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22/06/2012

Prix Edelweiss 2012

Prix Edelweiss 2012 - Première sélection

Editorial de Joëlle Brack, Payot Libraire (extrait)

edelweiss-2012.jpg

Lancé en 2007 à l’initiative du magazine féminin romand Edelweiss avec Payot Libraire pour partenaire, le Prix des Lectrices Edelweiss a immédiatement gagné ses lettres de noblesse! 

D’un côté, dix femmes, lectrices du magazine Edelweiss mais de bien d’autres choses aussi, qui ont proposé de mettre leur été - voire un peu plus - de lectures à la disposition de la littérature. De l’autre, dix romans francophones parus au premier semestre 2012, que cinq libraires Payot ont (é)lus pour faire partie de la première vague de sélection. Entre eux, Laurence Desbordes, rédactrice en chef d’Edelweiss, et Pascal Vandenberghe, directeur général de Payot Libraire, qui arbitrent les choix et les débats. 

Le schéma a beau rester le même – et Payot Libraire est partenaire de l’aventure depuis la première heure – l’excitation est chaque fois renouvelée, les curiosités affûtées à neuf, la soif de découverte et la disponibilité à la séduction du texte intactes! Et cet enthousiasme n’est pas de trop pour aborder ces centaines de pages aux styles divers, aux thèmes variés, aux sensibilités multiples… Un kaléidoscope littéraire à savourer pour les jurées Edelweiss en pro de la lecture et de la critique, tandis que les libraires Payot traquent déjà parmi les promesses de la Rentrée les sept nouveautés qui, dès le mois d’août, complèteront le choix des candidats au Prix des Lectrices 2012!

Première sélection

Emmanuel Arnaud, Le théorème de Kropst (Métailié)

Delphine Bertholon, Grâce (Lattès)

Caroline Boidé, Les impurs (Serge Safran)

Yasmine Char, Le palais des autres jours (Gallimard)

Caroline de Bodinat, Marâtre (Fayard)

Kéthévane Davrichewy, Les séparées (Sabine Wespieser)

Grégoire Delacourt, La liste de mes envies (Lattès)

Raphaël Jérusalmy, Sauver Mozart - Le journal d'Otto J. Steiner (Actes Sud)

Sabri Louatah, Les sauvages (Flammarion)

Marc Michel-Amadry, Deux zèbres sur la 30e Rue (Héloïse d'Ormesson)

Au cours des éditions précédentes, ont été couronnés: Olivier Adam, A l'abri de rien (L'Olivier, 2007); Claudie Gallay, Les déferlantes (Rouergue, 2008); Véronique Ovaldé, Ce que je sais de Vera Candida (Olivier, 2009); Fatou Diome, Celles qui attendent (Flammarion, 2010); Tonino Benacquista, Homo Erectus (Gallimard, 2011).

Vous pouvez retrouver l'ensemble des présentations de ce prix littéraire Edelweiss, sur le site Payot mentionné ci-dessous.

http://www.payot.ch/fr/nosLivres/selections/edelweiss.html

http://www.edelweissmag.ch 

16:34 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Littérature suisse | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; romans; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

21/06/2012

Morceaux choisis - Octavio Paz

Octavio Paz

A l'ombre FB.jpg

Dans mon front a poussé un arbre.
Il a poussé au-dedans.
Ses racines sont des veines,
des nerfs ses branches,
ses feuillages confus des pensées.
Tes regards l’enflamment
et ses fruits d’ombres
sont orange de sang,
grenades de lumière.

Le jour se lève
dans la nuit du corps.
Là au-dedans, dans mon front,
l’arbre parle.
Approche, tu l’entends?
 

Octavio Paz, L'arbre parle (Gallimard, 1990)

traduit de l'espagnol par Frédéric Magne

image: photograff.blogspot.com

08:58 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature sud-américaine, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie; anthologie; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

Musica présente 17 - Valentina Lisitsa

Valentina Lisitsa

pianiste ukrainienne, née en 1973

*

Serge Rachmaninov

6 Moments Musicaux, Op 16 


03:33 Écrit par Claude Amstutz dans Serge Rachmaninov, Valentina Lisitsa | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Imprimer |  Facebook | | |

John Burnside

9782864246367.gifJohn Burnside, Les empreintes du diable (Métailié, 2008)

 

Hanté par un drame qui s’est déroulé au cours de son enfance, Michael n’a jamais quitté le petit village de pêcheurs de Coldhaven, dont il est raconté que le diable a laissé la trace de ses pas dans la neige, une nuit d’hiver. Un voyage intérieur sur lequel planent peurs, culpabilités et folies, avec pour toile de fond la jeune Hazel dont la présence auprès de Michael cache peut-être un secret aussi crépusculaire que la beauté terrifiante des paysages évoqués au fil de ce récit d’une vie sensible et ordinaire.

02:49 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

20/06/2012

Au bar à Jules - Du hasard

Un abécédaire - H comme hasard

Sophie Delaporte 2.jpg

Alors que j'étais un jeune premier plutôt décalé, le propos de Jacques Monod - célèbre biologiste, professeur et directeur du Collège de France - concluant son ouvrage Le hasard et la nécessité, a longtemps voyagé dans ma tête, tel un météore qui refuserait obstinément de s'écraser sur la terre: L’ancienne alliance est rompue ; l’homme sait enfin qu’il est seul dans l’immensité indifférente de l’Univers, d’où il a émergé par hasard. Non plus que son destin, son devoir n’est écrit nulle part. A lui de choisir entre le royaume et les ténèbres.

Il est vrai que le hasard - ou la chance? - a marqué bon nombre d'épisodes de ma vie: une armoire en bois massif qui s'est abattue dans mon dos à l'âge de neuf ans - à la suite d'un balancement suspect à l'une de ses portes - sans autres séquelles qu'une dent cassée; un choc frontal en scooter avec une Mercedes toute neuve à la descente du Salève, vingt ans plus tard, qui me vit atterir indemne dans un champ; enfin une rencontre de plein fouet, en piéton distrait, avec un tramway de la ligne 12 à Genève qui m'a projetté sur le trottoir - détail cocasse - devant une pharmacie du quartier de Plainpalais avec là aussi, une veine éclatée, spectaculaire mais sans danger! A trois reprises donc, j'en conclus que mon heure n'était pas encore venue, l'ayant ardemment souhaitée à l'époque des culottes courtes, et soudain réjoui de jouer les prolongations.

De quoi m'interroger tout de même. Au mot de hasard, je préfère sans doute aujourd'hui celui de providence, au sens le plus large du terme: cet étrange globe qu'on nomme le monde et qui, entre des mains parfois inconnues ou mystérieures, semble gouverner la vie... Le destin, ce mystère de la survie que tant de sans nom ont vécu - par une situation traumatisante, un accident de la route, un deuil ou pire - sans forger davantage de réponses que je ne le puis.

Demain, un autre hasard - par une cellule devenue folle et se multipliant en quelques secondes - me signifiera peut-être qu'il est temps. Et alors? La belle affaire... Tant que l'oeil s'accroche aux beautés du moment présent, tant que la douleur physique est aux abonnés absents, tant que les amitiés vraies supplantent les doléances les plus mesquines, tant que l'espérance et l'insurrection l'emportent sur le cynisme, chaque jour qui passe est un bal de lumière plutôt qu'une leçon de ténèbres. En compagnie de ce proche et insaisissable ami dont parle Blaise Pascal: Votre béatitude? Pesons le gain et la perte, en prenant croix que Dieu est. Estimons ces deux cas: si vous gagnez, vous gagnez tout; si vous perdez, vous ne perdez rien. Gagez donc qu'il est, sans hésiter.

Pari tenu! 

Jean Monod, Le hasard et la nécessité (coll. Points Essais/Seuil, 1973)

Blaise Pascal, Les pensées (coll. GF/Flammarion, 2006)

image: Sophie Delaporte (http://www.sophiedelaporte.com)

Le poème de la semaine

René-Guy Cadou

Je ne crois pas en les miracles de Lourdes
Je crois dans une belle journée
Avec des ramasseuses de colchiques
Et des jeunes gens égayés
Car Dieu sur la montagne est bien près de me plaire
Qui dans la double écuelle de ses mains

Assaisonne la soupe noire de la terre

D'un peu de sel puisé dans les yeux du matin

 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

08:03 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

19/06/2012

Morceaux choisis - Vlada Urosevic

Vlada Urosevic

Edvard Münch.jpg

Elle se rêve au mileu d'une salle vide,
Fenêtres obscurcies par des étoffes noires.
Des tubes au néon s'allument tout autour
Leur lumière est blanchâtre et trouble.
 
Elle s'aperçoit qu'elle n'a pas de vêtement.
Des papillons de nuit l'effleurent
de leurs antennes.
Soudain l'étreinte de deux mains de pierre
l'emprisonne.
Des doigts de marbre
commencent à la caresser.
 
Un cri, alors, de ses lèvres jaillit.
A cet instant, très loin,
regard fixe, muettes, 
Frissonnent de passion,
sans que nul ne les voie,
Les statues d'hommes dans les musées obscurs.
 

Vlado Urosevic, dans: Les poètes de la Méditerrannée - Anthologie (coll. Poésie/Gallimard, 2010)

traduit du macédonien par jeanne Angélowski

image: Edvard Munch, Madone / fragment (1894)

19:36 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie; anthologie; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

Morceaux choisis - Luis de Camoës

Luis de Camoës

Sandro Botticelli.jpg

Amour est feu qui brûle et que l'on ne voit pas,
C'est blessure cuisante et que l'on ne sent pas,
Ravissement qui ne sait pas ravir,
Folle douleur qui ne fait pas souffrir.
 
C'est ne plus désirer qu'un seul désir,
C'est marcher solitaire dans la foule,
Jamais n'avoir plaisir à un plaisir,
Penser qu'on gagne alors qu'on se perd.
 
C'est librement vouloir être captif,
C'est servir sa conquête alors qu'on est vainqueur,
Garder sa loyauté à qui nous tue.
 
Mais comment ses faveurs font-elles naître
Une amitié entre les coeurs humains,
Si Amour à ce point se contrarie lui-même?
 

Luis de Camoës, Sonnets (Chandeigne, 2011)

traduit du portugais par Anne-Marie Quint et Maryvonne Boudoy

image: Sandro Botticelli / La naissance de Vénus

00:08 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie; anthologie; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

18/06/2012

Jean-Denis Bredin

littérature; récit; livresJean-Denis Bredin, Trop bien élevé (Coll. Livre de poche, 2009)

A travers le regard d’un enfant de dix ans, Jean-Denis Bredin raconte sa propre histoire entre 1939 et 1945 : la mort prématurée de son père, ses camarades dont il cherche les traces, sa mère aimante et aimée, dont les sentiments n’ont jamais véritablement franchi les lèvres… Comme devant une carte postale jaunie par le temps, vous resterez proche de ces instantanés empreints de sensibilité, de courage, hors de toute dérive mélodramatique. Attachant !

02:33 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; récit; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

17/06/2012

Morceaux choisis - S.Corinna Bille

S. Corinna Bille

S.Corinna Bille 1.jpg

Elle avait choisi de demeurer seule dans sa tanière. La nuit, elle fut réveillée par un bruit d'avion et s'inquiéta. De jour aussi il en passait. "Un pays solitaire dont le ciel est habité." Ces bruits lui indiquaient les heures. "Mes horloges ronflantes."

Elle sortait peu de la cabane, craignant d'être vue, et plongeait dans le sommeil comme on se noie. Ou bien elle parlait à l'homme absent: "Tu m'as réconciliée avec la vie. Ton regard roux, tes taches de son, ta sévérité quand je te raconte des choses qui ne te plaisent pas... Ta douceur adulte. Si rare. Tu dois te courber pour entrer dans ma tanière et toujours tu devras te pencher sur moi. Homme-Soleil. Pour venir jusqu'à toi j'ai traversé les neiges sales, les roches gluantes, je me suis suspendue aux racines et j'avais peur. Dans ces forêts noires, il y a autant de serpents que de racines, les sapins sont d'un vert si sombre qu'ils m'étouffent, ils pourrissent sur la mauvaise rive du torrent, leurs lichens se collent à ma bouche. J'ai désiré mourir. Mais tu es là."

Elle reconnaissait en elle le bourdonnement d'amour. Elle avait des mains chantantes, des mains fermées pleines d'abeilles et très chaudes. Elle avait une poitrine heurtée par les battements d'un coeur dont elle sentait les coups jusqu'au sommet du crâne. Elle avait un ventre tendre, prêt à s'ouvrir. Elle était créée pour des phénomènes de lévitation. Mais ses yeux se bridaient, curieusement alanguis par l'insomnie. 

Elle s'aventura vers la source, remplissant le seau, s'y lavant toute, dans une odeur forte de menthe écrasée. Les blessures se cicatrisaient bien. Elle alla dans la prairie, écartant les touffes de ciguës, les jeunes arbres, les buissons d'églantier. Elle renouvela les herbes de sa couche. Elle trouva dans un creux un squelette blanchi de renard. Elle arracha, un jour, d'un geste brusque, une grosse marguerite et se mit à en tirer les pétales: un peu, beaucoup, passionnément; elle s'aperçut en faisant virer la tige, qu'elle oubliait le pas du tout! Tant pis. Le dernier pétale disait: il m'aime un peu"C'est ça, il m'aime un peu. Tandis que moi..."

L'excès d'amour la rendait farouchement réservée, presque hautaine. Qu'elle eût préféré rire, elle qui était rieuse de nature. Mais devant cet homme, elle ne riait plus, à peine pouvait-elle parler.

"Cette nuit j'ai vu un oiseau blanc. Tu dis qu'il n'existe pas de huppe blanche dans ces bois, ni de pigeon? Pourtant je l'ai vu. Deux fois. A l'aube, il a sauté sur le rebord de la fenêtre. Il est devenu si grand qu'il la remplissait toute. J'ai bien observé ses pattes recouvertes de plumes bouclées et ses énormes serres. Il a un oeil rond très noir. Mais j'ai fait un signe et il s'est envolé."

S. Corinna Bille, La demoiselle sauvage - Nouvelles (Gallimard, 1992)

image: S. Corinna Bille (theweb.ch)