25/12/2014
La citation du jour
William Shakespeare
Non, jamais je ne planterai une seule de ces boutures dans mon jardin. De même que je ne voudrais pas que ce garçon me dise, si j'étais maquillée: c'est bien, et que ça lui donne envie de me faire l'amour. Prenez ces fleurs, c'est de la chaude lavande, de la sarriette, de la marjolaine, et puis le souci, qui se couche en même temps que le soleil et se lève en larmes en même temps que lui. Oui, toutes ces fleurs me manquent pour vous en faire des couronnes, et vous, mon doux ami, pour vous en couvrir tout entier.
William Shakespeare, Un conte d'hiver (Minuit, 1988)
traduit par Bernard-Marie Koltès
image: Le Titien, Vénus d'Urbino / détail (ahsonic.tumblr.com)
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17/03/2014
Giuseppe Tomasi di Lampedusa
Giuseppe Tomasi di Lampedusa, Shakespeare (Allia, 2007)
Deux fois par semaine, l'auteur de ce chef d'oeuvre, le Guépard - en coll. Points/Seuil - prononçait chez lui, devant un public composé de jeunes gens, des leçons, principalement consacrées à la littérature anglaise. Cet opuscule relate celles consacrées à William Shakespeare. Elles fourmillent d'informations, d'angles de vue, de mises en perspective intéressantes. Le contraire d'une biographie classique ou d'une thèse universitaire. Le regard de l'écrivain y est accessible, plein d'humour, passionné. Il donne au grand dramaturge anglais un relief particulier, dans son effort à restituer une atmosphère et une matérialité du théâtre de cette époque. Bref, un compagnon idéal - il tient dans la poche intérieure d'un veston ou d'un sac à main - pour vous accompagner au spectacle d'une pièce de... Shakespeare, bien sûr!
00:38 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Littérature italienne, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; essai; livres | | Imprimer | Facebook |
15/11/2013
Les pièces de Shakespeare 10a
Henry V
Avec une certaine ironie, le public français considère souvent Henry V - comme on a pu le lire voici quelques années dans les colonnes de Libération - l'une des pièces les moins palpitantes de Shakespeare! Il n'est pas étonnant non plus qu'au Royaume-Uni, elle demeure l'une des plus populaires: et pour cause...
En effet, si Henry V nous raconte la vie de ce roi dont le règne n'aura duré que neuf ans, l'histoire a retenu qu'après le règne agité de son père, Henry IV, il a incarné - en quelques traits de sa personnalité - la vertu, la droiture, la sincérité, la foi. Mais ces dispositions ne pèseraient pas lourd sans la puissance étendue de l'Angleterre sous son ère, dont le point déterminant se situe lors de la célèbre Bataille d'Azincourt, où, avec 6'000 hommes à peine, il inflige l'une des plus cinglantes défaites au Royaume de France, malgré ses 18'000 combattants. A Hardricourt - alors que la progression de l'armée anglaise a vu tomber Rouen et marche sur Paris - Henry V demande la main de Catherine de Valois, fille du roi Charles VI, héritant du même coup de l'Aquitaine et de la Normandie. Reconnu par le Traité de Troyes comme héritier et régent de France, tous les états d'Europe sont désormais sous son influence, mais son ascension fulgurante est interrompue à Vincennes, en 1422, où il meurt d'une dysenterie à l'âge de 35 ans: jeune donc, comme Alexandre le Grand...
La pièce de Shakespeare s'attache en priorité à faire revivre sous nos yeux un homme d'état - un vrai - pour lequel il éprouve une authentique admiration. Redoutable diplomate, fin stratège militaire, habile en paroles et doté d'un charisme politique exceptionnel, il se révèle aussi manipulateur, refoulant au fond de lui-même ses doutes, les incertitudes de l'histoire, notamment avant la Bataille d'Azincourt où il prononce devant ses troupes un discours célèbre entre tous - voir l'annexe 1b - dont la détermination affichée n'est peut-être pas le reflet de son intime conviction. Mais qu'importe, puisque seul le résultat compte et que les soldats lui emboîtent le pas et se reconnaissent en lui!
Shakespeare s'est sans doute laissé emporter par sa vénération pour un roi personnifiant l'unité de la Nation, le courage et la domination de l'Angleterre, à travers ses caricatures et moqueries envers la France, plongée alors dans un chaos indescriptible. Bien des critiques littéraires anglo-saxons - dont Harold Bloom - soulignent non sans humour, que Henri V est un homme qu'on admire certainement, auquel on ne peut résister en raison de sa force de persuasion; mais l'aimer? Rien n'est moins sûr, car sa sécheresse de coeur - le prix payé pour sa réussite et ses victoires -, son insolence typiquement britannique ou son autoritarisme n'abondent pas dans ce sens.
Mais l'histoire effacera ces ombres singulières pour retenir ces mots: Faites-nous jurer que vous valez autant que vos origines, ce dont je ne doute pas, puisqu'à aucun de vous, si modeste qu'il soit ne manque dans les yeux l'éclat de la noblesse...
Et comme on voudrait aujourd'hui que nos politiques sachent parler ainsi...
William Shakespeare, Henry V (coll. Folio Théâtre/Gallimard, 1999)
traduit de l'anglais par Jean-Michel Déprats
Harold Bloom, Shakespeare - The Invention of the Human (Fourth Estate, 1998)
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Les pièces de Shakespeare 10b
Henry V
En 1989, Kenneth Branagh - après Laurence Olivier et les adaptations télévisées de la Royal Shakespeare Company - porte à l'écran Henry V. Aux côtés de Derek Jacobi, Simon Shepherd et James Larkin, Kenneth Branagh interprète le rôle de Henri V. La scène III de l'Acte IV, présentée ici, est celle du célèbre discours que Henry V déclame devant ses troupes avant la Bataille d'Azincourt. La traduction française - de Jean-Michel Déprats, en extrait - a été ajoutée ci-dessous.
William Shakespeare, Henry V (coll. Folio Théâtre/Gallimard, 1999)
traduit de l'anglais par Jean-Michel Déprats
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27/09/2013
Lire les classiques - William Shakespeare
William Shakespeare
La musique qu'on entend, pourquoi l'ouïr sans entrain?Le doux se plaît au doux, la joie va à la joie;Comment aimer ce qu'on n'aime qu'à contrecoeur,Ou n'avoir de plaisir qu'à ce qu'on soit fâché?Si la concorde des sons ensemble bien accordés,Par l'hymen réunis, offense ton écoute,Ils te grondent doucement de jouer au singulierLa partition des sons qu'ensemble tu devrais jouer;Entends comme cette corde en épouse une seconde,Comme, par écho mutuel, les autres sont éveillées,On dirait du bonheur d'un fils, son père, sa mère,Chantant à l'unisson une seule mélodie: Chanson privée de mots, ensemble une et plusieurs,Et qui t'avertirait "Toi, tout seul, tu n'es rien."
William Shakespeare, Sonnet VIII, dans : Sonnets - édition bilingue (Grasset, 2013)
traduit de l'anglais par Jacques Darras
image: www.maxisciences.com
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11/08/2013
Les pièces de Shakespeare 9b
La tempête
En 1980, la BBC a réalisé sous la direction de John Gorrie, une superbe adaptation de La tempête, avec Michael Hordern, Warren Clarke, Pipa Guard et l'ensemble de la Royal Shakespeare Company. En voici l'épilogue, précédé du texte français et suivi du texte original en anglais, dont l'harmonie est sans équivalent.
Maintenant, mes charmes sont abolis.A mon chétif pouvoir je suis réduit.Maintenant c'est à vous de déciderSi je reste ici confinéOu si je suis à Naples renvoyé.Mais puisque j'ai mon duché reconquisEn pardonnant à qui me l'avait pris,Ne me laissez pas sur ce rocher nu,Par votre pouvoir retenu,Mais libérez-moi de mes liensA l'aide de vos bonnes mains.Que le souffle de bienveillants murmuresVienne souffler dans la mâture,Gonflant ma voile, car, sinon,J'aurai manqué mon but: vous plaire.Je n'ai plus d'esprits pour règnerNi de magie pour enchanter.Faut-il donc que je désespère?Non, si m'assiste la prièreQui du Ciel force la MerciEt toutes les fautes délie.Vous voudriez être pardonnés pour vos offenses?Moi de même.Ainsi donc, que me délie votre indulgence.Now my charms are all overthrown, And what strength I have's mine own, Which is most faint: now, 'tis true, I must be here confined by you, Or sent to Naples. Let me not, Since I have my dukedom got And pardon'd the deceiver, dwell In this bare island by your spell; But release me from my bandsWith the help of your good hands: Gentle breath of yours my sails Must fill, or else my project fails, Which was to please. Now I want Spirits to enforce, art to enchant, And my ending is despair, Unless I be relieved by prayer, Which pierces so that it assaults Mercy itself and frees all faults. As you from crimes would pardon'd be,Let your indulgence set me free.
La tempête, traduit par Jean-Louis Curtis (coll. Papiers/Actes Sud, 1986)
00:24 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; théâtre; livres | | Imprimer | Facebook |
Les pièces de Shakespeare 9a
La tempête
S'il me fallait emporter sur une île déserte une seule pièce du grand William Shakespeare, je crois bien que je choisirais La tempête, malgré mon admiration pour Comme il vous plaira, Le songe d'une nuit d'été et Un conte d'hiver, entre autres chefs-d'oeuvre.
On y retrouve en effet tous les thèmes chers à son auteur, mais jugez plutôt: Prospero, le duc de Milan, après avoir été déchu et exilé par son frère, se retrouve avec sa fille Miranda sur une île déserte. Grâce à la magie que lui confèrent ses livres, il maîtrise les éléments naturels et les esprits; notamment Ariel, esprit de l'air et de la joie de vivre ainsi que Caliban, être sombre et instinctif symbolisant la terre, la violence et la mort. Le premier acte s'ouvre sur le naufrage - orchestré par Prospero et executé par Ariel - d'un navire portant le roi de Naples, son fils Ferdinand ainsi que le frère parjure de Prospero, Antonio. Usant de ses pouvoirs surnaturels, Prospero fait subir aux trois personnages échoués sur l'île diverses épreuves destinées à les punir de leur trahison, mais qui contiennent aussi, peut-être, un caractère salvateur. Au dernier acte, Prospero se réconcilie avec son frère et le roi, marie sa fille avec Ferdinand, libère Ariel et Caliban puis renonce à la magie pour retrouver son duché.
Critique de la société, de la démocratie et du pouvoir - comme dans Coriolan, Jules César, Richard III ou Henry VI - l'humour, la fantaisie et la féérie occupent néanmoins dans La tempête une place prépondérante, au fil de cette plongée au coeur des méandres de la nature humaine: avec Prospero qui dans son exil amer, médite sur la vieillesse et la mort, mais dans sa solitude, aspire de même à la paix du coeur, la justice et la compassion; avec Ariel au service de Prospero, de nature joyeuse et amoureux des arts, sensible au malheur des hommes; avec Miranda, incarnant l'amour véritable dans toute sa simplicité, sa fraîcheur, sa sincérité envers son père, mais aussi de Ferdinand qui nous réserve une des plus belles scènes d'amour, aux côtes de celles de Roméo et Juliette et Un conte d'hiver.
Le portrait de Caliban est plus complexe: souvent décrit comme un monstre, un médiocre dépourvu de sens moral, il symbolise l'insoumission, la félonie, la sauvagerie, le désir irréfléchi. Oui, sans doute, et pourtant, n'est-il pas le personnage le plus émouvant - le plus humain - de cette pièce, incarnant à lui seul un monde privé de grâce, voué au désespoir, et dont Prospero croit que le destin n'est pas définitivement tracé, s'il est traversé d'affection et d'une patiente éducation capable de l'enrichir de valeurs qui lui sont inconnues?
En Angleterre, cette oeuvre n'est pas assimilée à une comédie - terme souvent galvaudé chez nous - mais à une romance pastorale. A la différence de Un conte d'hiver qui aboutit aussi au pardon et à la réconciliation, cette pièce est celle de l'apprentissage et de la sagesse dans laquelle tous les questionnements - comme au sein d'une prison sans barreaux - aboutissent au triomphe de l'amour en dissolvant les rancoeurs, les haines, les illusions, devant la précarité de la vie qui prend ses distances.
Pour terminer, sachez que c'est dans La tempête qu'on trouve ce célèbre extrait: Nous sommes de la même étoffe que nos songes et notre infime vie est cernée de sommeil...
En annexe, vous pouvez découvrir - en version bilingue - l'éblouissant épilogue de Prospero...
La tempête, traduit par Jean-Louis Curtis (coll. Papiers/Actes Sud, 1986)
00:15 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; théâtre; livres | | Imprimer | Facebook |
03/04/2013
Le questionnaire Marcel Proust - 2/3
Mes auteurs favoris en prose?
William Shakespeare (d'accord, c'est du théâtre, mais...), Thérèse d'Avila (et les autres auteurs de spiritualité carmélitaine), Bernard de Clairvaux, H.B. Stendhal, Emily Brontë, Albert Camus, Simone Weil, Marcel Proust, François Mauriac, puis: Fiodor Dostoievski, Alexandre Dumas, Erri de Luca, Mario Rigoni Stern, Charles-Albert Cingria, Gustave Roud, Georges Simenn et j'en oublie...
Mes poètes préférés?
Charles Baudelaire, Paul Verlaine, Dante Alighieri, Giacomo Leopardi, Pétrarque, Rainer-Maria Rilke, Ossip Mandelstam, Anna Akhmatova, Fernando Pessoa, Mahmoud Darwich, Emily Dickinson, René Char, Louis Aragon, Paul Eluard, Maurice Chappaz, Jean-Michel Maulpoix, Abdellatif Laâbi, les auteurs de la Bible, et tant d'autres...
Mes héros dans la fiction?
Heatcliff ("Les hauts de Hurlevent"), Edmond Dantès ("Le comte de Monte Cristo"), Prospero ("La tempête").
Mes héroïnes favorites dans la fiction?
Cathy ("Les hauts de Hurlevent"), Tatiana ("Le songe d'une nuit d'été"), puis la Tosca et Carmen.
Mes compositeurs préférés?
Wolfgang-Amadeus Mozart, Franz Liszt, Jean-Sébastien Bach, Franz Schubert, Gustav Mahler, Ludwig van Beethoven, Joseph Haydn, Frédéric Chopin, Serge Rachmaninov, Antonio Vivaldi, Robert Schumann, Hector Berlioz, Alexander Scriabin, Bela Bartok, John Coltrane et (pour la chanson...) Barbara. Et ceux qu'il est injuste de ne pas mentionner...
(à suivre)
08:46 Écrit par Claude Amstutz dans Abdellatif Laâbi, Albert Camus, Alexander Scriabin, Anna Akhmatova, Barbara, Bela Bartok, Charles Baudelaire, Charles-Albert Cingria, Erri de Luca, François Mauriac, Franz Liszt, Franz Schubert, Frédéric Chopin, Georges Simenon, Guido Ceronetti, Gustave Roud, H.B. dit Stendhal, Hector Berlioz, Jean-Michel Maulpoix, Joseph Haydn, Le questionnaire Marcel Proust, Louis Aragon, Mahmoud Darwich, Mario Rigoni Stern, Maurice Chappaz, Paul Eluard, Rainer-Maria Rilke, René Char, Robert Schumann, Serge Rachmaninov, Simone Weil, William Shakespeare, Wolfgang Amadeus Mozart | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : autobiographie | | Imprimer | Facebook |
23/03/2013
Lire les classiques - William Shakespeare
William Shakespeare
Que chaque fée vagabonde à travers cette maison.Nous irons au plus beau des lits nuptiauxEt il sera par nous béni:Et la lignée qui y sera crééeSera heureuse à tout jamais. Ainsi ces trois couples toujoursSeront fidèles en amour;Et les flétrissures de la natureDevront épargner leur progéniture.Ni tache, bec-de-lièvre ou cicatrice,Aucune des marques funestesQue l'on redoute à la naissance,Ne doit atteindre leurs enfants. Que chaque fée vienne répandreCette rosée sacrée des champs,Et qu'elle bénisse chaque chambre du palaisD'une douce paix,Et que le maître en soit béni.William Shakespeare, Le songe d'une nuit d'été - édition bilingue (coll. Folio Théatre/Gallimard, 2003)
traduction de l'anglais par Jean-Michel Déprats
image: Sandro Botticelli, Simonetta Cattaneo Vespucci, 1974 (robswebstek.com)
17:07 Écrit par Claude Amstutz dans Lire les classiques, Littérature étrangère, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie; théâtre; anthologie; livres | | Imprimer | Facebook |
07/01/2013
Les pièces de Shakespeare 8b
Roméo et Juliette
17:05 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; théâtre; livres | | Imprimer | Facebook |