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15/04/2012

Voix de femmes 1b

Bloc-Notes, 15 avril / Les Saules

Ci-dessous, voici quelques oeuvres photographiques choisies parmi une centaine illustrant ce tour du monde de la littérature féminine intitulé Voix de femmes - Anthologie / Poèmes et photographies du monde entier, témoignant de la diversité d'expression, de talent et de la sensibilité de toutes les femmes.

Brigitte Grignet

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Jane Evelyn Atwood

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Rania Matar

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Elina Brotherus

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Gillian Laub

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Véronique de Viguerie

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Erhan Turgut et Lionel Ray: Voix de femmes - Anthologie / Poèmes et photographies du monde entier (Turquoise, 2011)

Voix de femmes 1a

Bloc-Notes, 15 avril / Les Saules

littérature; poésie; anthologie; livres

Il est des livres que je voudrais porter à la connaissance du plus grand nombre, tant ils sont beaux, tant ils sont réussis, tant ils sont porteurs de germes d'espoir, de talents méconnus et expriment un formidable élan capable de résonner dans le coeur de tous. Tel est l'impression que laisse cet ouvrage intitulé Voix de femmes - Anthologie / Poèmes et photographies du monde entier

Chargé de la réalisation de ce travail éditorial exceptionnel, Erhan Turgut, journaliste, graphiste et dessinateur de presse turc, a déjà collaboré à un autre projet similaire auprès du même éditeur: Non à la guerre - Anthologie / Poésies du monde - Photographies - Histoire qui sera évoqué ultérieurement; et c'est au poète Lionel Ray que revient le mérite de la sélection de ces oeuvres glânées sur les cinq continents, avec un constant souci d'exemplarité et d'éclat. 343 poétesses sont présentées dans Voix de femmes, 477 poèmes, 162 pays et peuples, 49 femmes photographes et 104 photographies de femmes à travers le monde.

Une entreprise tentée par bon nombre d'auteurs et d'éditeurs par le passé mais qui, la plupart du temps, s'est heurtée à une difficulté: celle d'accorder une place, à tout prix, aux écrivains d'un pays peu visité mais souvent au détriment de la qualité des textes, ou au contraire exposant toujours de mêmes auteurs déjà largement représentés dans d'autres anthologies. Rien de tel dans ce volume équilibré dans son choix, dans son classissisme ou sa modernité.

Avec une joie simple et sans fausse modestie, j'observe que plus de 350 poèmes de ce recueil me sont totalement inconnus, qu'ils élargissement mon horizon, me projettent vers d'autres cultures et me sensibilisent à des expressions de la douleur, de la révolte ou de l'amour dont il eut été triste que je ne les découvre pas avant de tirer ma révérence.

Cet ouvrage célèbre aussi la richesse créative des femmes: leur imagination, leur enracinement et leur courage fréquemment masqués, dépréciés et craints dans le paysage culturel, ici comme ailleurs, aujourd'hui comme hier.

Voix de femmes se présente sous la forme d'un album de 384 pages, grand format, relié, sur papier glacé avec parfois des textes sur deux colonnes. J'ajoute que son prix - 38 euros - est plus que raisonnable pour un ouvrage illustré d'une si grande qualité. 

Si vous êtes sensibles à la poésie, demandez à vos amis qu'ils vous offrent cette anthologie pour votre anniversaire, et si vous n'avez pas la patience d'attendre, cherchez-la ou commandez-la auprès de votre libraire préféré: elle vous réservera des moments de rare plénitude et ne quittera sans doute pas votre bibliothèque de si tôt...

Erhan Turgut et Lionel Ray: Voix de femmes - Anthologie / Poèmes et photographies du monde entier (Turquoise, 2011)

13/04/2012

Morceaux choisis - Nirmalprabha Bordoloï

Nirmalprabha Bordoloï

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Si tu portes dans ton coeur un coin de forêt
Tu trouveras l'ombre où goûter le repos.
Si tu gardes dans ton coeur un peu de ciel bleu
Un couple d'oiseaux y prendra son essor.
 
 

Nirmalprabha Bordoloï, Voix de femmes - Anthologie / Poèmes et photographies du monde entier (Editions Turquoise, 2012)

06:53 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

11/04/2012

Morceaux choisis - Henry Miller

Henry Miller

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Le meilleur de l'art d'écrire, ce n'est pas le mal réel qu'on se donne pour accoler le mot au mot, pour entasser brique sur brique; ce sont les préliminaires, le travail à la bèche que l'on fait en silence en toutes circonstances, que ce soit dans le rêve ou à l'état de veille. Bref, la période de gestation. Personne n'a jamais réussi à jeter sur le papier ce qu'il avait primitivement l'intention de dire. La création originale, qui est continue, que l'on écrive ou non, participe du flux élémentaire. Elle s'inscrit hors de toutes dimensions, de toutes formes, de toutes durées. Dans cet état préliminaire, qui est création et non naissance, les éléments appelés à disparaître ne sont pourtant nullements détruits; un principe qui se trouvait déjà être présent, marqué au sceau de l'impérissable, par exemple la mémoire, la matière, Dieu, surgit à l'appel et l'être s'y précipite comme le fétu de pailledans le torrent. Mots, phrases, idées, si subtils et ingénieux soient-ils, coups d'ailes les plus forcenés de la poésie, rêves les plus profonds, visions les plus hallucinantes, ne sont que hiéroglyphes grossiers gravés par la douleur et la souffrance en commémoration d'un événement qui demeure intransmissible.

Dans un monde suffisamment ordonné, il serait utile de faire l'effort déraisonnable de noter de tels hasards miraculeux. Cela n'aurait à vrai dire aucun sens. Si l'humanité prenait le temps de se rendre compte des choses, qui saurait se contenterd'une contre-façon, quand il n'est que de tendre la main pour saisir le réel? Qui aurait envie d'allumer la radio pour écouter Beethoven, par exemple, dès lors qu'il lui suffirait de se tourner vers lui-même pour vivre les extases d'harmonie que Beethoven a désespérément tenté d'enregistrer? Toute grande oeuvre d'art, si elle atteint la perfection, sert à nous rappeler, mieux: à nous faire rêver l'intangible éphémère, c'est-à-dire l'univers. Elle ne jaillit pas de l'entendement, on l'y admet ou on l'en rejette. Admise, elle instille une vie nouvelle. Rejetée, nous en sommes diminués d'autant. Quel que soit son objet, elle ne l'atteint jamais: elle contient toujours un plus dont le dernier mot ne sera jamais dit. Et ce plus, c'est ce que nous lui ajoutons dans notre appétit terrible de ce dont chaque jour qui s'écoule est la négation. Si nous nous admettions nous-mêmes aussi complètement que nous admettons l'oeuvre d'art, l'univers entier de l'art périrait de carence alimentaire. 

Henry Miller, Sexus (Bourgois, 1995)

traduit de l'américain par Georges Belmont

image: Henry Miller, Really the Blues

15:23 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

09/04/2012

Morceaux choisis - Remo Fasani

Remo Fasani

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Se lever tout doucement avec l'aube,
grandir avec la matinée,
souffler durant l'après-midi,
se reposer quand vient le soir,
dormir en paix la nuit entière,
se réveiller au jour nouveau:
telles sont les vingt-quatre heures
de la brise de Sils Maria,
et son cycle sans fin.
 

Remo Fasani, Novénaires - postface de Philippe Jaccottet (Editions Conférence, 2011)

image: Sils Maria (Grisons)

Giuseppe Genna

Bloc-Notes, 9 avril / Les Saules

littérature; roman; policier; livres

Certains livres sont à prendre ou à laisser, tant ils véhiculent des images extrêmes, destabilisantes, une thématique dont on ne sait que penser jusqu'à la fin dernière qui n'en est pas tout à fait une. Tel est le cas de L'année-lumière de Giuseppe Genna, faux roman policier, fiction documentaire, oeuvre onirique préfigurant les temps futurs, faux roman philosophique aux multiples clefs ouvrant les portes sur le mensonge des siècles? A chacun de choisir l'étiquette qui convient, même si, en définitive, ce bouquin inclassable est peut-être tout cela à la fois. Car il faut le suivre, Giuseppe Genna, et l'histoire qu'il nous raconte n'est pas évidente. Alors, commençons par le début, l'intrigue.

L'histoire démarre avec un personnage redoutable, Mentor. On pourrait dire qu'il est dépourvu d'imagination, de créativé, de désir et pourtant, il est aussi redoutable qu'un cobra. Dirigeant influent dans une multinationale des télécommunications - la Komtel - il est malin, pratique un humour dévastateur, ancré dans une réalité où seuls les colossaux bénéfices de l'entreprise lui tiennent lieu de croyance. C'est son jeu d'échecs à lui, sa raison d'être, son emblème de trahison permanente. Bref, rien de shakespearien chez lui. Amoureux de sa femme Maura - une quadragénaire peu préparée aux renversements du destin - il éprouve un certain soir, en face d'elle, le choc de sa vie: Elle est étendue, inerte, elle semble de cire. Une dépouille disposée pour la veillée. Il la secoue, ça ne sert à rien. Il hurle. Puis sent qu'elle est chaude, pas froide. Elle est dans le coma. Que lui est-il donc arrivé? 

Mais d'autres soucis rongent Mentor: Nelson Kinnock tout d'abord, administrateur délégué de la Komtel anglaise, qui rêve de mettre fin au trafic d'influences de Mentor et du Prophète, son alter ego de la branche italienne; l'Affairiste ensuite, venu d'Afrique du Sud, afin de provoquer la chute de Mentor et qui en Maura reconnaît les traits de sa propre épouse Antonya, emportée par un cancer, ce qui va compliquer sa mission.

Le dénominateur commun de toutes les secousses sismiques de cet étrange roman est, en point de mire, le pouvoir dont les tentacules gagnent l'économie, la religion, la politique et s'insinue jusque dans les plus fragiles ou les plus basses oeuvres tel un virus mortel. Tout le monde cache des secrets. Les secrets sont la première marchandise, le premier objet d'échange. C'est l'argent à l'état réel. C'est le moteur du scandale. Le moteur de la tragédie. La tragédie, c'est le scandale qui explose.

Davantage qu'un récit de plus sur les coulisses de la finance, L'année-lumière ouvre à cette parodie du réel qui, à grand renfort d'images, de campagnes marketing et de slogans publicitaires, impose les contours d'une humanité vitrifiée, futuriste, dont l'âme rigidifiée n'est pas sans rapport avec la mer blanche d'Arkhangeslk que Mentor explore à la fin de ce livre: Le pôle magnétique est là, non loin, l'axe de rotation de la planète fore la croûte de glace éternelle. Qui est en train de fondre dans une progression incessante. La précession advient ici, secrète, dans les nuits boréales. Le soleil est toujours bas, ne fait pas fondre les glaces. Chaque rayon de soleil qui arrive ici est une chaîne de lumière froide, condensée dans l'air raréfié.

D'une construction très originale - parfois un peu déroutante - L'année-lumière est servi par une langue acide et explosive et des images fortes, au service d'un autre chapitre à ce meilleur des mondes possibles, alternant avec des moments de pure poésie dans la dernière partie du roman où émerge même - au-delà de la fin, Giuseppe Genna dixit - le Cardinal qui à l'issue du Conclave, apparaît sous les traits de Benoît XVI: Il est seul et ouvre son manteau, et sous son manteau il n'y a pas de corps, et on voit l'univers et toutes les étoiles.

Un monde d'enfer ou de grâce? A travers l'histoire de Maura échappant à ces foyers de mythologie contemporaine - le mensonge érigé en dogme de survie - Giuseppe Genna laisse au lecteur le dernier mot. Et il ne saurait être ni noir, ni blanc...

Giuseppe Genna, né à Milan en 1969, a déjà publié en langue française Sous un soleil de plomb en 2004 et La peau du dragon en 2006, tous deux parus aux éditions Grasset.     

Giuseppe Genna,  L'année-lumière (Métailié, 2012)

07/04/2012

Steven Carroll 1b

Steven Carroll: Le rire - extrait

Steven Carroll 2.jpg

La première chose que j'entends quand les applaudissements s'apaisent, c'est son rire. Ce rire de Vic dont je suis tombée amoureuse la minute où je l'ai entendu pour la première fois. Il était tout entier dans ce rire. Un rire immense, sans la moindre trace de moquerie. Rien à voir avec les petits sourires en coin de George Bedser, ou les grognements de Bruchner. Un grand rire généreux, qui vous donnait envie de vous blottir dans son ombre. Qui vous donnait envie de rire avec lui, même si on ne savait pas pourquoi on riait. 

A peine ai-je entendu son rire que l'évidence m'a frappée: ce n'est plus le même rire. Il y manque quelque chose. Ce rire-là ne m'est pas familier. Il a perdu sa générosité, il n'est plus que bruyant. 

Vic discute avec George Bedser. Ils éclatent de rire encore une fois, puis Bedser s'éloigne. Vic n'est jamais en reste pour trouver des interlocuteurs quand il en a envie. Peu importe où il est. Dans le plus perdu des villages, il sautera sur la moindre occasion de parler à quelqu'un. Mais je le connais, celui-là, s'écriera-t-il tout à coup au fin fond de la plua reculée des campagnes, attends un peu que j'aille lui dire un mot. Mais Bedser s'est éloigné, et Vic me lance un regard en biais parce qu'il sait d'avance ce que je m'apprête à lui dire. 

Je vois qu'il a l'allure avachie des ivrognes. Son corps s'affaisse, des épaules aux genoux, qui ne tarderont pas à fléchir à leur tour. Ils sont tous pareils dès qu'ils ont quelques verres dans le nez. Des bonshommes de cire fondant au soleil. Pas un n'y échappe. Vic n'en est pas encore tout à fait là, mais il en prend le chemin. Je commence à le connaître, depuis le temps. Et quand il relève les yeux, , j'y vois cette lueur hagarde qu'ils ont tous. Est-ce que ça vaut vraiment la peine? Et faut-il que je lui parle de son rire par la même occasion? Faut-il que je lui dise que depuis un certain temps il ne me donne plus envie de rire avec lui? Que ce n'est plus le rire que j'aimais autrefois? Au lieu de lui faire écho, j'ai seulement envie de lui dire de se taire. J'aimerais qu'il puisse entendre son rire comme je l'entends ce soir, et qu'il s'arrête. J'aimerais qu'il se calme un peu sur la bière. Tandis que je traverse le salon en retournant toutes ces questions dans ma tête, il me regarde comme s'il savait déjà ce que j'ai l'intention de lui dire.

Si je le lui dis, je deviens une emmerdeuse. Personne ne souhaite passer pour une emmerdeuse. Les femmes des autres peuvent bien jouer à ce jeu-là, moi, je ne m'y prêterai pas. Jamais je ne m'abaisserai à ça. Je m'en irai avant. Et ce ne sont pas des paroles en l'air. Alors nous restons debout côte à côte sans rien nous dire, comme deux étrangers sur une piste de danse. Et cela pourrait être agréable, car nous avions été autrefois des étrangers qui se taisaient ensemble et prenaient du bon temps. A ceci près qu'alors nous avions toute une vie devant nous. C'était un silence nourri de promesses. Un silence joyeux. Aujourd'hui, la joie a disparu. Le silence qui nous échoit à présent n'est plus celui qui vous emplit quand vous avez l'impression que votre vie va décoller comme une fusée pour Mars. Ce n'est plus le silence qui précède les confessions fiévreuses que vous vous apprêtez à faire à l'homme de votre vie. Le silence que nous partageons désormais, c'est le silence triste et familier qui retombe après que l'on s'est tout dit.

En sorte que je suis soulagée  quand les discours reprennent. Ils nous évitent de nous adresser la parole. Ils nous permettent de rire chacun de notre côté, puisque c'est aux plaisanteries d'un autre que nous rions. Et je sais déjà que quand j'entendrai son rire, ce ne sera plus le rire que j'ai tant aimé autrefois. 

Steven Carroll, De l'art de conduire sa machine (Phébus, 2001)

image: Steven Carroll et son fils Leo

00:17 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Steven Carroll | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

Steven Carroll 1a

littérature; romans; livresSteven Carroll: un écrivain incontournable

Il est impossible d’échapper au charme de cet écrivain discret venu d’Australie. Son écriture sobre, précise, aux émotions contenues ainsi que sa force narrative éblouissante, évoquent une banlieue de Melbourne entre les années 50 et les années 70. Nous y croisons le destin de Rita, de son mari Vic, le mécanicien du premier livre, De l’art de conduire sa machine et de leur fils Michäel, fasciné par le cricket dans Un long adieu. Photographie en sépia, pourrait-on dire, de ce faubourg paisible qui s’ouvre peu à peu aux résonances du monde avec ses personnages attachants, constamment en mouvement, en devenir, à la recherche d’une vie meilleure.

Steven Carroll est vraiment un conteur extraordinaire. Son économie verbale pour dire la fragilité de l’amour, l’espoir qui vacille, la tristesse de l’enfance évanouie ou l’inexorable métamorphose des paysages urbains, tient de la magie et suffit à qualifier son talent d’incomparable.
 
Avec Le temps qu’il nous a fallu s’achève cette chronique familiale et sociale. Célébration mélancolique de la mémoire qui s’épanche où les souvenirs ont remplacé les rêves, où les jeunes qui défendent l’avenir contrastent avec les plus anciens qui ont passé le témoin et ne se sentent plus nécessaires à la collectivité, spectateurs ironiques du temps qui passe. Magnifique!
 
Steven Carroll est né à Melbourne en 1949. Enseignant au niveau secondaire et critique dramatique, il se consacre aujourd’hui exclusivement à l’écriture. Ses plus belles récompenses littéraires sont le Miles Franklin Award 2008 et le Commonwealth Writers Prize 2008 pour Le temps qu’il nous a fallu.

Il vit à Melbourne, partage sa vie avec l’écrivain Fiona Capp – publiée par les éditions Actes Sud - depuis plus de 15 ans et leur fils de 10 ans.
 

De l'art de conduire sa machine (Phébus, 2005)

Un long adieu (Phébus, 2006)

Le temps qu'il nous aura fallu (Phébus, 2009)


publié dans Le Passe Muraille no 80 - décembre 2009

00:17 Écrit par Claude Amstutz dans Le Passe Muraille, Littérature étrangère, Steven Carroll | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; romans; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

06/04/2012

La légende du grand inquisiteur 5/5

Les frères Karamazov - La légende du grand inquisiteur

littérature; contes; livres

Si Tu avais accepté le monde et la pourpre de César, Tu aurais fondé l'empire universel et donné la paix à la terre. A qui appartient-il de régner sur les hommes, sinon à ceux qui disposent de leur pain et dominent leur conscience? Nous avons pris le glaive de César, nous T'avons renié, nous sommes allés à lui. Il s'écroulera encore des siècles qui verront les méfaits de l'esprit libre, de la science et de la barbarie, car c'est par la barbarie qu'ils finiront, après avoir élevé leur Tour de Babel sans nous. Alors la bête viendra à nous en rampant, elle léchera nos pieds et les arrosera de larmes de sang. Nous monterons sur la bête, nous élèverons une coupe en l'air et sur cette coupe sera gravé ce mot: mystère.

Alors commencera pour les hommes le règne de la paix et du bonheur. Tu es fier de Tes élus, mais ils ne sont que le petit nombre: nous donnerons la paix à tous. Pense donc: combien de ces élus, de ces forts marqués pour être des élus, combien se sont lassés de T'attendre! Les forces de leur esprit et l'ardeur de leur coeur, ils les portent et les porteront vers un autre champ à labourer. Ils finiront par lever l'étendard de la liberté, l'étendard que Tu leur auras donné Toi-même.

Nous donnerons, nous, le bonheur à tous, il n'y aura plus de révolte, il n'y aura plus de massacre, les hommes n'agiront plus comme ils agissent, sous le règne de Ta liberté. Nous les persuaderons. Ils ne seront libres qu'en abdiquant leur liberté en notre faveur. Ils seront libres en se soumettant à notre pouvoir. Aurons-nous raison ou aurons-nous tort? Ils se convaincront eux-mêmes que nous disons vrai, lassés qu'ils seront des terreurs et des angoisses, où les avait plongés Ta liberté.

L'indépendance, la libre pensée, la science les auront égarés dans de telles ténèbres et les auront mis en présence de tels prodiges, de tels mystères insondables, que certains d'entre eux ne connaissant plus de bornes à leur furie se détruiront eux-mêmes. D'autres, faibles mais déchaînés, s'égorgeront mutuellement. D'autres encore, foule lâche et misérable, se traîneront à nos pieds en criant: oui, vous aviez raison, vous seuls possédez son secret et nous revenons à vous. Sauvez-nous de nous-mêmes!

Le pain qu'ils recevront de nos mains, ce sera leur pain, gagné par leur propre travail, et c'est nous qui le leur distribueront. Ils verront bien que nous n'avons pas changé les pierres en pain. Mais, plus que le pain lui-même, c'est le pain reçu de nos mains qui les rendra heureux. Ils se rappelleront bien qu'autrefois le pain même, fruit de leur travail, se changeait en pierre entre leurs mains. Ils verront alors que lorsqu'ils seront revenus à nous les pierres se mueront en pain. Ils comprendront très bien la valeur de la soumission définitive. Tant que les hommes n'auront pas compris l'avantage de ne plus être libres, ils seront malheureux.

Qui, réponds-moi, qui a le plus contribué à cette incompréhension? Qui a divisé le troupeau? Qui l'a dispersé sur des routes inconnues? Mais le troupeau se reformera. Il rentrera dans l'obéissance et ce sera pour toujours. Alors nous donnerons aux hommes le bonheur, un bonheur doux et paisible. Le bonheur qui sied à de débiles créatures comme eux. Nous leur enseignerons l'humilité, nous leur prouverons la vanité de leur orgueil. C'est Toi qui les a élevés, c'est Toi qui leur a enseigné l'orgueil. Nous leur montrerons qu'ils sont impuissants, qu'ils sont des enfants, que le bonheur des enfants est le plus délicieux. Ils deviendront timides, leur regard ne nous quittera plus et, tout tremblants, ils se serreront contre nous, telle une couvée sous l'aile de la mère.

Nous ferons leur étonnement et leur effroi et ils seront fiers de notre puissance et de notre génie, qui nous auront permis de dompter ce troupeau innombrable de rebelles. Honteux et foudroyés, ils trembleront devant notre courroux, leurs yeux seront des fontaines de larmes, comme ceux des enfants et des femmes. Mais combien aisément, sur un signe de nous, ils passeront de la tristesse au rire, du désespoir à la gaité, de l'angoisse à la joie douce des enfants. Nous les astreindrons au travail, mais aux heures de loisirs, mêlant à leur vie les chansons, les choeurs innocents et les danses, nous la changerons en un jeu d'enfants.

Oh oui! nous leur permettrons même de pécher. Ils sont si faibles, si impotents! Et ils nous aimeront comme des enfants, parce que nous leur permettrons le péché. Nous leur dirons que tout péché commis avec notre permission sera pardonné, et c'est par amour que nous leur permettrons de pécher, car nous prendrons sur nous la peine de ces péchés. Nous nous chargerons de leur péchés devant Dieu et ils nous adoreront comme des bienfaiteurs. Ils n'auront nul secret pour nous. Ils pourront vivre avec leurs femmes ou avec leurs maîtresses, ils pourront avoir des enfants ou n'en pas avoir, pourvu qu'ils nous obéissent aveuglément.

Et ils nous écouteront en tout avec allégresse. Les plus pénibles secrets de leur conscience, ils viendront nous les soumettre et c'est nous qui en déciderons. Ils recevront nos sentences avec joie, délivrés du cruel souci de se déterminer librement. Et tous seront heureux: tous les millions de créatures, sauf une centaine de mille, sauf nous, leurs maîtres. Seuls, nous serons malheureux, nous les dépositaires du mystère! Mille millions d'enfants heureux et cent mille martyrs, chargés de la connaissance maudite du bien et du mal. Eux, ils mourront paisiblement, ils s'éteindront doucement en Ton nom. Au-delà de la tombe, ils ne verront que la mort. Nous, nous garderons le secret. Et pour leur bonheur, nous les bernerons d'une récompense éternelle dans le ciel. S'il y a un autre monde, ce n'est certes pas pour des êtres comme eux!

On prophétise que Tu reviendras et que Tu triompheras de nouveau, entouré de Tes élus, puissants et fiers. Nous dirons que Tes héros n'ont sauvé qu'eux-mêmes, et nous aurons, nous, sauvé tout le monde. Il est écrit: la fornication assise sur la bête et tenant dans ses mains la Coupe du Mystère, sera déshonorée, les faibles se révolteront de nouveau, déchireront le pourpre de la fornicatrice et dénuderont son corps infâme. Je me lèverai alors, et je Te montrerai les millions de milliers d'heureux, les innombrables enfants qui n'ont pas connu le péché. Et nous qui, pour leur bonheur, aurons pris sur nous le poids de leurs fautes, nous nous dresserons devant Toi et nous Te dirons: juge-nous, si Tu le peux et si Tu l'oses!

Sache que je ne Te crains point! Sache que moi aussi, je suis allé au désert et que je me suis nourri de sauterelles et de racines! Moi aussi, j'ai béni la liberté que Tu donnas aux hommes! Moi aussi, j'ai rêvé d'être compté parmi Tes élus, brûlant du désir d'en compléter le nombre! Mais j'ai abdiqué ce rêve. J'ai refusé de servir Ta folie, et je suis revenu me joindre à ceux qui ont corrigé Ton oeuvre. J'ai quitté les fiers, je suis allé aux humbles pour leur apporter le bonheur. Ce que je Te dis s'accomplira: notre royaume sera fondé.

Demain, sur un signe de moi, Tu le verras: ce troupeau docile apportera des charbons ardents au bûcher où je Te ferai mourir, pour être venu entraver notre oeuvre. Si quelqu'un a mérité le bûcher, plus que tous, c'est Toi!

Demain, je Te brûlerai: dixi. 

L'Inquisiteur se tait. Il attend un moment la réponse du Captif dont le silence lui pèse. Le Captif l'a écouté, Son calme regard ne l'a pas quitté, Il n'a jamais répondu au vieillard. Et pourtant le vieillard aurait aimé entendre des paroles amères et terribles. Soudain, le Captif s'avance, Il s'approche en silence du vieil homme et baise doucement ses lèvres exsangues. C'est Sa réponse. Le vieillard tressaille, ses lèvres remuent. Il va à la porte, il l'ouvre et dit: Va-T'en, ne reviens plus, plus jamais!

Par la ville ténébreuse, le Prisonnier s'en va, laissant au coeur de l'Inquisiteur la brûlure de Son baiser. Et l'Inquisiteur va reprendre sa même tâche...

(fin)

Fiodor Dostoievski, La légende du grand inquisiteur (L'Insomniaque, 1999)

adaptation: Maximilien Rubel

02:57 Écrit par Claude Amstutz dans Contes, Littérature étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; contes; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

05/04/2012

La légende du grand inquisiteur 4/5

Les frères Karamazov - La légende du grand inquisiteur

littérature; contes; livres

Tu voulais que l'homme aimât librement, afin qu'il pût Te suivre librement, séduit par ce qui émane de Toi. L'homme devait désormais d'un coeur libre discerner le bien du mal, oubliant la dure loi ancienne, n'ayant pour se guider que Ton image. Mais comment n'as-Tu pas compris que l'homme contesterait enfin Ton image et Ta vérité, sous ce terrible fardeau, le libre choix?

Ils clameront que la vérité n'est pas en Toi qui as laissé leurs âmes en proie à l'inquiétude et à une angoisse indicible, avec tant de soucis et de problèmes insolubles. Tu as donc préparé Toi-même la ruine de Ton royaume et Tu ne dois accuser personne de cette faillite. Etait-ce là ce qu'on Te proposait? Il y a su la terre trois forces, les seules qui soient capables de vaincre et de subjuguer à jamai la conscience de ces révoltés et de ces faibles, pour leur propre bonheur. Ces forces, les voici: Le miracle, le mystère et l'autorité.

Tu as rejeté l'une, Tu as rejeté l'autre et même la troisième, et Tu en as donné l'exemple. L'Esprit terrible et très savant T'avait transporté sur le faîte du Temple et il T'avait dit: Veux-Tu savoir si Tu es le fils de Dieu? Précipite-Toi en bas, car il est dit de Lui que les anges Le soutiendront et Le prendront et qu'Il ne se fera aucune blessure. Tu sauras alors si Tu es le fils de Dieu et Tu prouveras ainsi Ta foi en Ton Père. Tu as repoussé cette offre, Tu n'as pas cédé, Tu ne T'es pas précipité du haut du temple. Oh! certes, Tu as montré alors une fierté sublime, Tu as agi comme un Dieu, mais les hommes, race faible et révoltée, sont-ils des dieux? Tu savais qu'en faisant un seul pas, un seul geste pour Te précipiter, Tu aurais tenté le Seigneur et perdu la foi en Lui. Tu Te savais brisé sur cette terre que Tu étais venu sauver, et l'Esprit malin, le Tentateur, en aurait eu sa joie.

Mais, je le demande encore: y en a-t-il beaucoup comme Toi? As-Tu pu admettre, ne fût-ce qu'un instant, que les hommes fussent capables de résister à une pareille tentation? L'homme, par sa nature, est-il tel qu'il puisse repousser le miracle, et peut-il, dans les moments graves de la vie, dans les terribles crises de son âme, s'en remettre à la libre décision de son coeur? Oh! Tu savais que Ton acte serait conservé dans le Livre, qu'il traverserait les temps, et retentirait aux dernières limites de la terre. Tu espérais que l'homme se passerait de miracle et qu'il s'abandonnerait à Dieu. Ne savais-Tu pas qu'en renonçant au miracle l'homme renonce aussitôt à Dieu, car ce que l'homme cherche, ce n'est pas tant Dieu que les miracles. Et puisque l'homme ne peut pas se passer de miracles, il s'en crée de nouveaux, les siens propres, et il s'incline devant les sortilèges de magiciens et de sorciers, tout révolté, hérétique et impie qu'il soit. Tu n'es pas descendu de la croix, lorsqu'on T'en défiait par raillerie et qu'on Te criait: Descends de la croix et nous croirons en Toi!

Tu n'es pas descendu, parce que cette fois encore, Tu n'as pas voulu asservir l'homme par un miracle. Tu désirais une liberté inspirée par la foi et non par le miracle, Tu voulais l'amour et non les serviles transports d'un esclave, terrifié par son maître. Tu as trop présumé des hommes: ce sont des esclaves, bien qu'ils aient été créés rebelles. Vois et juge: quinze siècles se sont écoulés. Regarde bien les hommes: qui donc as-Tu élevé jusqu'à Toi? Je le jure, l'homme est plus faible et plus vil que Tu ne le pensais. Est-il capable d'accomplir ce que Tu accomplis? Tu as eu pour lui trop d'estime et trop peu de pitié, Tu as trop exigé de lui, Toi qui l'aimais plus que Toi-même. Si Tu l'avais moins estimé, si Tu en avais moins exigé, cela eût alors ressemblé à l'amour et son fardeau eût été plus léger.

L'homme est faible et vil, qu'importe qu'aujourd'hui il s'insurge partout contre notre autorité et s'enorgueillit de sa révolte? C'est la révolte de jeunes écoliers, la fierté des collégiens mutinés qui ont chassé leur maître. Mais le triomphe de ces gamins prendra bientôt fin et leur coûtera cher. Ils abattront les temples et ils ensanglanteront enfin qu'ils ne sont que des enfants sots, incapables de supporter leur propre révolte. Ils comprendront que, s'ils furent créés rebelles c'était sans doute par dérision. Dans leur désespoir, ils le diront tout haut et ce blasphème accroîtra leur misère, car l'homme n'est pas de taille à supporter le blasphème et il finit par s'en châtier lui-même.

L'inquiétude, l'angoisse et la misère, voilà donc le sort de l'homme, après tout ce que Tu as souffert pour le libérer. Ton grand prophète, dans sa vision pleine de symboles, a vu tous ceux qui seront présents à la première résurrection. Et ils étaient douze mille pour chaque tribu. Si tel était leur nombre, c'est que ce n'étaient pas des hommes, mais des dieux. Ils ont porté Ta croix, ils ont souffert, nus et affamés, dans le désert, se nourrissant de sauterelles et de racines. Certes, Tu peux être fier de ces enfants de la liberté, de leur amour libre, de leur sublime sacrifice en Ton nom. Mais rappelle-Toi: ils n'étaient que quelques milliers et ils ressemblaient à des dieux.

Et les autres? Est-ce leur faute, aux autres, aux faibles, s'ils ne peuvent endurer ce que les forts supportent? Est-elle coupable, l'âme faible, de ne pouvoir s'approprier un don aussi funeste? N'es-Tu donc venu que pour Tes élus? C'est un mystère, alors, et nous ne pouvons le comprendre. Mais si c'est un mystère, nous avons le droit nous aussi de prêcher et d'enseigner que ce n'est pas la libre décision des coeurs, ni leur amour qui importent, mais le mystère, et ils doivent s'y soumettre aveuglément, fût-ce au prix de leur conscience.

Nous avons corrigé Ton oeuvre et nous l'avons fondée sur le miracle, le mystère et l'autorité. Et les hommes se sont réjouis d'être menés comme un troupeau et délivrés enfin du don fatal qui leur avait valu tant de souffrances. Avions-nous raison d'enseigner et d'agir ainsi? Parle! N'avons-nous pas aimé l'humanité, en reconnaissant humblement sa faiblesse, en allégeant son fardeau avec amour et en pardonnant même le péché à la faible nature humaine, quand elle péchait avec notre permission? Pourquoi es-Tu venu gêner notre oeuvre? Pourquoi me regardes-Tu en silence, de Tes yeux doux et pénétrants? Indigne-Toi! Je ne veux pas de Ton amour, car moi-même je ne T'aime pas.

Pourquoi me dissimulerais-je devant Toi? Ne sais-je pas à qui je parle? Ce que j'ai à Te dire, Tu le sais d'avance, je le lis dans Tes yeux. Dois-je Te cacher notre secret? Peut-être veux-Tu l'entendre de ma bouche. Ecoute donc: nous ne sommes pas avec Toi. Nous sommes avec lui: voilà notre secret. Il y a longtemps de cela, huit siècles! Que nous ne sommes plus avec Toi, mais avec lui! Il y a huit siècles, exactement, nous avons reçu de lui ce dernier don qu'Il T'a offert. Tu l'as repoussé avec indignation lorsqu'Il te montrait tous les royaumes de la terre. Nous avons accepté, nous, de lui, Rome et le glaive de César et nous nous sommes proclamés les seuls rois de la terre, les seuls maîtres. Pourtant notre oeuvre n'est pas encore entièrement achevée à l'heure où nous sommes... Mais à qui la faute? Nous ne sommes qu'au début, mais, du moins, l'oeuvre est commencée.

Il faudra encore attendre longtemps et la terre aura beaucoup à souffrir. Mais nous atteindrons notre but, nous serons César et nous songerons alors au bonheur de tous. Toi aussi, Tu aurais pu prendre le glaive de César. Pourquoi as-Tu refusé ce dernier don? Si Tu avais suivi l'ultime conseil du puissant Esprit, tous les appétits de l'homme sur la terre, tu les aurais satisfaits: L'homme veut savoir qui adorer, il cherche un dépositaire de sa conscience, il rêve d'un système permettant à tous de s'unir, dans la concorde, en une fourmilière universelle.

Le besoin d'une communauté totale, instaurée sur la terre, voilà le troisième et le dernier tourment des hommes. Toujours l'humanité, dans son ensemble, a tendu à l'unité mondiale. Nombre de grands peuples eurent une destinée glorieuse. Plus ils étaient grands et glorieux, plus ils ont souffert, sentant plus fortement que les autres le besoin de l'union universelle. Les grands meneurs de peuples, les Tamerlan et les Gengis Khan, passèrent sur la terre comme une rafale. Ils voulaient dominer le monde, mais eux aussi, sans en avoir conscience, incarnaient cette profonde aspiration de l'humanité vers l'unité.

(à suivre)

Fiodor Dostoievski, La légende du grand inquisiteur (L'Insomniaque, 1999)

adaptation: Maximilien Rubel

08:42 Écrit par Claude Amstutz dans Contes, Littérature étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; contes; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |