24/02/2012
Jonas Jonasson
Jonas Jonasson, Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire (Presses de la Cité, 2011)
présenté par Fabienne Kranck - Payot Libraire, Nyon
Le jour de ses cent ans, alors que tous les notables de la ville l'attendent pour célébrer l'événement, Allan Karlsson s'échappe par la fenêtre de sa maison de retraite quelques minutes avant le début de la fête organisée en son honneur. Ses plus belles charentaises aux pieds, le vieillard se rend à la gare routière, où il dérobe une valise dans l'espoir qu'elle contienne une paire de chaussures. Mais le bagage recèle un bien plus précieux chargement, et voilà comment Allan se retrouve poursuivi par la police et par une bande de malfrats…
Allan ne fêtera pas son centième anniversaire dans sa maison de retraite. Il a décidé de mettre les voiles! Au fil de péripéties toutes plus loufoques les unes que les autres, nous faisons connaissance avec ce personnage peu ordinaire que Staline, Truman, Mao et bien d’autres grands de ce XXe siècle se sont arraché, car il connaissait la formule pour fabriquer la bombe atomique... Un roman à hurler de rire avec lequel vous passerez un excellent moment!
00:15 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | | Imprimer | Facebook |
23/02/2012
Morceaux choisis - Colette Fellous/Paul Nizon
Colette Fellous et Paul Nizon
Je dévorais et buvais sa présence, ses yeux avec ces mignones petites taches dans le brun clair, la bouche joliment peinte, et surtout cette façon qu'avaient ses lèvres de laisser passer la voix. Pas seulement le son, mais les mots, les phrases dans cette langue étrangère que j'aime tant, et quel frisson quand cette voix prononçait mon nom. Je ne pouvais me rassasier de son visage ni de ses doigts fins aux ongles merveilleusement soignés qui maniaient les couverts.
J'enregistrais tout cela, ce port de reine, la lumière de son visage, notre intimité, et j'étais conscient que cette heure et ces secondes n'auraient eu lieu qu'une fois, j'aimais t sentais le monde autour de moi comme jamais, la rue avec ses mélopées du soir, tout, j'étais aveugle et voyant. Miracle sur miracle, moi avec elle, dans cette ville unique, et c'était comme si elle l'avait inventée pour moi et qu'elle me l'offrait, à moi. A moi seul.
Colette Fellous et Paul Nizon, Maria Maria (Maren Sell, 2004)
08:29 Écrit par Claude Amstutz dans Colette Fellous, Littérature francophone, Littérature suisse, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; récit; livres | | Imprimer | Facebook |
Steinunn Sigurdardottir
Steinunn Sigurdardottir, Cent portes battant aux quatre vents (Héloïse d'Ormesson, 2011)
présenté par Sonia Castro - Librairie Payot, Nyon
Plus de vingt ans ont passés depuis que Brynhildur a quitté Paris où elle a été étudiante à la Sorbonne. Mais un court séjour dans la capitale ainsi qu'une aventure inattendue et sans lendemain la projettent malgré elle face à ses souvenirs de jeunesse, parmi lesquels, celui du grand amour à côté duquel elle est passée. Pourquoi ne saisit-on pas le bonheur lorsqu'il passe? Pourquoi tous ces tourments et ces attirances non réciproques?
Brynhildur part à Paris afin de trouver un paravent pour sa fille. Tournant dans la capitale, elle atterrit dans une petite boutique où elle va vivre une expérience charnelle qui fera jaillir de sa mémoire ses souvenirs d’étudiante. Elle retrouve alors les rues qu’elle prenait en suivant son professeur de grec qu’elle aimait. La nostalgie d’une femme qui regarde sa vie passée, essayant d’y trouver du réconfort.
08:15 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | | Imprimer | Facebook |
Morceaux choisis - Giuseppe Ungaretti
Giuseppe Ungaretti
J'ai toujours pensé que les vrais grands peintres sont ceux qui savent se servir du blanc. Tous les registres y sont contenus; une pointe en suffit à faire hurler un tableau, ou le faire rire comme les jeunes filles de Corte. Ce n'est pas une absence de couleurs; ce sont toutes les couleurs en mouvement, parmi lesquelles, l'une ou l'autre, ou plus lente, ou plus prompte, glisse un rien de discordant; bleu, ou rouge, ou jaune bile, ou aveuglant comme le soleil. Le blanc ne permet de triompher qu'à force de retenue; quand, dans un poème, un tableau, le blanc réussit à éclairer le sens profond des paroles, le poète ni le peintre n'a plus rien à apprendre.
Giuseppe Ungaretti, Neige (Revue Europe - no 955-956, novembre-décembre 2008)
image: Nicolas de Staël, Le concert (1955)
00:27 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Littérature italienne, Morceaux choisis, Nicolas de Staël | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; prose; morceaux choisis; livres | | Imprimer | Facebook |
22/02/2012
Le poème de la semaine
Catherine Pozzi
Très haut amour, s’il se peut que je meureSans avoir su d’où je vous possédais,En quel soleil était votre demeureEn quel passé votre temps, en quelle heureJe vous aimais, Très haut amour qui passez la mémoire,Feu sans foyer dont j’ai fait tout mon jour,En quel destin vous traciez mon histoire,En quel sommeil se voyait votre gloire,Ô mon séjour… Quand je serai pour moi-même perdueEt divisée à l’abîme infini,Infiniment, quand je serai rompue,Quand le présent dont je suis revêtueAura trahi, Par l’univers en mille corps brisée,De mille instants non rassemblés encor,De cendre aux cieux jusqu’au néant vannée,Vous referez pour une étrange annéeUn seul trésor Vous referez mon nom et mon imageDe mille corps emportés par le jour,Vive unité sans nom et sans visage,Cœur de l’esprit, ô centre du mirage,Très haut amour.Quelques traces de craie dans le ciel,Anthologie poétique francophone du XXe siècle
07:30 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |
21/02/2012
Iain Levison
Iain Levison, Arrêtez-moi là (Liana Levi, 2011)
présenté par Alexandre Guex - Payot Libraire, Nyon
Charger un passager à l'aéroport, quoi de plus juteux pour un chauffeur de taxi? Une bonne course vous assure une soirée tranquille. Ce soir-là, pourtant, c'est le début des emmerdes... Tout d'abord la cliente n'a pas assez d'argent sur elle et, pour être réglé, il vous faut entrer dans sa maison pourvue d'amples fenêtres. Plus tard, deux jeunes femmes passablement éméchées font du stop. Seulement, une fois dépannées, l'une d'elles déverse sur la banquette son trop-plein d'alcool. La corvée de nettoyage s'avère nécessaire. Après tous ces faux pas, comment s'étonner que deux policiers se pointent en vous demandant des comptes? Un dernier conseil: ne sous-estimez jamais la capacité de la police à se fourvoyer...
Au mauvais endroit, au mauvais moment ! Ainsi se retrouve Jeff, chauffeur de taxi sans histoires, piègé dans une sordide affaire criminelle. Une attaque en règle, pleine d’ioronie et teintée d’humour noir, de l’hypocrisie et de l’absurdité du système judiciaire, ainsi que de la société américaine d’aujourd’hui. Un régal!
05:40 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | | Imprimer | Facebook |
20/02/2012
John Burnside
John Burnside, Scintillation (Métailié, 2011)
présenté par Isabelle Ertel - Librairie Payot, Nyon
Dans un paysage dominé par une usine chimique abandonnée, au milieu de bois empoisonnés, l'Intraville, aux immeubles hantés de bandes d’enfants sauvages, aux adultes malades ou lâches, est devenue un modèle d’enfer contemporain. Année après année, dans l’indifférence générale, des écoliers disparaissent près de la vieille usine. Ils sont considérés par la police comme des fugueurs. Leonard et ses amis vivent là dans un état de terreur latente et de fascination pour la violence.
L’Intraville est un lieu hanté par l’usine chimique abandonnée qui a fait les beaux jours de cette ville devenue un vrai mouroir pour les habitants. Les jeunes sont fascinés par ce lieu. De jeunes garçons disparaissent sans que personne ne s’en soucie réellement. Le meilleur ami de Léonard disparaît à son tour. Celui-ci mène l’enquête et s’acoquine malgré lui à une bande de jeunes voyous. Scintillation nous enflamme vers de multiples pistes afin de sonder les confins les plus noirs de l’âme humaine, mais avec peine.
06:31 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | | Imprimer | Facebook |
19/02/2012
Fouad Laroui
Fouad Laroui, La vieille dame du riad (Julliard, 2011)
présenté par Anouk Lassilaa - Librairie Payot, Nyon
C'est avec un bonheur sans mélange qu'un jeune couple français s'installe à Marrakech, dans le riad qu'il vient d'acquérir. Quel choc quand il découvre, dans une petite pièce au fond de la maison, une vieille femme qui y semble installée de toute éternité. Ni l'agence immobilière ni les anciens propriétaires ne sont en mesure de leur expliquer ce qu'elle fait là. La femme est très vieille, paisible, parlant quelques mots d'un dialecte que personne ne comprend et ne paraît absolument pas disposée à quitter les lieux. Pas question de jeter à la rue une personne aussi fragile. Aucune institution n'est prête à l'accueillir. Impossible de retrouver sa famille. Comment aménager cette cohabitation? La faire travailler contre le gîte et le couvert, mais pour faire quoi? La considérer comme une amie de la famille? Mais ils n'ont absolument rien en commun. Lui trouver une chambre en ville? Impossible de la faire partir manu militari. Accomplir un acte charitable et l'accueillir comme une SDF? Se soumettre et accepter cette étrange situation? Mais cette présence, aussi discrète soit-elle, reste une intrusion insupportable et un viol de l'intimité de ce couple plein de bonnes intentions. Comment partager son espace avec quelqu'un qui vous est totalement étranger? Telle est la question!
Ils ont une idée fabuleuse, Cécile et François, quand ils décident d’acheter un riad à Marrakech! Mais une aventure hors du commun les attend. Que fait cette vieille femme au fond d’une pièce? Est-ce que tout ce petit monde coloré qui les entoure va pouvoir les aider? Vous, peut-être? Un ton ironique et tendre qui met à mal bien des clichés et des idées reçues avec un humour bienvenu.
17:20 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; roman; livres | | Imprimer | Facebook |
Je tire ma révérence
Bloc-Notes, le 19 février / Les Saules
Voici venu le moment de tirer ma révérence professionnelle - à 65 ans chez nous autres, suisses - avec un an d'avance, après 47 ans de passions partagées avec des auteurs, des éditeurs, des représentants, des journalistes et des libraires, tous des maillons indispensables de cette chaîne du livre qui auront largement contribué à mon bonheur de vivre.
J'avais promis qu'en quittant les librairies Payot, j'ouvrirais exceptionnellement ces colonnes aux coups de coeur de mes désormais anciens collègues de Nyon qui poursuivent la route, reprennent courageusement le flambeau en une période délicate pour la profession, avec simplicité, modestie et sincérité, par amour du livre et des lecteurs.
Pour ma part, l'aventure continue, autrement certes, mais elle continue, aussi belle et lumineuse qu'elle le fut jusqu'à ce jour: dans ma vie, auprès de mes amis, sur La scie rêveuse, sur Facebook, dans la revue du Passe Muraille. Quand je pense à tous les livres qu'il me reste encore à lire, j'ai la certitude d'être encore heureux, dit Jules Renard.
Place donc à mes amis libraires! Je reprendrai prochainement la parole sur La scie rêveuse, avec Le poème de la semaine, puis avec un thème plus polémique - qui ne me vaudra pas que des amitiés! - Pourquoi Sarko va gagner selon Eric Brunet (Albin Michel), ainsi que la reprise de chroniques consacrées aux parutions récentes, telles Le champ du potier de Andrea Camilleri (Fleuve Noir), Les lieux et la poussière de Roberto Peregalli (Arléa) et La femme au masque de chair de Donna Leon (Calmann-Lévy).
Belle fin de dimanche à tous!
image: Dora Maar par Man Ray / Paul Eluard, Le temps déborde (Les Cahiers d'Art, 1947)
17:19 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Le monde comme il va | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : littérature; livres | | Imprimer | Facebook |
18/02/2012
Morceaux choisis - Piero Calamandrei
Piero Calamandrei
Que vous arriviez de Bologne, surtout des tunnels de l'Apennin en direction de Florence, ou que vous arriviez du sud par la ligne qui vient de Rome, mettez-vous à la fenêtre et cherchez au sommet des collines: et quand vous verrez se dresser là-haut, près du toit rougeâtre d'une maison paysanne ou au beau milieu des oliviers argentés, la flèche d'un cyprès, soyez sûr que Florence est proche. Ce sont eux qui marquent non seulement les limites entre les champs et entre les fermes, mais aussi la frontière entre la Toscane et les autres régions. Ce qu'on peut reconnaître avec une précision absolue quand on vient de Rome. Jusqu'à la moitié du trajet, c'est le Latium qu'on voit: les lents méandres du Tibre, et, sur les hauteurs, les bois de chênes. Mais quand vous arrivez à Chiusi, la cité de Porsenna, voilà le cyprès, là-haut, comme un index tendu, qui vous avertit que vous avez pénétré en terre étrusque - car il y a une chose singulière: c'est qu'il semble que dans tous les lieux où ils se sont arrêtés en Italie, les Etrusques aient voulu laisser une trace de leur passage en plantant sur ces collines les lances des cyprès, comme un signe de leur emprise; lesquels ne sont pas réunis, ici, en bouquets touffus, mais épars comme des annotations au paysage, ornant d'une frange la crête d'un coteau qui se détache sur le ciel, accompagnant de leur alignement le chemin qui mène à une villa ou à un cimetière, protégeant les meules sur l'aire ou, au milieu des oliviers, la fumée d'une maison.
Je pense que pour les Etrusques, le cyprès était un arbre sacré, un symbole magique: une espèce de dieu Terminus, peut-être une conjuration contre la grêle et la foudre. Pure fantaisie de ma part... Reste que je considère le cyprès isolé parmi les oliviers comme la signature des Etrusques. Dans les douces périodes des collines toscanes dont les oliviers sont les mots, les cyprès sont les ponctuations. Et dans la sobriété où se mêlent des tonalités feutrées et discrètes, l'argent des oliviers et le vert sombre des cyprès sont la couleur du paysage toscan: ce n'est pas d'abord un paysage peint, mais un paysage dessiné, sculpté, buriné; un paysage aux contours précis, qu'il faut voir en hiver pour le bien comprendre, quand les autres arbres ont perdu leurs feuilles, ou à la rigueur au début du printemps, entre mars et avril, lorsque apparaissent entre les oliviers les taches roses des pêchers en fleurs, et qu'au bord des rivières il n'y a encore qu'une caresse de vert pâle sur les branches nues des peupliers.
C'est à ce moment-là, avant que le bouillonnement de mai n'en ait caché les lignes, que se découvrent bien visibles toutes les nervures de cette terre construite comme une architecture, où l'on peut reconnaître une à une les différentes qualités de pierres qui ont servi au cours des siècles à construire la ville: les rayures blanches des carrières de marbre où Michel-Ange allait choisir lui-même les blocs pour ses statues, ou plus bas, entre les champs, le brun de la pietra forte utilisée pour la tour du Palazzo Vecchio, ou le gris bleuté de la pietra serena, encadrement préféré des intérieurs de Brunelleschi.
Piero Calamandrei, Parler de Florence - bilingue (Collection Lettres d'Italie/Edition de la revue Conférence, 2010)
Illustrations: Gérard de Palézieux et de Piero Calamandrei
Traduction: Christophe Carraud
image: Florence - http://photos.linternaute.com/cypres/
00:43 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Littérature italienne, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; essai; voyages; livres | | Imprimer | Facebook |