20/11/2013
Le poème de la semaine
Pierre Reverdy
La vie est simple et gaieLe soleil clair tinte avec un bruit doux Le son des cloches s'est calmé Ce matin la lumière traverse tout Ma tête est une lampe ralluméeEt la chambre où j'habite est enfin éclairée Un seul rayon suffitUn seul éclat de rireMa joie qui secoue la maison Retient ceux qui voudraient mourir Par les notes de sa chanson Je chante fauxAh que c'est drôleMa bouche ouverte à tous les vents Lance partout des notes folles Qui sortent je ne sais comment Pour voler vers d'autres oreilles Entendez je ne suis pas fouJe ris au bas de l'escalier Devant la porte grande ouverte Dans le soleil éparpillé Au mur parmi la vigne verteEt mes bras sont tendus vers vous C'est aujourd'hui que je vous aime. Quelques traces de craie dans le ciel,Anthologie poétique francophone du XXe siècle
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19/11/2013
Musica présente - 87 Solomon Cutner
Solomon Cutner
pianiste anglais, 1902 - 1988
*
Edvard Grieg
Piano concerto No 1 in A Minor, Op 16
(Philharmonia Orchestra, Herbert Menges)
pour Depi P
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18/11/2013
Morceaux choisis - Hermann Hesse
Hermann Hesse
merci à Catherine A
Toutes les fleurs veulent se changer en fruits,Toute matinée veut devenir soirée,Sur terre rien n’est éternité,Si ce n’est le mouvement, le temps qui fuit. Même le plus bel été veut voir une foisLa nature qui se fane, l’automne qui vient.Reste tranquille, feuille, garde ton sang-froidLorsque le vent veut t’enlever au loin. Poursuis tes jeux et ne te défends pas,Laisse les choses advenir sans heurts,Laisse enfin le vent qui te détachaTe conduire jusqu’à ta demeure.Hermann Hesse, Feuille morte, dans: Eloge de la vieillesse (coll. Livre de poche Biblio/LGF, 2003)
image: Les Saules, Cologny / Suisse (2012)
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16/11/2013
La citation du jour
Maurice Zundel
Qu'est-ce que la vie? Quelle mystérieuse solidarité fait concourir à son éclosion la terre, qui la porte et la nourrit, l'air qui la vivifie, la lumière qui la colore, le rythme des saisons et la cadence des astres? Tout l'univers collabore ici par des milliers de liens, dont ma raison ne peut même concevoir le dénombrement. Mais tout cet immense engrenage est aveugle, mais toute cette beauté qui s'offre à moi avec tant de grâce exquise s'ignore elle-même. Capable d'éveiller en moi tant de pensées elle est sans pensée elle-même. Suscitant ma tendresse, elle est sans amour. Le chef-d'oeuvre est aveugle; si chargé d'intelligibilité pourtant, il révèle l'intelligence qui l'a conçu. Une pensée divine s'incarne ici, la tendresse créatrice se penche sur la petite fleur: Dieu l'aime.
Maurice Zundel, A l'écoute du silence (Téqui, 2011)
image: Emmanuel Steffan (http://h2.mabellephoto.com)
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15/11/2013
Morceaux choisis - Yorgos Thèmelis
Yorgos Thèmelis
C'est pour toi que j'aime la lumièreLes hommes les arbres qui te ressemblentTout ce qui bouge et respire et la pierre éternelleEt le flot partageant tes espacesEt l'eau chantant l'amour C'est pour toi et c'est toiQui marches dans les miroirsEt partout dans les chosesMes soeurs si proches Et cette table tendre qui voitDans son sommeil les deux ailes de tes mainsEt cette table tendre qui entendTon écho secret dans son épais silence C'est mon coeur qui te soutient comme un drapeauC'est mon coeur qui t'accueille comme un ciel
Yorgos Thèmelis, C'est pour toi, dans: Michel Volkovitch, Anthologie de la poésie grecque contemporaine 1945-2000 (coll. Poésie/Gallimard, 2000)
image: Miroir - Grèce classique, Ve siècle avant J.C. / Le Louvre (pinterest.com)
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Les pièces de Shakespeare 10b
Henry V
En 1989, Kenneth Branagh - après Laurence Olivier et les adaptations télévisées de la Royal Shakespeare Company - porte à l'écran Henry V. Aux côtés de Derek Jacobi, Simon Shepherd et James Larkin, Kenneth Branagh interprète le rôle de Henri V. La scène III de l'Acte IV, présentée ici, est celle du célèbre discours que Henry V déclame devant ses troupes avant la Bataille d'Azincourt. La traduction française - de Jean-Michel Déprats, en extrait - a été ajoutée ci-dessous.
William Shakespeare, Henry V (coll. Folio Théâtre/Gallimard, 1999)
traduit de l'anglais par Jean-Michel Déprats
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Les pièces de Shakespeare 10a
Henry V
Avec une certaine ironie, le public français considère souvent Henry V - comme on a pu le lire voici quelques années dans les colonnes de Libération - l'une des pièces les moins palpitantes de Shakespeare! Il n'est pas étonnant non plus qu'au Royaume-Uni, elle demeure l'une des plus populaires: et pour cause...
En effet, si Henry V nous raconte la vie de ce roi dont le règne n'aura duré que neuf ans, l'histoire a retenu qu'après le règne agité de son père, Henry IV, il a incarné - en quelques traits de sa personnalité - la vertu, la droiture, la sincérité, la foi. Mais ces dispositions ne pèseraient pas lourd sans la puissance étendue de l'Angleterre sous son ère, dont le point déterminant se situe lors de la célèbre Bataille d'Azincourt, où, avec 6'000 hommes à peine, il inflige l'une des plus cinglantes défaites au Royaume de France, malgré ses 18'000 combattants. A Hardricourt - alors que la progression de l'armée anglaise a vu tomber Rouen et marche sur Paris - Henry V demande la main de Catherine de Valois, fille du roi Charles VI, héritant du même coup de l'Aquitaine et de la Normandie. Reconnu par le Traité de Troyes comme héritier et régent de France, tous les états d'Europe sont désormais sous son influence, mais son ascension fulgurante est interrompue à Vincennes, en 1422, où il meurt d'une dysenterie à l'âge de 35 ans: jeune donc, comme Alexandre le Grand...
La pièce de Shakespeare s'attache en priorité à faire revivre sous nos yeux un homme d'état - un vrai - pour lequel il éprouve une authentique admiration. Redoutable diplomate, fin stratège militaire, habile en paroles et doté d'un charisme politique exceptionnel, il se révèle aussi manipulateur, refoulant au fond de lui-même ses doutes, les incertitudes de l'histoire, notamment avant la Bataille d'Azincourt où il prononce devant ses troupes un discours célèbre entre tous - voir l'annexe 1b - dont la détermination affichée n'est peut-être pas le reflet de son intime conviction. Mais qu'importe, puisque seul le résultat compte et que les soldats lui emboîtent le pas et se reconnaissent en lui!
Shakespeare s'est sans doute laissé emporter par sa vénération pour un roi personnifiant l'unité de la Nation, le courage et la domination de l'Angleterre, à travers ses caricatures et moqueries envers la France, plongée alors dans un chaos indescriptible. Bien des critiques littéraires anglo-saxons - dont Harold Bloom - soulignent non sans humour, que Henri V est un homme qu'on admire certainement, auquel on ne peut résister en raison de sa force de persuasion; mais l'aimer? Rien n'est moins sûr, car sa sécheresse de coeur - le prix payé pour sa réussite et ses victoires -, son insolence typiquement britannique ou son autoritarisme n'abondent pas dans ce sens.
Mais l'histoire effacera ces ombres singulières pour retenir ces mots: Faites-nous jurer que vous valez autant que vos origines, ce dont je ne doute pas, puisqu'à aucun de vous, si modeste qu'il soit ne manque dans les yeux l'éclat de la noblesse...
Et comme on voudrait aujourd'hui que nos politiques sachent parler ainsi...
William Shakespeare, Henry V (coll. Folio Théâtre/Gallimard, 1999)
traduit de l'anglais par Jean-Michel Déprats
Harold Bloom, Shakespeare - The Invention of the Human (Fourth Estate, 1998)
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14/11/2013
Henning Mankell
Henning Mankell, L'homme qui souriait (Seuil, 2005)
Imaginez un avocat, rentrant chez lui en voiture, par un épais brouillard. Il aperçoit, au milieu de la route, une chaise. Intrigué, il descend de voiture et découvre sur ladite chaise, un mannequin grandeur nature. Ce sera la dernière vision de sa vie… Ainsi commence le génial roman de l’auteur – entre autres - déjà de deux chefs d’œuvres, La cinquième femme et Les morts de la Saint Jean, parus en poche. Peinture crépusculaire d’une société suédoise malade et d’une justice corrompue où, plus que jamais, les doutes de l’inspecteur Wallander, son regard pessimiste sur le monde qu’il côtoie, ajoutent une dimension humaine très personnelle à un suspense exceptionnel.
Egalement disponible en coll. Points (Seuil, 2006)
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13/11/2013
Le poème de la semaine
Paul Claudel
merci à Marie-Elisabeth C
Paul, il nous faut partir pour un départ plus beau!Pour la dernière fois, acceptant leur étreinte,J'ai des parents pleurants baisé la face sainte.Maintenant je suis seul sous un soleil nouveau. Tant de mer, que le vent lugubre la ravage,Ou quand tout au long du long jour l'immensitéS'ouvre au navigateur avec solennité,Traversée, et ces feux qu'on voit sur le rivage, Tant d'attente et d'ennui, tant d'heures harassées,L'entrée au matin au port d'or, les hommes nus,L'odeur des fleurs, le goût des fruits inconnus,Tant d'étoiles et tant de terres dépassées Ici cet autre bout du monde blanc et puisRien! de ce cœur n'ont réfréné l'essor farouche.Cheval, on t'a en vain mis le mors dans la bouche.Il faut fuir! Voici l'astre au ciel couleur de buis. Voici l'heure brûlante et la nuit ennuyeuse!Voici le Pas, voici l'arrêt et le suspens.Saisi d'horreur, voici que de nouveau j'entendsL'inexorable appel de la voix merveilleuse. L'espace qui reste à franchir n'est point la mer.Nulle route n'est le chemin qu'il me faut suivre;Rien, retour, ne m'accueille, ou, départ, me délivre.Ce lendemain n'est pas du jour qui fut hier. Quelques traces de craie dans le ciel, Anthologie poétique francophone du XXe siècle
07:58 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |
12/11/2013
François Mauriac
François Mauriac, Genitrix (Coll. Livre de poche, 1967)
Mathilde Cazenave morte, sa belle-mère jubile; elle va pouvoir reconquérir totalement son fils bien-aimé. Félicité a tort de se réjouir trop vite car sur le visage apaisé de la jeune morte, Fernand entrevoit ce qu'aurait pu être le bonheur avec Mathilde. Qui l'a empêché de s'entendre avec elle sinon sa mère? Vieil enfant égoïste et gâté, il se retourne alors contre cette genitrix coupable de l'avoir trop choyé. Défaite temporaire dont François Mauriac analyse les phases avec une lucidité sans complaisance dans ce roman âpre et poignant. L’un des plus beaux romans de Mauriac! L’histoire de Fernand, en porte à faux entre sa mère dominatrice et son épouse sur le point de mourir, partageant leur vie sous un même toit, baigne dans une atmosphère plus cruelle que dans Le noeud de vipères et moins désespérée que dans Le sagouin, et le style éblouissant de Génitrix séduit comme au jour de sa parution!
08:50 Écrit par Claude Amstutz dans François Mauriac, Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | | Imprimer | Facebook |