affronter la tristesse et ce qui semble n'avoir aucun sens, comme les fleuves des draps qui vont se jeter dans la mer ou la tortue qui ne joue pas au violon. Pas de plus grand bonheur que de penser ce qu'on veut au lieu de penser ce que les autres veulent.

Nous profitons de l'absence de censure sur la correspondance pour dire l'indicible qui n'est pas ce qu'il est interdit de dire mais ce qui se satisfait de son inconscience, comme, par exemple, dire que les gilets avalent leurs boutons - ils ne les perdent pas - et que dans les couloirs on entend le bruit de l'obscurité qui fait craquer ses doigts.

Une lettre, tu le comprends très bien, ne rivalise avec rien et c'est pourquoi elle peut donner forme au rien, parler du rien, diriger l'escarmouche de la chiquenaude, embrouiller les ongles, mélanger les veinules du cerveau et les coiffer la raie au milieu, calomnier le couteau, soutenir que le compteur électrique est fou.

Ni fièvre, ni nominations, ni histoires d'enfants, mais tout simplement te dire que le papier hygiénique qui a ses propres télégrammes, même de l'étranger, annonce que la bourse invisible ruine le monde.

Je t'embrasse,

Ramon.

Ramon Gomez de la Serna, Lettres à moi-même / extrait, dans: Lettres aux hirondelles et à moi-même (André Dimanche, 2006)

image: Hamlet (loisirs.lemessager.fr)

22/06/2013

La citation du jour

Angèle de Foligno

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Ce n'est par pour rire que Je t'ai aimée.

Angèle de Foligno, L'amour vrai et l'amour menteur, dans: Le livre des visions et instructions (coll. Points Sagesse/Seuil, 1991)

image:  Angèle de Foligno (liebesiegt.com)

15/06/2013

Milena Agus

9782867464331.gifMilena Agus, Mal de pierres (Liana Levi, 2007)

Comme dans cet autre chef d’œuvre contemporain de la littérature italienne, L’amandière de Simonetta Agnello-Hornby, nous suivons le destin d’une jeune femme sarde hors du commun par les yeux de sa petite-fille. Sans compromis, sauvage, passionnée, son destin bascule entre son mari et le rescapé - dans le livre - brève rencontre sur le continent, croisant au passage des personnages secondaires originaux, attachants, dans cette chronique d’après-guerre. Une heureuse découverte, pleine de saveur !

également disponible en coll. Livre de poche (LGF, 2009) 

 

07:47 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Littérature italienne | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |