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31/12/2011

Quand les hommes vivront d'amour

Avec beaucoup de tendresse, de simplicité et de gratitude, mes meilleurs voeux de bonheur pour l'année 2012, à vous, amis fidèles et souvent invisibles qui visitez souvent le blog de La scie rêveuse - vous êtes deux fois plus nombreux que l'année dernière, soit plus de 200 par jour! - déposant vos commentaires, impressions ou souvenirs, ici ou sur Facebook. En ce dernier jour de l'année, je vous dédicace cette magnifique chanson écrite par Raymond Lévesque, interprétée par Félix Leclerc, Gilles Vigneault et Robert Charlebois: Quand les hommes vivront d'amour ...



06:20 Écrit par Claude Amstutz dans Chansons inoubliables | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : musique; variété | |  Imprimer |  Facebook | | |

30/12/2011

Morceaux choisis - Christian Signol

Christian Signol

Rochers Servières.jpg

Si chaque année l'apparition de la première neige me redonne cette sensation d'isolement qu'a exacerbée la tempête, c'est bizarrement une sensation heureuse, car elle est étroitement liée à une perception du monde qui vient de plus loin, c'est-à-dire d'un temps où nulle menace ne pesait sur nous, où la rudesse des hivers ne livrait à l'enfant que j'étais qu'un enchantement ébloui. Je ne peux pas m'en défaire: même la tempête n'a pas réussi à éteindre en moi cet écho qui réveille ce que, peut-être, je vois d'abord et avant tout: un enfant qui a refusé de grandir malgré les apparences et qui sait parfaitement où, derrière le décor de la vie quotidienne, bat un coeur délicieusement semblable au sien.

C'est pour cette raison que j'ai marché dans la neige, ce matin de novembre où elle a fait son apparition, avançant lentement dans le parc où seules les traces d'un lièvre étaient visibles en lisière du bois, me retournant pour vérifier que celles de mes pas étaient bien les mêmes qu'alors, envahi d'une joie ridicule pour mon âge, je ne pouvais pas l'ignorer, mais en même temps si précieuse que rien n'aurait pu l'atténuer. Le silence aussi était le même, et le souffle du vent, la clarté de l'air, le frôlement doux des flocons qui continuaient de tomber, le lestage des branches mollement courbées vers le sol, l'adoucissement d'un monde que je savais dur, impitoyable, mais qui devenait toujours, à ce moment-là, d'une étrange beauté. J'ai fait le tour du parc comme je le faisais jardis, cherchant désespérément à mettre mes pas dans mes pas, comme pour conjurer le temps, tout ce qui avait pu porter atteinte à ce que nous étions: un couple et deux enfants destinés à ne jamais se perdre.

Christian Signol, Au coeur des forêts (Albin Michel, 2011)

image: Les rochers de Servières (surleplateau.com)

09:40 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

La citation du jour

Jean-Michel Maulpoix

Jean-Michel Maulpoix 3.jpg

Deuil blanc de la neige. La terre est veuve du ciel. Voilà enfin visible cela que nous ne pouvons toucher des mains: ce froid entre nos paumes; de l'espace et du temps tombé. Mourir délivre sa peau blanche et sous nos yeux se fait douceur; mourir à ce moment pour l'âme comme pour l'oeil n'est plus idée de pourriture mais une farine légère, ou la poudre de sucre d'une enfance retrouvée, un linge où s'endormir, une rêverie de fourrure et de traîneaux, plus rien de sombre ni de menaçant: la disparition très douce des débris, des brisures et des voix.

Jean-Michel Maulpoix, Pas sur la neige (Mercure de France, 2004)

00:27 Écrit par Claude Amstutz dans Jean-Michel Maulpoix, La citation du jour, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : citations; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

28/12/2011

Le poème de la semaine

J.G. Cecconi

Regarder le ciel ouvert, 
pressentir la menace des chaînes
et dire non.
 
Il faut qu'une voix demeure
même fluette, fragile,
mais équitable pour tous,
se réclamant du possible refus.
 
Comme le temps qui passe
entre les jointures des pierres
et les portes des prisons,
depuis longtemps le fer
durcit la peau.
 
Malgré la surdité des hommes,
telle une luciole perdue au creux de la nuit,
que cette petite voix demeure
et qu'elle n'oublie pas
de dire non.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

27/12/2011

Morceaux choisis - Henri Bauchau

 

littérature; poésie; livres

Henri Bauchau

Galets de la Sarine, descendant des torrents,
Galets du Rhône, galets du Gange,
Pierres précieuses, pierres polies
Par de fabuleux diamantaires,
Où allez-vous après la fonte des neiges?
 
Engadine, pierres serpentines,
Qui glisses des sommets,
Couleurs de bronze vert, avec un grand coeur bleu.
Engadine, du partage des eaux
Qui vont vers les trois mers,
Capitale des glaciers, des rivières de l'Ouest,
Sils-Maria, ton lac, le beau vent remontant d'Italie
Presqu'île de Chasté, où Nietzsche écrivait
Adossé à une pierre,
Grande prairie aux formes arrondies,
Herbe si douce aux pieds
Où marchaient Pierre-Jean Jouve
Et Blanche la Sibylle,
Maisons basses, fenêtres grillagées,
Grands toits couverts de pierres plates.
Troupeaux agiles, violets A l'aube, escaladant les pentes du soleil,
Longues forêts de mélèzes, nature ensauvagée.
 
Au bout du lac, la route
Enlacée aux fragments qui existaient encore,
Où passaient les légions qui remontaient
De Rome.

Henri Bauchau, Tentatives de louanges (Actes Sud, 2011)

18:09 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

26/12/2011

Les cygnes de l'aube

Bloc-Notes, 26 décembre / Les Saules

littérature; poésie; livres

Au monde de la poésie, une agréable surprise nous parvenait en 2010 - voir la notice qui lui fut consacrée en juillet dernier - avec Le chant des larmes, une anthologie réunissant une vingtaine d'auteurs autour d'Abbassia Naïmi. Cette dernière récidive aujourd'hui avec Les cygnes de l'aube, où nous retrouvons avec plaisir quelques auteurs du précédent recueil, tels Xavier Lainé, Hamid Medah, Assia Benotmane, Réjean Blais, An Ishtar, Marie Hurtrel, Jean-Luc Moulin, Amel Tafsout et Michèle Minary.

Une littérature qu'on qualifierait volontiers d'engagée se fraie un chemin dans Les cygnes de l'aube, qui me rappelle après lecture deux grands hommes du vingtième siècle qui auraient pu être le fil conducteur de cette anthologie. Le premier, René Char, parlant de son pays, affirme: On ne croit pas à la bonne foi des vainqueurs. Le second, Léo Ferré, atteste: Les plus beaux chants sont les chants de revendications. Et la lutte continue... Chaque poète de ce présent recueil contribue avec sa sensibilité propre d'écriture, à ce tour du monde qui ose dire, se dresse contre l'indifférence, contre les fractures de l'âme et ses peurs, contre la barbarie et l'oppression, contre l'exclusion, contre l'oubli: Prenez vos armes, vos encriers. Lissez vos plumes, chargez stylos. Préparez-vous à lâcher vos mots, scande Philippe Correc. Lui répond à sa manière Aïcha Allagui: L'eau de la terre ne peut taire le volcan

Bien sûr, il y est aussi question d'amour, d'espoir, d'un possible rêve incertain à certaines heures et à d'autres, reflet d'une promesse faite à soi-même: Sois, vis, cours et deviens, la pluie n'est pas un bien. Sois, respire et espère, le vent sera ton frère. Sois, ris, pleure et soulage, le ciel est un rivage. Sois, prends, offre et échange, l'amour est un mélange... nous dit Jean-Luc Moulin.

Auteurs de France, de la Tunisie, de l'Algérie, du Maroc, des Etats-Unis, du Canada, de l'Ile Maurice, du Cameroun et du Congo, vous pourrez découvrir, outre les poètes déjà cités: Baya Boireau Chegra, Catherine Dietemann, Carjo Mouanda, Fatimah Motala, Chantal Rodier, Christophe Bregaint, Sadek Ruhmaly, Monique-Marie Ihry, Eliane Bianchi Weittmann, Makhlouf Boughareb, Claudine Lavit Lahlou, Patient Xavier Nong, Laetitia Gand, Cendrine Russeau, Christel Lacroix, Fatiha Begdouri et Zakaria Bouker.

A Abbassia Naïmi revient le dernier mot: Des cygnes se lèvent et clament: Libres nos ailes, elles sont les filles du vent. Rejoignez-nous ici, au pays de l'Aube nouvelle.

Souhaitons-lui d'être plus belle que celle d'aujourd'hui, sans les poètes déjà sur le point d'être effacée...

Les cygnes de l'aube - Le cercle des amoureux de la Poésie et de l'Edition (Lire et Méditer, 2011)

Le cercle des Amoureux de la Poésie: www.lecap-edition.fr/

00:27 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Littérature francophone, René Char | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : littérature; poésie; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

25/12/2011

Le temps des fêtes

Que ce temps des fêtes vous apporte à toutes et à tous joie, douceur, lumière, paix et réconfort! Avec le concours de la divine Kathleen Ferrier. Elle nous offre un chant de Noël intitulé O come, all ye faithful avec The Boyd Neel String Orchestra sous la direction de Boyd Neel.


00:06 Écrit par Claude Amstutz dans Kathleen Ferrier, Musique classique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique classique; noël | |  Imprimer |  Facebook | | |

23/12/2011

Les trois messes basses 6/6

Alphonse Daudet, Les trois messes basses - VI

littérature; contes; livres

CONTE DE NOEL - III 

Et voilà la vraie légende de dom Balaguère comme on la raconte au pays des olives. Aujourd'hui, le château de Trinquelage n'existe plus, mais la chapelle se tient encore droite tout en haut du mont Ventoux, dans un bouquet de chênes verts. Le vent fait battre sa porte disjointe, l'herbe encombre le seuil; il y a des nids aux angles de l'autel et dans l'embrasure des hautes croisées dont les vitraux coloriés ont disparu depuis longtemps. Cependant il paraît que tous les ans, à Noël, une lumière surnaturelle erre parmi ces ruines, et qu'en allant aux messes et aux réveillons, les paysans aperçoivent ce spectre de chapelle, éclairé de cierges invisibles qui brûlent au grand air, même sous la neige et le vent. Vous en rirez si vous voulez, mais un vigneron de l'endroit, nommé Garrigue, sans doute un descendant de Garrigou, m'a affirmé qu'un soir de Noël, se trouvant un peu en ribote, il s'était perdu dans la montagne du côté de Trinquelage; et voici ce qu'il avait vu...

Jusqu'à onze heures, rien. Tout était silencieux, éteint, inanimé. Soudain, vers minuit, un carillon sonna tout en haut du clocher, un vieux, vieux carillon qui avait l'air d'être à dix lieues. Bientôt, dans le chemin qui monte, Garrigue vit trembler des feux, s'agiter des ombres indécises. Sous le porche de la chapelle, on marchait, on chuchotait:

- Bonsoir maitre Arnoton!

- Bonsoir bonsoir mes enfants!...

Quand tout le monde fut entré, mon vigneron, qui était très brave, s'approcha doucement et, regardant par la porte cassée, eut un singulier spectacle. Tous ces gens qu'il avait vus passer étaient rangés autour du chœur, dans la nef en ruine, comme si les anciens bancs existaient encore. De belles dames en brocart avec des coiffes de dentelle, des seigneurs chamarrés du haut en bas, des paysans en jaquettes fleuries ainsi qu'en avaient nos grands-pères, tous l'air vieux, fané, poussiéreux, fatigué. De temps en temps, des oiseaux de nuit, hôtes habituels de la chapelle, réveillés par toutes ces lumières, venaient rôder autour des cierges dont la flamme montait droite et vague comme si elle avait brûlé derrière une gaze; et ce qui amusait beaucoup Garrigue, c'était un certain personnage à grandes lunettes d'acier, qui secouait à chaque instant sa haute perruque noire sur laquelle un de ces oiseaux se tenait droit tout empêtré en battant silencieusement des ailes. Dans le fond, un petit vieillard de taille enfantine, à genoux au milieu du chœur agitait désespérément une sonnette sans grelot et sans voix, pendant qu'un prêtre, habillé de vieil or allait, venait devant l'autel, en récitant des oraisons dont on n'entendait pas un mot... Bien sûr c'était dom Balaguère, en train de dire sa troisième messe basse.

(fin)

Alphonse Daudet, Les trois messes basses - lues par Fernandel (Frémeaux et Associés, 2006)

image : Moulin Alphonse Daudet, Alpilles

02:54 Écrit par Claude Amstutz dans Contes, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; contes; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

22/12/2011

Les trois messes basses 5/6

Alphonse Daudet, Les trois messes basses - V 

littérature; contes; livres

CONTE DE NOEL - III

- l'abbé va trop vite... On ne peut pas suivre, murmure la vieille douairière en agitant sa coiffe avec égarement. Maitre Arnoton, ses grandes lunettes d'acier sur le nez, cherche dans son paroissien où diantre on peut bien en être. Mais au fond, tous ces braves gens, qui eux aussi pensent à réveillonner ne sont pas fâches que la messe aille ce train de poste; et quand dom Balaguère, la figure rayonnante, se tourne vers l'assistance en criant de toutes ses forces: Ite, missa est, il n'y a qu'une voix dans la chapelle pour lui répondre un Deo gratias si joyeux, si entrainant, qu'on se croirait déjà à table au premier toast du réveillon.

Cinq minutes après, la foule des seigneurs s'asseyait dans la grande salle, le chapelain au milieu d'eux. Le château, illuminé de haut en bas, retentissait de chants, de cris, de rires, de rumeurs; et le vénérable dom Balaguère plantait sa fourchette dans une aile de gelinotte, noyant le remords de son péché sous des flots de vin du Pape et de bons jus de viandes. Tant il but et mangea, le pauvre saint homme, qu'il mourut dans la nuit d'une terrible attaque, sans avoir eu seulement le temps de se repentir; puis, au matin, il arriva dans le ciel encore tout en rumeur des fêtes de la nuit, et je vous laisse à penser comme il y fut reçu.

- Retire-toi de mes yeux, mauvais chrétien! lui dit le souverain Juge, notre maitre à tous. Ta faute est assez grande pour effacer toute une vie de vertu... Ah! tu m'as volé une messe de nuit... Eh bien, tu m'en payeras trois cents en place, et tu n'entreras en paradis que quand tu auras célébré dans ta propre chapelle ces trois cents messes de Noël en présence de tous ceux qui ont péché par ta faute et avec toi...

(à suivre...)

Alphonse Daudet, Les trois messes basses - lues par Fernandel (Frémeaux et Associés, 2006)

image : Moulin Alphonse Daudet, Alpilles

01:06 Écrit par Claude Amstutz dans Contes, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; contes; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

21/12/2011

Le poème de la semaine

Paul Eluard

La nuit n'est jamais complète 
Il y a toujours, puisque je le dis
Puisque je l'affirme
Au bout du chagrin 
Une fenêtre ouverte 
Une fenêtre éclairée 
Il y a toujours un rêve qui veille 
Désir à combler, faim à satisfaire 
Un coeur généreux 
Une main tendue, une main ouverte 
Des yeux attentifs 
Une vie, la vie à se partager. 

Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle