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24/11/2012

Les grands pianistes 1a

Bloc-Notes, 24 novembre / Les Saules

littérature; musique classique; livres

Avec Les grands violonistes du XXe siècle / vol. 1: de Kreisler à Kremer, 1875-1947 écrit par Jean-Michel Molkhou, les éditions Buchet Chastel ont inaguré en 2011 la série Les Grands Interprètes. Une initiative à saluer dans le monde de l'édition où - exception faite d'Actes Sud et Fayard - ce domaine a plutôt rejoint les oubliettes de l'histoire.

Je vous présente ici le second titre de cette collection qui ne peut que ravir les mélomanes, sous la plume de Alain Lompech - journaliste et critique musical au Monde de la Musique et au Monde pendant plus de trente ans, aujourd'hui conseiller des programmes à la direction de France Musique - et intitulé Les grands pianistes du XXe siècle.

Pas moins de quarante-quatre pianistes sont ainsi présentés dans cet ouvrage, de Serge Rachmaninov à Catherine Collard. Comme dans le volume précédent, pour chacun d'entre eux, vous pouvez découvrir une succinte biographie de l'artiste, les caractéristiques de sa sensibilité et de son répertoire, ainsi que sa place particulière dans l'histoire de la musique. Si ce livre est tout à fait accessible aux néophytes du classique, il est aussi un incontournable livre de références pour le spécialiste, fourmillant de détails et d'anecdotes intéressantes.

Ainsi, sur Clara Haskil, Alain Lompech relève que, présentée comme une sainte du piano, elle était en réalité une femme dont la passion intérieure lui faisait prendre des risques parfois insensés. A propos de Annie Fischer, il parle d'une pianiste imprévisible, sans le moindre ego déplacé,qui dit "je" sans chercher à faire oublier qu'elle était le truchement du compositeur. Enfin, dernier exemple, celui de Catherine Collard, dont l'auteur souligne qu'il y avait dans son jeu un tel oubli d'elle-même que la pianiste laissait parler la musique sans aucune entrave et que le public en était à jamais bouleversé. 

Si tous les grands noms du piano sont au rendez-vous dans cet ouvrage, c'est une bénédiction d'en savoir davantage sur certains interprètes dont on sait peu de choses tels Guiomar Novaes, William Kapell ou Monique de La Bruchollerie. Après la rétrospective de ces artistes d'exception, il ne vous reste qu'à mettre vos oreilles à l'épreuve, au moyen des deux CD - au format MP3 - accompagnant Les grands pianistes du XXe siècle: 16 heures de musique!

Si j'ajoute que la réalisation de ce livre est extrémement soignée et que - CD inclus - il ne coûte que 23 euros, vous comprendrez qu'il ne peut que rejoindre votre bibliothèque, au plus vite!

Alain Lompech, Les grands pianistes du XXe siècle (Buchet-Chastel, 2012)

Richard Martet, Les grands chanteurs du XXe siècle (Buchet-Chastel, 2012)

Jean-Michel Molkhou, Les grands violonistes du XXe siècle / vol. 1: de Kreisler à Kremer, 1875-1947 (Buchet-Chastel, 2011)

image: Annie Fischer (bbc.co.uk)

21/11/2012

Le poème de la semaine

Jules Supervielle

Encore frissonnant 
Sous la peau des ténèbres 
Tous les matins je dois 
Recomposer un homme 
Avec tout ce mélange 
De mes jours précédents 
Et le peu qui me reste 
De mes jours à venir. 
Me voici tout entier, 
Je vais vers la fenêtre. 
Lumière de ce jour, 
Je viens du fond des temps, 
Respecte avec douceur 
Mes minutes obscures, 
Épargne encore un peu 
Ce que j’ai de nocturne, 
D’étoilé en dedans 
Et de prêt à mourir 
Sous le soleil montant 
Qui ne sait que grandir.
 
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle
 

20/11/2012

Musica présente - 40 Anne Queffélec

Anne Queffélec

pianiste française, née en 1948

*

Georg Friedrich Haendel

Suite for keyboard Vol 2, No 3 in D minor, HWV 436

 

07:46 Écrit par Claude Amstutz dans Anne Queffélec, Georg Friedrich Haendel, Musica présente, Musique classique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique classique | |  Imprimer |  Facebook | | |

19/11/2012

Morceaux choisis - Simone Weil

Simone Weil 

littérature; essai; morceaux choisis; livres

Les institutions qui déterminent le jeu de la vie publique influencent toujours dans un pays la totalité de la pensée, à cause du prestige du pouvoir. On en est arrivé à ne presque plus penser, dans aucun domaine, qu'en prenant position pour ou contre une opinion. Ensuite on cherche des arguments, selon le cas, soit pour, soit contre. C'est exactement la transposition de l'adhésion à un parti.

Comme dans les partis politiques, il y a des démocrates qui admettent plusieurs partis, de même dans le domaine des opinions les gens larges reconnaissent une valeur aux opinions avec lesquelles ils se disent en désaccord. C'est avoir complétement perdu le sens même du vrai et du faux. D'autres, ayant pris position pour une opinion, ne consentent à examiner rien qui lui soit contraire. C'est la transposition de l'esprit totalitaire.

Quand Einstein vint en France, tous les gens des milieux plus ou moins intellectuels, y compris les savants eux-mêmes, se divisèrent en deux camps, pour ou contre. Toute pensée scientifique nouvelle a dans les milieux scientifiques ses partisans et ses adversaires animés les uns et les autres, à un degré regrettable, de l'esprit de parti. Il y a d'ailleurs dans ces milieux des tendances, des coteries, à l'état plus ou moins cristallisé. Dans l'art et la littérature, c'est bien plus visible encore. Cubisme et surréalisme ont été des espèces de partis. On était gidien comme on était maurassien. Pour avoir un nom, il est utile d'être entouré d'une bande d'admirateurs animés de l'esprit de parti.

De même il n'y avait pas grande différence entre l'attachement à un parti et l'attachement à une Eglise ou bien à l'attitude antireligieuse. On était pour ou contre la croyance de Dieu, pour ou contre le christianisme, et ainsi de suite. On en est arrivé, en matière de religion, à parler de militants.

Même dans les écoles on ne sait plus stimuler autrement la pensée des enfants qu'en les invitant à prendre parti pour ou contre. On leur cite une phrase de grand auteur et on leur dit: Etes-vous d'accord ou non? Développez vos arguments. A l'examen les malheureux, devant avoir fini leur dissertation au bout de trois heures, ne peuvent passer plus de cinq minutes à se demander s'ils sont d'accord. Et il serait si facile de leur dire: Méditez ce texte et exprimez les réflexions qui vous viennent à l'esprit.

Presque partout - et même souvent pour des problèmes purement techniques - l'opération de prendre parti, de prendre position pour ou contre, s'est substituée à l'opération de la pensée.

C'est là une lèpre qui a pris origine dans les milieux politiques, et s'est étendue, à travers tout le pays, presque à la totalité de la pensée.

Il est douteux qu'on puisse remédier à cette lèpre, qui nous tue, sans commencer par la suppression des partis politiques. 

Simone Weil, Note sur la suppression générale des partis politiques (Climats, 2006)

image: La balance de la justice, Vancouver (cic.gc.ca)

17/11/2012

Livres en fête

Bloc-Notes, 17 novembre / Les Saules 

beaux-livres

A l'approche des fêtes de fin d'année, de nombreuses parutions de beaux livres fleurissent sur les tables et dans les vitrines des librairies. Si la plupart sont irréprochables sur le plan photographique - difficile de vraiment se rater avec les progrès technologiques - peu d'entre eux échappent à des sujets déjà abondamment traités par le passé, ou n'offrent qu'un intérêt temporaire par la banalité des textes qui les accompagnent. Toutefois, quatre livres d'art méritent en 2012, une distinction particulière, et cela pour des raisons bien différentes selon l'ouvrage choisi: 

Six siècles d'art du livre - De l'incunable au livre d'artiste  rassemble, sous la plume de Pascal Fulacher - conservateur du Musée des lettres et manuscrits, rédacteur en chef de Plume, magazine du patrimoine écrit - toute l'histoire du livre du Moyen-Age à nos jours, en passant par les incunables, les livres d'heures, les courants esthétiques et la typographie, le culte de l'image dans l'édition, l'art de la reliure, le livre-objet des artistes contemporains. Il règne dans cet ouvrage un magnifique équilibre entre le texte, l'illustration, les encarts, la qualité des reproductions et l'impression. Si vous êtes des amoureux du livre - ou si certains de vos amis le sont - voici en rapport à ce qui précède et au prix, le choix le plus intéressant!

Dans une toute autre perspective, En chemin vers la beauté, écrit par Michel Lonsdale, ravira tous les amoureux de l'art et de la spiritualité à travers ces trésors de sa vie que représentent des peintures, des images, des photographies, des rencontres, des symboles. Comme dans son précédent livre, L'amour sauvera le monde - évoqué dans ces colonnes l'an dernier - on touche avec ce grand acteur et cet homme discret, profond, terriblement attachant, à l'universalité du questionnement et des aspects de la beauté du monde, même quand il y parle de lui-même: Tout objet de beauté est une joie éternelle: le charme en croît sans cesse; jamais il ne glissera dans le néant, mais sera toujours pour nous un paisible abri, un sommeil habité de doux songes, de santé, et de paisibles respirs. John Keats, extrait de Endymion, cité en préambule par l'auteur. Une lecture épanouissante et libératrice!

Retour aux beaux-arts avec l'ouvrage de Anne Sefrioni, éditrrice spécialisée dans le domaine du livre d'art. S'il est un thème omniprésent - alternant le meilleur et le pire - c'est bien l'impressionnisme. Et pourtant, l'innovation est là encore au rendez-vous avec cet auteur qui nous fait découvrir ces Eventails impressionnistes qui, de Renoir à Degas, de Pissarro à Gauguin, ne sont guère connus que des passionnés de la peinture, et encore... Dans la première partie de ce livre, Anne Sefrioni nous présente l'histoire de l'éventail avant cette période et le conclut avec ceux qui ont suivi: Maurice Denis, Henri de Toulouse-Lautrec, Pierre Bonnard et Oscar Kokoschka. De merveilleux rêves sur papier!

Enfin, le chef d'oeuvre par l'objet en lui-même - avec malheureusement un prix correspondant à sa qualité! - Le Cantique des oiseaux - Illustré par la peinture en Islam d'Orient, reprend pour la première fois l'intégralité du texte de Attâr - poète mystique persan du XIIe siècle - dans une traduction versifiée par Leili Anvar, assortie de commentaires iconographiques de Michael Barry. Les autres versions disponibles du texte sont toutes fragmentaires ou - c'est le cas de la plus célèbre adaptée par Henri Gougaud - tronquées. Si vous maîtrisez l'art de la séduction, faites-le vous offrir: il ne quittera  jamais votre bibliothèque, j'en fais le pari...     

Pascal Fulacher, Six siècles d'art du livre - De l'incunable au livre d'artiste, 39 € (Citadelles,/Mazenod, 2012)

Michael Lonsdale, En chemin vers la beauté, - Les trésors de ma vie, 30 € (Philippe Rey, 2012)

Anne Sefrioni, Eventails impressionnistes, 65 € (Citadelles/Mazenod, 2012)

Attâr, Le Cantique des oiseaux - Illustré par la peinture en Islam d'Orient , 195 € (Diane de Selliers, 2012)

beaux-livres

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beaux-livres


05:11 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Littérature étrangère, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : beaux-livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

14/11/2012

Le poème de la semaine

Guillaume Apollinaire

Automne malade et adoré
Tu mourras quand l’ouragan soufflera dans les roseraies
Quand il aura neigé
Dans les vergers
 
Pauvre automne
Meurs en blancheur et en richesse
De neige et de fruits mûrs
Au fond du ciel
Des éperviers planent
Sur les nixes nicettes aux cheveux verts et naines
Qui n’ont jamais aimé
 
Aux lisières lointaines
Les cerfs ont bramé
 
Et que j’aime ô saison que j’aime tes rumeurs
Les fruits tombant sans qu’on les cueille
Le vent et la forêt qui pleurent
Toutes leurs larmes en automne feuille à feuille
Les feuilles
Qu’on foule
Un train
Qui roule
La vie
S’écoule
 
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

07:39 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

13/11/2012

Morceaux choisis - Jacques Audiberti

Jacques Audiberti

littérature; roman; morceaux choisis; livres

Au tennis, Hermine rencontrera Roger. Roger a des cheveux si blonds qu'ils en sont verts. Elle a toujours envie de penser que cette couleur de cheveux dépend du prénom même de Roger. Roger, hier, enfin, a voulu l'embrasser. Elle a refusé. Mais, ce soir, ils dîneront ensemble. Ils iront ensuite au cinéma. Pour mieux refuser, elle s'est appuyée sur Bernard. Sur le souvenir de Bernard. Bernard, sous prétexte qu'on s'était embrassé, avait demandé le corps tout entier. Au fond, il avait raison. Qu'est-ce que ça veut dire, se prêter, se reprendre? On va jusqu'au bout, quand on en a dans le ventre. Les femmes d'ailleurs, de plus en plus, vont jusqu'au bout. Jusqu'au bout de leur volupté, peut-être, mais d'abord, de leur loyauté. Il devient très difficile de plaider, même contre soi, c'est-à-dire devant sa propre intelligence, pour la vieille morale.

Pourtant, ils sont embêtants, les types, sans cesse à vous obséder de leur désir, à vous souffler sur la nuque, à vous suer dans les flancs, à vous rappeler que vous êtes chair, et chienne, et vermine, et poussière. Et quand ils ont l'air de ne songer qu'à la voiture, à la danse, de rester froid devant les femmes, ils sont encore plus déplaisants, la tunique du désintéressement érotique finissant toujours par tomber, crrrac! malgré tant de fraternités sportives, et bien qu'on se le fasse à l'androgyne, en se tutoyant, tu! tu! tu! en s'appelant ma poule, ma grosse, mon rat, mon amour...

Pour l'instant, Roger, ça tient. Il aura le casino. Il aura les machines à coudre. Le casino, les machines à coudre, on s'en tamponnerait, bien sûr, si le garçon appartenait au genre pou, mais le garçon n'appartenant pas au genre pou, il serait absurde de prétendre qu'on les perd complètement de vue. Roger, dans l'ensemble, n'a rien de plus que Bernard, sauf, précisément, ce qu'il a de plus, le casino, les machines. 

Elle a réfléchi. Elle se flatte d'avoir pris, dans l'ensemble, une vue, sinon complète, du moins suffisante, de l'état social du monde humain. Elle voit peu à peu comment ça se présente, les affaires, la politique, les moeurs. Elle sait ce que c'est, une grosse fortune, et ce qu'on peut en attendre, et ce qu'on peut en redouter.

Hermine ne songe pas à se marier. Elle ne songe pas non plus à ne pas se marier. Elle a vingt-quatre ans. Se marier, en principe, elle n'y tient pas. La liberté apparaît la plus sûre joie du monde, la marraine des oeuvres fortes, la règle des patrons. Mais exiger la liberté, choisir, dans tous les cas, la liberté, c'est accepter une tyrannie, celle de la liberté, ou de l'idée fixe de la liberté. Le mariage apporte un contentement sentimental. Il permet, en outre, de faire un sacrifice notable à l'esprit de soumission. Par là, il autorise, en masse, partout, et jusqu'au-dedans de lui-même, le déchaînement, l'épanouissement de toute liberté.

Une fille peut fort bien contourner le mariage, surtout quand elle dispose d'un père comme le sien, aussi ouvert, bonhomme, et qui gagne de l'argent. Mais le mariage, si l'on évite, aussi bien, de trop épouser qui l'on épouse, de prétendre vivre pour l'amour d'un homme et de son amour, le mariage n'est pas forcément un cataclysme.

Avec Roger, ce soir, au ciné, saurai-je tenir bon, quand il me fera passer, de nouveau, sur les bras, sur le cou, des courants d'air, des courants, plutôt, d'épiderme, à peine sensibles, qui s'épaississent on ne sait comment, qui deviennent des doigts, des bras, sans qu'il soit permis de protester, sinon trop tard, ou trop tôt, et, de toute façon, toujours bêtement, le cinéma étant fait, d'abord, pour le pelotage?

Roger ne m'emballe pas mais il ne me dégoûte pas. Qu'il soit si riche, ça m'amuse. Je ne peux continuer à mariner dans la virginité. Et je dois bien convenir que, parce que je suis maniaque, ou superstitieuse (dans le cas où le mariage ne serait qu'un témoignage des anciennes coutumes) je n'aurai des enfants que d'un mari. De préférence le mien. 

Jacques Audiberti, Monorail (Gallimard, 1964)

image: Jacques-Henri Lartigue, Florette à la mantille (episodesandaccidents.tumblr.com)

00:13 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; morceaux choisis; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

12/11/2012

Musica présente - 39 Fabio Biondi

Fabio Biondi

violoniste et chef d'orchestre italien, né en 1961

*

Giovanni Battista Pergolesi: Salve Regina in La minore

Leonardo Leo: Salve Regina in do maggiore

(Barbara Schlick, L'Europe Galante: Fabrizio Cipriani, Robert Ferrentino Brown, Maurizio Naddeo, Rinaldo Alessandrini, Pascal Monteilhet)


 

07:12 Écrit par Claude Amstutz dans Musica présente, Musique classique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique classique | |  Imprimer |  Facebook | | |

11/11/2012

Lire les classiques - Odilon-Jean Périer

Odilon-Jean Périer

PB200213.JPG

Ecoutez-moi si vous m'aimez:
Je suis sauvé lorsque je chante; 
Et toi, surtout, que j'ai formé 
De ma plus douce voix vivante:
Tes beaux cheveux bien éclairés 
Comme le feu dans la poussière 
Te font pareil aux oliviers, 
Tes mains connaissent un mystère 
Dont il reste de l'or aux doigts... 
Si tu es dieu, révèle-toi.
 
Garde ton sang, bouche mordue, 
J'y vois la trace de ton coeur:
Sur la voie que tu as perdue 
Je t'ai suivi comme un chasseur.
 
Es-tu cette étoile sauvage? 
Je te salue, ô visiteur, 
Dans la lumière et la douleur, 
Visage doux comme une plage 
Usée, habituée aux vagues... 
Tu es l'amour aux mains profondes:
Partageons ce pain et ce sel...
 
Salut, dans le milieu du monde, 
Salut à mon ami mortel.
 
Puis-je mourir, quelle folie! 
N'entends-tu pas ma poésie 
Et ce coeur battre, ô bouche d'or? 
Je suis le berger de ces ombres 
Et le principe de ces choses 
Ayant fait oeuvre de mon corps 
Je suis vainqueur, il se repose, 
Et je retourne à mes trésors.
 
Homme enfermé, l'orgueil t'égare 
Libre et vivant, devant un mur. 
Accorde-moi ce corps avare, 
Ne sois, enfin, qu'un esprit pur.
 
Amour, ce serait par faiblesse...
 
Mais, par faiblesse, sois heureux.
 
Laisse ces ruses sans noblesse 
J'ai vu la flamme dans tes yeux... 
Alors, il me prend par la tête, 
Porte la nuit dans mes fénêtres, 
Porte sur moi son souffle ardent, 
Par les genoux brise ma force 
Et, comme un cheval qui s'emporte, 
Jette ses cheveux dans le vent...
 
Je suis seul. Je serre les dents.
 
Plus tard, un soir comme les autres, 
La poésie monte et se pose, 
L'eau merveilleuse monte en moi, 
Le dieu se pose dans ma chambre, 
Tout est changé, c'est que je chante:
Amour, entendez-vous ma voix?
Mais le Démon n'écoute pas, 
Il pleure dans ses mains profondes...
 
Les poètes sont seuls au monde.
 

Odilon-Jean-Périer, Ecoutez si vous m'aimez, dans: Poèmes (Labor, 2005)

image: Bruxelles (endroits.blogspot.com)

09:44 Écrit par Claude Amstutz dans Lire les classiques, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie; anthologie; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

10/11/2012

Morceaux choisis - Georges Bernanos 1b

Georges Bernanos

Voici la bande-annonce du film de Robert Bresson, Le journal d'un curé de campagne, d'après le roman de Georges Bernanos et réalisé en 1950, avec Claude Laydu, Adrien Borel, Marie-Monique Arkell, Nicole Ladmiral, Jean Riveyre, Nicole Maurey, Antoine Balpêtré et Martine Lemaire.


Georges Bernanos, Journal d'un curé de campagne (coll. Livre de poche/LGF, 1975)

07:59 Écrit par Claude Amstutz dans Films inoubliables, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; cinéma; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |