04/12/2012
Au bar à Jules - Du Zéro 1b
Un abécédaire - Z comme Zéro
Voici une scène emblématique du film de Jean Vigo, Zéro de conduite, réalisé en 1933, avec Jean Dasté. En 1968 lui répondra le film de Lindsay Anderson, If..., avec Malcolm McDowell, que vous pouvez découvrir dans le second extrait. If... est disponible dans son intégralité sur YouTube.
09:08 Écrit par Claude Amstutz dans Au bar à Jules - Un abécédaire 2012, Films inoubliables, Le monde comme il va | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : films | | Imprimer | Facebook |
Au bar à Jules - Du Zéro 1a
Un abécédaire - Z comme Zéro
Plus jeune, j'ai toujours prétendu que si j'emporterais le gros lot de la Loterie Romande, j'ouvrirais une librairie: avec pour nom Zéro de conduite. Allusion au film de Jean Vigo, réalisé en 1933 - interdit jusqu'en 1945 - avec pour interprète principal Jean Dasté: une oeuvre subversive, largement autobiographique où le monde des adultes et les représentations du pouvoir qui l'accompagne, sont mis en pièces avec une férocité terriblement imaginative, drôle et grinçante à la fois.
Je n'ai, bien sûr, pas gagné le jackpot et mon projet ne s'est pas concrétisé! En 2009, lors de la création de mon blog, j'ai pensé réaliser ce rêve de jeunesse en empruntant le nom de Zéro de conduite. Peine perdue, car ce titre est protégé par copyright... Signe du destin? Certainement une intuition heureuse, car les multiples développements sur ces pages n'auraient pas tous correspondu à cette appellation jaillie de ma mémoire d'adolescent qui, depuis lors, a emprunté au gré de flux et de reflux successifs, des voies bien différentes.
Ainsi est née La scie rêveuse - titre d'un poème de René Char - qui n'a toutefois pas effacé le Zéro de conduite, dont subsiste la rébellion envers l'autorité, les rassemblements et les drapeaux de toutes sortes. Ce qui me fait dire, avec un large sourire malicieux, que si j'avais suvi mes appels à la vocation religieuse - à deux reprises, cette orientation a failli voir le jour: auprès des trappistes et des carmes - je n'aurais pas connu de difficultés insurmontables avec les deux premiers voeux: la pauvreté et la chasteté. En revanche, avec le troisième - l'obéissance - j'aurais été recalé, sans l'ombre d'un doute! Ouf?
Un autre coup de pouce du destin a ainsi voulu que je demeure dans l'univers merveilleux des livres - lui aussi rebelle au conformisme ambiant - qui, sans regrets, m'a valu des rencontres et amitiés hors du commun ainsi qu'une appréhension étonnante et insolite du monde sensible. Un cadeau de la vie inappréciable, reçu, partagé et transmis à ce jour avec une infinie gratitude...
image 1: Jean Vigo, Zéro de conduite / 1933 (gaumont.fr)
image 2: Pierre-Henri Benoit, René Char (rfi.fr)
09:07 Écrit par Claude Amstutz dans Au bar à Jules - Un abécédaire 2012, Films inoubliables, Le monde comme il va, René Char | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : films | | Imprimer | Facebook |
03/12/2012
Henning Mankell
Henning Mankell, Le retour du professeur de danse (Seuil, 2006)
Décembre 1945. Dans l'Allemagne vaincue, un passager solitaire descend d'un avion militaire britannique et se rend à la prison de Hameln. Là, il procède à la pendaison de criminels de guerre nazis. Mais l'un d'eux a échappé à son sort. Octobre 1999, dans le nord de la Suède, Herbert Molin, un policier à la retraite, est torturé à mort. Dans sa maison isolée, les empreintes sur le parquet semblent indiquer que le tueur a esquissé un tango sanglant avec sa victime...
Revoici le grand Henning Mankell qui se démarque de ses précédentes intrigues policières, c’est-à-dire sans son héros fétiche, Kurt Wallander. Dans les arcanes de la peste brune apparaît un nouveau policier complexe et attachant, Stefan Lindman, âgé de 37 ans, atteint d’un cancer et confronté à son propre passé. Une réussite!
Egalement disponible en coll. Points (Seuil, 2008)
08:29 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Littérature policière | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature: roman; livres | | Imprimer | Facebook |
01/12/2012
Morceaux choisis - Addellatif Laâbi
Abdellatif Laâbi
L'encre s'amenuisemais la mer est à l'horizonQu'est la mersinon l'encre du cielque les terres émergéesn'ont pas su retenirNos écritures s'en vont Elles coulent et vont se fondredans la houleDe cette houlenous gardons une vague mémoireavec comme un grain lumineuxde connaissance inaltérableLes mains vides ou pleinesnous retournons à l'eauA la terreau cielpeu importeLe labyrinthe de l'espritest notre seul cheminune voie de salutque nous nous accordons à nous-mêmesTant mieux si quelqu'un nous entendTant pis si l'échoest happé par un trou noirNous ne sommes que des pélerinsignorants des foires et des templesrecueillant dans le désertet jusqu'au sommet des gratte-ciella rosée invisiblede l'innocenceet des âmes en souffrance
Abdellatif Laâbi, Ecris la vie, dans: Oeuvre poétique vol. 2 (La Différence, 2010)
image: lejardindenatiora.wordpress.com
06:42 Écrit par Claude Amstutz dans Abdellatif Laâbi, Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie; anthologie; livres | | Imprimer | Facebook |
28/11/2012
Le poème de la semaine
Jean-Pierre Siméon
Malgré la pluie et le coeur exposénous allonsplus hautplus voyageursmoi dans l'appeltoi dans le soleil qui lui répond Nos joies nous escortentplus loin que les routeset le malheur rusé des hommes Soudain ma paroleest un mur dont tu es le jardin Parcourons encore contre l'usageet contre ceux qui dormentsous un ciel trop éteintcherchons l'autre patrie Il est des nuits non civiliséespour la hâte des lèvreset la vigueur des parfums Eveille-toi avant les larmestu sais que ta main est sauve Je dis pierrepour que vous lisiez le mot pierrepour que vous entendiez le mot pierremais aussi cette choseen dessousqui a à voir avec votre enfance- l'été la rivière - mais aussi un amour peut-êtredébâti par le ventou bien ce murqui fait le bord vertigineuxdu vide Et je dis homme ton orageserré dans le poing Et si je cherche à genoux dans le gravier des métaphoresle nom qui nous rendà la beauté des corpsc'est que nul n'a assez de peaupour éprouver l'airque fait le mouvementdu jour Enfin je dis que j'aimepour que le monde paraissedans l'effort qu'accomplit le sangdans mes veines Quelques traces de craie dans le ciel,Anthologie poétique francophone du XXe siècle
11:21 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |
Musica présente - 41 Maurizio Pollini
Maurizio Pollini
pianiste italien, né en 1942
*
Franz Schubert
Drei Klavierstücke, D 946
pour Charline K
09:28 Écrit par Claude Amstutz dans Franz Schubert, Musica présente, Musique classique, Rosebud | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique classique | | Imprimer | Facebook |
26/11/2012
Lire les classiques - François de Malherbe
François de Malherbe
Beauté, mon beau souci, de qui l’âme incertaineA, comme l’Océan, son flux et son reflux,Pensez de vous résoudre à soulager ma peine,Ou je me vais résoudre à ne le souffrir plus. Vos yeux ont des appas que j’aime et que je prise,Et qui peuvent beaucoup dessus ma liberté;Mais pour me retenir, s’ils font cas de ma prise,Il leur faut de l’amour autant que de beauté. Quand je pense être au point que cela s’accomplisseQuelque excuse toujours en empêche l’effet;C’est la toile sans fin de la femme d’Ulysse,Dont l’ouvrage du soir au matin se défait. Madame, avisez-y, vous perdez votre gloireDe me l’avoir promis, et vous rire de moi;S’il ne vous en souvient, vous manquez de mémoire,Et s’il vous en souvient, vous n’avez point de foi. J’avais toujours fait compte, aimant chose si haute,De ne m’en séparer qu’avecque le trépas;S’il arrive autrement, ce sera votre fauteDe faire des serments et ne les tenir pas.
François de Malherbe, Poésies (coll. Poésie/Gallimard, 1997)
image: Frank Bernard Dicksee, Contemplation / 1897 (galerie-creation.com)
01:09 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie; anthologie; livres | | Imprimer | Facebook |
Daniel Fazan
Bloc-Notes, 26 novembre / Les Saules
Paul est vigneron, quelque part dans le Dézaley vaudois. Depuis de nombreuses années, il ne supporte plus sa femme Roberte qui a coupé les sarments de sa tendresse, porte le phylloxéra du couple et se défoule avec des mots assassins pour oublier qu'elle n'a plus sa place auprès de lui, rageant de savoir qu'elle ne trouvera plus chaussure à son pied, ailleurs, selon toute vraissemblance. Délaissée, Roberte? Plutôt deux fois qu'une puisque Paul refait sa vie avec... Roger, un vigneron comme lui, qui a des mots rares, jolis comme un coquelicot d'octobre quand on ne l'attend pas au pied d'un cep.
Et tandis que Roberte déverse ses rancoeurs auprès du pasteur Borda - dont la rumeur populaire dit que le fils partagerait la même ambiguïté que son mari -, Paul se raconte à Madame - sa psy -, lui parle de Roger, de sa noblesse terrienne d'aristocrate, de ses silences qui laissent pousser la vie, de sa beauté comme la vendange du siècle. L'alcool - une pause dans la cruauté ambiante d'une Roberte qu'il préfère floue - est aussi au programme de Paul qui compte bien réussir sa cure de désintoxication et se contenter de fantasmer sur un nettoyage des dents au chasselas, pas avalé, un peu comme le dentrifice!
Beaucoup d'humour, donc, dans ce Millésime, mais comme dans son précédent récit Vacarme d'automne, Daniel Fazan règle ses comptes avec l'hypocrisie, le conformisme et la médiocrité. Le décor s'y prête et parmi ses plus belles pages figurent celles consacrées au village de Paul, perché au milieu des vignes: Les maisons se sont agrippées les unes aux autres dans l'impossibilité de prendre de la distance. Il n'y en a pas. Cette communauté est jalouse de tout, des autres, de ses avoirs en plus. Chaque cep est connu de tous, chaque mètre vaut son pesant de bouteilles. On n'a plus besoin de policer qui que ce soit, la police locale c'est chaque habitant qui l'incarne. (...) Ici on économise tout, surtout les mots.
Provocateur avec ce sujet délicat de l'homosexualité rurale et de l'alcoolisme, Daniel Fazan sait à merveille réveiller sa tendresse d'insoumis et son amour des beautés qui l'environnent à travers ce roman dont le personnage principal est, bien sûr, la vigne: Une vigne, c'est une image vivante et souvent arrêtée. Et ce ciel jamais lassé de se regarder dans l'eau, cette eau jamais agacée par ces nuages qui font les malins. Cette eau que remuent les vents pour en mélanger tout le mystère. Les poètes ont marché sur ma terre, les musiciens ont joué ce spectacle, à lui seul un opéra silencieux.
Ailleurs, Paul médite sur ce plus bel endroit du monde: Je suis fragilisé par l'étreinte, presque mortifère du paysage protégé, étroit comme une image cernée par une fenêtre de la dimension d'une meurtrière de château-fort qui regarde l'espace sublime et changeant d'un lac capricieux et solitaire, parfois morne, proche de l'ennui. Je me sens prisonnier de mes devoirs, de mes voisins, des avis saturés d'incompréhension alors que j'aspire à la tendresse.
Et cette tendresse, Paul la trouvera auprès de Roger, et la scellera avec cette force de vie qui devrait lui permettre, un jour, de bien mourir... Millésime est une lecture tonique et pétillante, comme cette vigne sur laquelle baigne parfois une lumière cruelle, mais qui répand de même sur nous une brise légère qui parle d'amour et incline à la bonne humeur!
Daniel Fazan, Millésime (Olivier Morattel, 2012)
Daniel Fazan, Vacarme d'automne (Olivier Morattel, 2011)
image: Daniel Fazan (rts.ch)
00:35 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Littérature francophone, Littérature suisse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | | Imprimer | Facebook |
25/11/2012
Morceaux choisis - François Mauriac
François Mauriac
J'ai toujours eu horreur des neurasthéniques; le retour à Paris me fut donc cette année-là une délivrance. Je n'échangeai plus avec ma belle-mère que quelques billets indifférents. Michèle, qui attendait pour se marier que Jean eût achevé ses deux années de service, habitait toujours cours de l'Intendance. Elle faisait allusion, dans ses lettres, à une histoire incroyable de Brigitte, mais se réservait de me la raconter de vive voix lors d'un séjour qu'elle allait faire à Paris, chez les La Mirandieuzé.
Histoire incroyable, en effet, au poit que d'abord je haussai les épaules. Que ma belle-mère fût devenue amoureuse, et de son médecin qui avait passé la soixantaine, je ne vis là qu'une imagination de Michèle; mais à Bordeaux, il fallut me rendre à l'évidence. Il ne s'agissait pas de l'attachement d'une vieille femme malade à l'homme qui la soigne, mais d'une passion farouche, exclusive, et (c'était là sans doute le plus étrange) heureuse, comblée. Non, bien entendu, qu'il se passât rien entre eux de répréhensible: le docteur Gellis, huguenot fervent et qui avait pour clients toute la haute société protestante de la ville, était au-dessus des soupçons; mais, séparé d'une femme qui l'avait autrefois couvert de honte, en butte aux exigences de nombreux enfants dont la plupart étaient mariés, besogneux et âpres, il découvrait avec délices, au déclin de sa vie, le bonheur d'être devenu l'unique pensée d'une créature plus forte, mieux armée qu'il ne l'était lui-même; il la voyait chaque jour, ne décidait rien sans son avis. Nulle pudeur n'atténuait, chez ces deux solitaires, l'expression verbale de leur attachement, ni non plus le moindre sentiment du ridicule. Aucun des deux ne discernait un vieillard dans le visage baigné de tendresse qui se penchait vers le sien. Ils vivaient l'un pour l'autre, comme deux innocents, au milieu de leurs familles irritées et moqueuses et de la ville chuchotante.
François Mauriac, La pharisienne (coll. Livre de poche/LGF, 1972)
image: Maison de François Mauriac, Malagar (dipity.com)
00:15 Écrit par Claude Amstutz dans François Mauriac, Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; morceaux choisis; livres | | Imprimer | Facebook |
24/11/2012
Les grands pianistes 1b
Bloc-Notes, 24 novembre / Les Saules
En complément à cette présentation du livre de Alain Lompech, Les grands pianistes du XXe siècle, voici, pour le plaisir, Monique de La Bruchollerie, qui interprète ici le 2e mouvement - lento - de la Sonate pour piano de Henri Dutilleux...
Alain Lompech, Les grands pianistes du XXe siècle (Buchet-Chastel, 2012)
16:15 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Musique classique | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : musique classique | | Imprimer | Facebook |