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26/01/2014

Morceaux choisis - Erri de Luca

Erri de Luca

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Vis en aventureux comme font les saints, les cigognes,
vis en desséché comme fait l'herbe en cas de sécheresse,
elle se blottit sous terre pour renaître sous l'averse.
Vis en pollen gaspillé un million de fois
sur les trottoirs, les cailloux
et une seule par hasard dans l'ovaire.
Vis en déserteur d'une guerre,
proclame les vaincus non pas le vainqueur,
trinque à l'insurrection des cibles.
Prends par le bras petite soeur la mort
qui a déjà dû te chercher plusieurs fois,
dis-lui que tu l'invites au cinéma, qu'on donne ta vie,
assise à ta droite,
dis-lui de se préparer,
c'est toi qui passeras la prendre à cette heure-là.
 

Erri de Luca, Aller simple  - édition bilingue (Gallimard, 2012)

traduit de l'italien par Danièle Valin

image: Giuseppe Tornatore, Cinema Paradiso - film (1989)

25/01/2014

Cédric Morgan

9782752901019.gifCédric Morgan, Oublier l'orage (Phébus, 2005)

Dans sa maison de l'île de Groix, Jason. médecin généraliste de son état, ouvre chaque jour ses fenêtres sur la rive où la très jeune Arthure, compagne de ses treize ans, fut retrouvée un jour noyée et nue. C'était en 2012, par un été torride que nul n'a oublié. dans une France livrée mieux que jamais à l'ordre moral - le chef du parti intégriste chrétien était installé à l'Elysée et les milices chargées de combattre l'impudicité faisaient la loi dans la rue et jusqu'au sein des familles...

Si vous ne savez quel roman entreprendre, choisissez vite celui-ci, sans hésiter. Il nous entraîne sur les pas de trois adolescents insouciants, confrontés au tragique de l'existence. Le narrateur, qui aura connu auprès de cette jeune fille ses premiers émois, cherche à comprendre, plus tard, le mystère qui a entouré sa mort. Une sensibilité à fleur de peau et une poésie instinctive, aussi discrète que son auteur : Magnifique! 

05:15 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature: roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

24/01/2014

Morceaux choisis - Marcel Proust

Marcel Proust

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Les souvenirs d'amour ne font pas exception aux lois générales de la mémoire, elles-mêmes régies par les lois plus générales de l'habitude. Comme celle-ci affaiblit tout, ce qui nous rappelle le mieux un être, c'est justement ce que nous avons oublié, parce que c'était insignifiant, et que nous lui avons ainsi laissé toute sa force. C'est pourquoi la meilleure part de notre mémoire est hors de nous, dans un souffle pluvieux, dans l'odeur de renfermé d'une chambre ou dans l'odeur d'une première flambée, partout où nous retrouvons de nous-mêmes ce que notre intelligence, n'en ayant pas l'emploi, avait dédaigné, la dernière réserve du passé, la meilleure, celle qui, quand toutes nos larmes semblent taries, sait nous faire pleurer encore. 

Marcel Proust, A la recherche du temps perdu - A l'ombre des jeunes filles en fleurs (Bibliothèque de la Pléiade/Gallimard, 1954)

image: Odilon Redon, Béatrice / 1885 (art-kingdom.com)

00:19 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; morceaux choisis; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

23/01/2014

La citation du jour

Louis Calaferte

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Bien entendu, je ne suis ni celui-ci, ni celui-là, ni un autre, ni comme ça, ni autrement, ni tout à fait différent, ni ce que vous croyez, ni ce que je pense, ni ce mensonge, ni ce qu'on suppose, ni ce que je laisse voir, ni ce que je prétends, ni ce que j'invente, ni ce qu'on dit, ni ce que j'approuve, ni ce qui m'est défendu, ni ce que je rêve, ni rien de tout cela. Je suis tel que je suis. 

Louis Calaferte, Choses dites (Cherche-Midi, 1997)

00:09 Écrit par Claude Amstutz dans La citation du jour, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : citation; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

22/01/2014

Le poème de la semaine

Maurice Chappaz

Notre vie avec ses oeuvres
ne dure pas plus qu'un paquet de tabac,
y compris le pays où j'attends;
telle la petite fumée qui s'échappe
comme si j'étais cette petite fumée
au moment où la pipe reste chaude dans la main
après avoir été expirée.
 
Les années s'éteignent.
 
Le savoure la dernière braise.
 
Je trébuche après avoir fumé
entre un "Pater" et un "Ave".
J'ouvre, je ferme les yeux.
Tout se mélange,
et dans ma mémoire qui s'efface
je me retrouve avec les petits lacs
qui bougent dans les montagnes
telles des paupières.
 
Le soleil à peine disparu,
il y eut une giclée de lune:
le croissant s'infléchit très jaune
dans une échancrure de la montagne,
une gorge l'avale.
 
Elle surgit,
brille de plus en plus,
m'éblouit.
 
D'un instant à l'autre,
je vois deux lunes
qui voisinent puis s'enfoncent.
 
De nouveau une seule lèche les ténèbres.
Un brasier de feu remue,
enfin quelques tisons se dissipent dans les rochers.
 
Mes pensées me dépassent,
filent en moi, obscures, tronquées,
s'évanouissent en traits plus noirs que la nuit.
Elle limpidement obscure.
 
Il y a des traits noirs.
 
Ces traits noirs sont de petits oiseaux inconnus,
leurs ailes cernent en allées et venues
les parois du chalet,
à peine ai-je le temps de les apercevoir. 
 
 
Quelques traces de craie dans le ciel, 
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

 

21/01/2014

Carlos Liscano

9782264052575.jpgCarlos Liscano, L'écrivain et l'autre (coll. 10-18/UGE, 2011)

Avec cet essai, Carlos Liscano, en proie à la paralysie de la plume, à l’impossibilité de donner corps à un nouveau roman, s’interroge sur le métier d’écrivain, son lien à la littérature, de même que son rapport à la liberté, à la vie réelle, à la solitude, à la création.

De l’écriture, il nous dit qu'elle est : Une petite goutte à peine tombée du compte-gouttes. La faire couler, la pousser avec la pointe de la plume. Trouver une forme qui rappelle quelque chose, un visage, une situation. Puis la perdre parce qu’une autre ligne la traverse. Et repartir à la recherche, essayer à nouveau de trouver dans le noir sur le blanc autre chose que le hasard ou l’ennui.

Plus loin, sur le métier, il ajoute: Nous, les petits écrivains, nous savons que nous avons les mêmes inquiétudes et les mêmes souffrances que les grands. Cela ne fera pas de nous des grands, jamais. Mais nous ne pouvons que le reconnaître et continuer.

Même chez nous autres, qui nous essayons - maladroitement la plupart du temps - à la correspondance, aux papiers d’opinion ou aux passions partagées, le miroir qui nous est tendu prête à réfléchir: Ecrire sur l’écrivain et sur la littérature, est-ce de la littérature? Ce n’est peut-être qu’un prétexte, raconter pour se raconter. Parce que c’est aussi de cette façon qu’on peut prétendre à devenir un autre, qu’on peut prétendre à dire: Je suis là, j’essaie de raconter la seule chose qui ait vraiment du sens, à savoir le combat contre la mort, le désir ardent de tout voir avant de disparaître, de laisser un témoignage de ce que j’ai vu.

L’écrivain et l’autre respire d’une sincérité, d’une recherche, d’une lucidité dont bien des auteurs actuels – francophones, surtout! – enfermés dans un système d’écriture ou une construction littéraire privée de sens, pourraient s'inspirer, eux qui n’ont bien souvent plus rien à nous dire. Ce qu’on pourrait désigner comme le mensonge en littérature, à soi-même pour commencer, envers le lecteur ensuite...

07:30 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Littérature sud-américaine | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature: essai; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

20/01/2014

Lire les classiques - Paul Verlaine

Paul Verlaine

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Il est des jours - avez-vous remarqué? -
Où l'on se sent plus léger qu'un oiseau, 
Plus jeune qu'un enfant, et, vrai! plus gai 
Que la même gaieté d'un damoiseau.
 
L'on se souvient sans bien se rappeler...
Évidemment l'on rêve, et non, pourtant.
L'on semble nager et l'on croirait voler.
L'on aime ardemment sans amour cependant
 
Tant est léger le coeur sous le ciel clair 
Et tant l'on va, sûr de soi, plein de foi 
Dans les autres, que l'on trompe avec l'air 
D'être plutôt trompé gentiment, soi.
 
La vie est bonne et l'on voudrait mourir, 
Bien que n'ayant pas peur du lendemain, 
Un désir indécis s'en vient fleurir, 
Dirait-on, au coeur plus et moins qu'humain.
 
Hélas ! faut-il que meure ce bonheur? 
Meurent plutôt la vie et son tourment!
O dieux cléments, gardez-moi du malheur 
D'à jamais perdre un moment si charmant.

Paul Verlaine, Poèmes divers, dans: Oeuvres poétiques complètes (Bibliothèque de la Pléiade/Gallimard, 2000)

image: associationfloribunda.blogspot.com

10:14 Écrit par Claude Amstutz dans Lire les classiques, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie; anthologie; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

19/01/2014

Musica présente - 86 Otto Klemperer

Otto Klemperer

chef d'orchestra allemand, 1885 - 1973

*

Gustav Mahler

Das Lied von der Erde

"Abschied"

(Christa Ludwig, New Philharmonia Orchestra)


00:07 Écrit par Claude Amstutz dans Elisabeth Schwarzkopf, Ludwig van Beethoven, Musica présente, Musique classique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique classique | |  Imprimer |  Facebook | | |

18/01/2014

Morceaux choisis - Pierre-Alain Tâche

Pierre-Alain Tâche

Dans l'embellie à peine moins frileuse,
où tremble un vol de moucherons,
je vis dans l'échancrure des bourgeons.
 
On dira qu'une abeille m'égare:
des fleurs, encore des fleurs...
Et qu'en est-il des cris, des pleurs,
des vies que l'on vole aux quatre vents?
 
J'assume la futilité de ma bouche.
Elle ne fut jamais infidèle
aux leçons de l'insecte, au devoir de louer,
dans la tourmente de mon temps
- et quand bien même j'entendais.
 
Car le pire eut été, face à l'horreur,
de renoncer; et d'éconduire la beauté.
 
 
Quelques traces de craie dans le ciel, 
Anthologie poétique francophone du XXe siècle 

00:14 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Littérature suisse | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

16/01/2014

La citation du jour

Jean Anouilh

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Ce n'est pas tout d'avoir de jolis yeux, il faut qu'une petite lampe s'allume derrière. C'est cette petite lueur qui fait la vraie beauté.

Jean Anouilh, L'invitation au château (coll. Folio Théâtre/Gallimard, 2012)

image: Yigal Ozeri (liveinternet.ru)

07:43 Écrit par Claude Amstutz dans La citation du jour, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : citation; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |