24/07/2012
Musica présente - 23 Maria Joao Pires
Maria Joao Pires
pianiste portugaise, née en 1944
*
Jean Sébastien Bach: French suite No 2 in C minor, BWV 813
Robert Schumann: Arabeske, Op 18
Franz Schubert: Moments musicaux No 6 in A major, D 780
Frédéric Chopin: Nocturne No 1 in C minor, Op 48
Frédéric Chopin: Nocturne No 2 in F minor, Op 48
Frédéric Chopin: Nocturne No 2 in E major, Op 62
Wolfgang Amadeus Mozart: Piano Concerto No 14 in E major, K 449
(Berliner Philharmoniker, Claudio Abbado)
Wolfgang Amadeus Mozart: Piano Sonata No.16 in C major, K 545
Wolfgang Amadeus Mozart: Piano Sonata No.4 in E major, K 282
Wolfgang Amadeus Mozart: Piano Sonata No 13 in B major, K 333
Wolfgang Amadeus Mozart: Piano Sonata No 11 in A major, K 331
merci à Judith S
22:47 Écrit par Claude Amstutz dans Claudio Abbado, Franz Schubert, Frédéric Chopin, Jean Sébastien Bach, Maria Joao Pires, Musica présente, Robert Schumann, Wolfgang Amadeus Mozart | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique classique | | Imprimer | Facebook |
La citation du jour
Fernando Pessoa
L'ombre d'un arbre, mes enfants, est préférable à la connaissance de la vérité, parce que l'ombre de l'arbre est vraie tant qu'elle dure, et la connaissance de la vérité est fausse dans la connaissance elle-même. Le vert des feuilles, pour vous faire comprendre, est préférable à une grande pensée, car vous pouvez montrer aux autres le vert des feuilles, et vous ne pourrez jamais montrer aux autres une grande pensée. Nous naissons sans savoir parler et nous mourrons sans avoir su dire.
Fernando Pessoa, Contes fables et autres fictions (La Différence, 2011)
image: Carmen Cordelia
08:14 Écrit par Claude Amstutz dans La citation du jour, Littérature étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : citations; livres | | Imprimer | Facebook |
23/07/2012
Au bar à Jules - Du mime
Un abécédaire - M comme mime
C'est en 1973 que Lindsay Kemp réalise son spectacle le plus subversif, cruel, d'une beauté vénéneuse, intitulé Flowers, un hommage à Jean Genêt et à Notre-Dame-des-fleurs, l'une des oeuvres majeures de son auteur. Mais faisons un petit retour en arrière: Lindsay Kemp est né en 1938 à South Shields. Son père était marin, disparu en mer en 1940. Avec sa mère, ils déménagent à Bradford où il étudie la danse avec Hilde Holger et le mime avec Marcel Marceau. Dès son plus jeune âge, il eut la danse dans le sang: Je dansais sur la table de cuisine pour distraire les voisins. Je veux dire, c'était une surprise pour eux de voir un petit garçon tout maquillé, dansant sur les pointes. Finalement, cela en était devenu un peu trop pour ma mère, et elle décida de m'envoyer en pension à l'âge de huit ans, espérant que cela me donnerait un peu de bon sens.
Acteur, mime et chorégraphe, Lindsay Kemp devient connu du grand public en 1968 au Festival d'Edimbourg et dans sa classe, voit s'épanouir Kate Bush et surtout David Bowie qui conservera du passage dans sa troupe, un goût inné pour la mise en scène provocatrice et un registre de créations ambiguës auquel son physique se prête avec ingénuosité. Lindsay Kemp apparaît dans plusieurs films, dont Sebastiane et Jubilee de Derek Jarman, ainsi que dans The Wicker Man de Robert Hardy. Plus important, parmi ses spectacles en qualité de mime et de danseur, mentionnons A Midsummer Night's Dream, Nijinsky, Big Parade et Cerentola.
Avec la Lindsay Kemp Company, la pantomime Flowers est interprétée pour la première fois à Londres, en 1968 et connaît un succès considérable - prélude à une tournée internationale - dépassant, et de loin, la communauté gay. Une mise en scène hallucinante, avec en toile de fond, les musiques de Wolfgang Amadeus Mozart, Johann Strauss et Pink Floyd. Une descente aux enfers sauvage, burlesque, magique, destructrice et pourtant follement drôle, laissant au coeur du spectateur - et j'étais du nombre - un souvenir inoubliable: tout le parfum sulfureux d'un Jérôme Bosch revisité par un Francis Bacon pour la violence des traits, l'expression de la sexualité et le sens du défi permanent.
En 2002, Lindsay Kemp quitte l'Angleterre pour s'installer en Italie. Il y réalise parmi d'autres créations Salieri, Elizabeth's Last Dance, L'oiseau de feu et L'histoire du Soldat.
Avec le lien ci-dessous - vimeo.com - vous pouvez si le coeur vous en dit, visionner en films et images plusieurs spectacles de Lindsay Kemp...
images: Lindsay Kemp
sources: Wikipedia (http://en.wikipedia.org/wiki/Lindsay_Kemp)
extrait de Flowers: Maya Cusell / Madrid 1986 (http://vimeo.com/9805444)
Jean Genêt, Notre-Dame-des-fleurs (coll. Folio/Gallimard, 2012)
23:36 Écrit par Claude Amstutz dans Au bar à Jules - Un abécédaire 2012, Littérature francophone, Wolfgang Amadeus Mozart | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; musique; danse; livres | | Imprimer | Facebook |
Mary Wesley
Mary Wesley, Rose sainte-nitouche (Héloïse d'Ormesson, 2009)
Les éditions Héloïse d’Ormesson ont la bonne idée de rééditer les romans de cette grande dame des lettres britanniques, née en 1912 et décédée en 2002, qui a publié son premier texte à l’âge de soixante-dix ans ! Après La pelouse camomille, voici donc Rose sainte-nitouche. Sur un fond de guerre entraînant les serments hâtifs, Rose représente aux yeux d’un entourage volontiers snob, mondain ou cynique, la parfaite caricature de l’épouse conventionnelle, soucieuse d’assurer sa sécurité matérielle avec un mari affectueux mais terne, plutôt qu’une femme capable de partager un amour passionné au-delà des convenances sociales. Pourtant, la réalité est trompeuse, car Rose, au décès de son conjoint Ned, se remémore ses cinquante années de mariage dont le fil conducteur, l’attachant Mylo, ne l’entraîne pas vraiment sur les chemins de la bienséance attendue… Les personnages – même les insupportables – échappent à la banalité et aux stéréotypes. Les situations sont souvent désopilantes, telles la première rencontre avec son futur mari sur un court de tennis ou les souvenirs de sa nuit de noces. Les dialogues de cette délicieuse comédie à l’anglaise sont vifs, caustiques, tranchants. Bref, il faut lire Mary Wesley, vite ! Vous ne le regretterez pas et passerez un agréable moment en sa compagnie !
Egalement disponible en coll. J'ai Lu (Flammarion, 2010)
00:16 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature étrangère, Mary Wesley | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; roman; livres | | Imprimer | Facebook |
21/07/2012
Morceaux choisis - Charles Ferdinand Ramuz
Charles Ferdinand Ramuz
Faut-il parler de ce petit voyage? Faut-il dire comment on prend le tramway sur une place tout à côté de la Cannebière, et il ne part pas tout de suite, certes, n'étant pas pressé, mais il fait si beau? C'est un matin d'automne à Marseille, et l'automne y est chaud comme les étés de chez nous, mais une brise vient de la mer; qu'est-ce qu'il y a donc qu'on soit pareillement heureux?
Est-ce l'animation de la rue, toutes ces filles en cheveux, si parfaitement coiffées et chaussées (et le reste va comme il peut), l'heureux débraillé d'une foule qui tourne vite à la cohue, ces uniformes, ces cols bleus, ces turbans, ces robes, ces fez? Mais il se fait, comme ça, tout de suite, un changement dans votre nature: tout vous paraît à sa place, tout vous paraît arrangé pour le mieux. On demande à l'employé quelle est la durée du trajet; il n'y a pas que l'accent qui enchante quand il vous répond sans sourire: Deux heures, sauf "accidents de route". Y croirait-on, qu'ils ne nous feraient pas peur, ces accidents de route-là; on s'amuse d'avance d'un déraillement possible; ou bien est-ce qu'il y aurait des pilleurs de trains, comme dans le Far-West, qui seraient embusqués, quelque part, au bord de la route, guettant l'Anglais cossu, qui, d'ailleurs, fait défaut?
Je voyage en compagnie de quatre ou cinq jeunes gens du pays, qui viennent de passer devant le conseil de révision, à cause de quoi ils ont arboré à leur boutonnière des flots de rubans tricolores. Ils parlent entre eux posément; ils sont maigres, plutôt grands et pas toujours noirs, graves, avec des gestes sobres. Rien de cette grosse vulgarité, que je craignais de trouver ici; un mélange de réserve et de confiance dans la bonhomie qui tout de suite m'avait frappé, étant juste le contraire de ce à quoi je m'attendais; une apparente naïveté parfois qui n'est qu'un masque mis sur beaucoup de finesse, de l'ardeur peut-être, mais qui se contient.
On longe d'abord par derrière (autant qu'il m'en souvient) les entrepôts du port; ensuite seulement on commence à monter. C'est un quartier d'usines et surtout de savonneries, comme on le devine à l'odeur; de grandes cheminées fument sur notre gauche, sans parvenir pourtant à ternir la pureté du grand ciel, qui est presque noir, tant il est bleu. Plus on va, plus on s'élève: les usines ont fait place à des petites maisons basses, nues, simples de lignes, passées à la chaux, le toit de tuiles jaunes coupé au ras des murs; alors on commence à voir se lever les premières falaises rousses, couronnées de pins; et la mer qui s'aperçoit toujours par les vides entre les feuillages est une mer qu'on domine, une mer vue d'en haut.
Il n'a pas voulu connaître les ports, les mâts entrecroisés, les coques noires des navires, ces hommes qui vont et viennent, une main sur la hanche, courbés sous le poids des sacs: son pays à lui est plus en arrière, son pays est le haut-pays. Une enseigne où on lit: Cézanne, bottier, et dont il aurait aimé la forme des lettres et la couleur, m'a averti qu'on arrivait. On atteint le haut de l'épaulement, tout à coup la pente casse, la route se met à aller à plat devant vous, même elle redescend un peu. Et le plateau tout entier se présente, dont les vallonnements, le hérissement, les cassures et sa quantité de maisons éparses (il n'y a point de villages, il y a partout seulement ces cubes gris et blancs comme posés au hasard), mènent l'oeil plus en arrière à la grande chaîne blanchâtre, au pied de laquelle Aix est assise.
Et tout à coup il m'a semblé rentrer chez moi; au lieu d'être dépaysé par la soudaineté du changement, est-ce que l'impression serait assez précise, si je disais que je me sentais, au contraire, repaysé? Il ne faudrait pourtant pas comprendre qu'on se retrouve et rien de plus: l'accent, l'allure, ces vues plongeantes, le bleu de la mer entrevu n'avaient été qu'une préparation. Il me semble rentrer chez moi, mais un chez moi ou un "chez nous" plus abouti, plus mûri, plus conscient, et s'affirmant enfin dans son intégrité.
Charles Ferdinand Ramuz, L'exemple de Cézanne, dans: Paul Cézanne (Bibliothèque des Arts, 1995)
image: Atelier de Cézanne / Aix-en-Provence (atelier-cezanne.com)
19:37 Écrit par Claude Amstutz dans Charles Ferdinand Ramuz, Littérature francophone, Littérature suisse, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; essai; morceaux choisis; livres | | Imprimer | Facebook |
20/07/2012
Musica présente - 22 Lisa della Casa
Lisa della Casa
cantatrice suisse, née en 1919
*
Richard Strauss
"Einerlei"
"Seitdem dein Aug"
Sebastian Peschko
00:19 Écrit par Claude Amstutz dans Lisa della Casa, Musica présente, Musique classique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique classique; facebook | | Imprimer | Facebook |
19/07/2012
Luigi Guarnieri
Bloc-Notes, 19 juillet / Thonon-les-Bains
Nous avons presque tous entendu parler de l'histoire d'amour ayant lié les destins de Johannes Brahms, Robert et Clara Schumann, ne serait-ce qu'à travers leur Journal intime, publié aux éditions Buchet-Chastel. Luigi Guarnieri, dans Une étrange histoire d'amour, nous raconte ainsi leur destin à travers une longue lettre que Brahms écrit à Clara, au retour de ses funérailles.
Seul élément de fiction, ce message est prétexte pour Luigi Guarnieri à nous raconter combien leur rencontre, à tous les trois, allait transfigurer à tout jamais le cours de leur vie, depuis ce jour de septembre 1853 - Johannes est alors âgé de 20 ans, Clara de 34 ans et Robert de 43 ans - où le jeune Brahms tombera follement amoureux de l'épouse de Robert Schumann: Après toutes ces années, je n'ai pas oublié la salle bondée, l'atmosphère excitante, l'enthousiasme et les applaudissements. Cette pénombre presque magique et, au centre, la lueur éblouissante de ton visage, si animé et expressif, comme en suspens au-dessus du clavier du piano. Vois-tu, avant ce jour-là,je ne pensais pas que la musique puisse créer un tel son. Je ne pensais pas que l'on puisse jouer ainsi. Pour moi ce fut une révolution. J'étais enfoncé dans le fauteuil de velours cramoisi, visage anonyme et perdu parmi des centaines de spectateurs, et pourtant il me semblait que tu ne jouais que pour moi, moi seul, et les notes ne parlaient qu'à moi, qui fixais ta robe couleur d'encre, remarquais le rouge sur tes joues, et espérais te voir rester là pour toujours, clouée au tabouret, les yeux rivés sur la partition, un sourire grave, à peine esquissé, sur les lèvres.
Les âmes romantiques apprécieront cette appréhension de l'amour qui passera par des émotions rares faites de bonheurs et de souffrances mêlés. Evitant toute mièvrerie ou sensiblerie inutile, l'auteur s'est immergé totalement dans cet univers - qui se prête si bien à la langue italienne -, célèbrant outre la noblesse des sentiments, cette passion partagée pour la musique, clef de voûte de cette histoire dont le coeur est bien celui de Clara Schumann: une forte personnalité - de même que deux autres épouses ou soeurs de compositeurs: Alma Mahler et Fanny Mendelssohn -, une renommée de pianiste et des oeuvres musicales - une quarantaine - dont aujourd'hui encore les concerts et enregistrements sont plutôt avares. Luigi Guarnieri nous restitue cet itinéraire de vie qui, des premiers émois du couple Schumann épouse les contours douloureux de la maladie de Robert - désordres mentaux, éloignements du réel, alcoolisme - pour se conclure dans cet amour inachevé entre Clara et Johannes Brahms sur lequel, à la mort de Robert, plânera à tout jamais l'ombre.
J'ai écrit beaucoup de phrases au vent, mon amie, et je ne sais pas si, au moins cette fois, j'ai réussi à trouver en moi les mots pour t'ouvrir mon coeur. Pour te dire qu'entre un millier d'autres femmes, dans le désert du monde, je t'ai reconnue. Que toi seule vivais, toi seule existais, pour moi. C'était tout ce que je voulais t'écrire, et je ne sais même pas si j'en ai été capable. Même si j'ai toujours su que dans la vie, il n'y a pas d'autre choix qu'aimer, être aimé ou mourir. Et moi, je t'ai aimée plus que moi-même, plus que quiconque ou que n'importe quoi au monde. Je t'enlace et t'embrasse, ma Clara bien-aimée. J'espère seulement que tu m'as aimé autant que moi, je t'ai aimée.
Sur la Scie rêveuse - sous Morceaux choisis - vous pouvez retrouver un extrait de ce récit, ainsi qu'un Nocturne de Clara Schumann, interprété par Roberto Piana.
Luigi Guarnieri, écrivain italien, est né à Catanzaro en 1962. Plusieurs de ses ouvrages ont été traduits en langue française: La double vie de Vermeer (2006), La jeune mariée juive (2007), Les sentiers du ciel (2010) et Une étrange histoire d'amour (2012), tous parus aux éditions Actes Sud.
Luigi Guarnieri, Une étrange histoire d'amour (Actes Sud, 2012)
Clara et Robert Schumann, Journal intime (Buchet-Chastel, 2009)
Régis Pouget, La maladie de Robert Schumann (Académie des Sciences et Lettres de Montpellier, 1998)
image: Clara Wieck-Schumann (chitarra.accordo.it)
22:03 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Johannes Brahms, Littérature étrangère, Littérature italienne, Robert Schumann | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; musique; livres | | Imprimer | Facebook |
Morceaux choisis - Laurent Gaudé
Laurent Gaudé
Le vent est doux. Me voici arrivé à Càlena. j'ai garé la voiture sur le petit parterre de gravier, au pied de l'abbaye. Tout est calme et la nuit est immobile. Les oliviers font un léger murmure de feuillage. L'abbaye est là, silencieuse et sombre. Je fais le tour du mur. Il est trop haut pour que je puisse apercevoir la cour intérieure. L'épaisse porte en bois est vérouillée. On dirait une forteresse à l'abandon.
Une immense tristesse m'étreint. Je n'escaladerai pas le mur. Je veux juste marcher. Un champ d'oliviers monte à flanc de colline. Il me semble parfois entendre le bruit lointain des vagues. Le calme de la terre qui m'entoure me passe dans les veines. Je n'ai plus peur. Je ne suis plus fébrile. Je m'agenouille au pied d'un olivier et je sors le dernier doigt de Cullaccio. Je le pose là, dans la terre de Càlena, pour que mon père le sente et s'en réjouisse. Je l'ai apporté comme un présent. Durant tout le voyage, je me suis fait une joie de lui montrer ce que j'avais fait. Qu'il sache que son fils était devenu un homme et qu'il se chargeait de solder les vieilles vengeances. Mais il n'y a pas de joie. Je pose le doigt dans la terre sèche de Càlena et je sais que je ne descendrai pas. Je voulais trouver l'entrée des Enfers, aller chercher mon père comme il l'avait fait avec moi. Je voulais le ramener à la vie mais je ne suis pas aussi fort que lui. Je trébuche et j'hésite. J'ai, au fond de moi, une peur que rien n'éteint.
Alors je reste là, à genoux devant l'abbaye, et je sais qu'il n'y aura pas de porte pour moi. Je n'aurai pas la force d'affronter les ombres. Elles me happeraient, me tireraient à elles, m'avaleraient et je n'y résisterais pas. Je suis faible. La vie m'a fait ainsi. Je suis un enfant blessé au ventre, un enfant qui pleure aux Enfers, terrifié par ce qui l'entoure. Pardonne-moi, mon père. Je suis venu jusqu'ici mais je ne descendrai pas. Les oliviers me contemplent en souriant avec lenteur. Je suis trop petit et mon souffle se perd dans l'air humide des collines.
Laurent Gaudé, La Porte des Enfers (coll. Babel/Actes Sud, 2010)
image: Historical pictures archives / Corbis
03:42 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; morceaux choisis; livres | | Imprimer | Facebook |
18/07/2012
Le poème de la semaine
Philippe Jaccottet
Sois tranquille, cela viendra ! Tu te rapproches, tu brûles ! Car le mot qui sera à la fin du poème, plus que le premier sera proche de ta mort, qui ne s'arrête pas en chemin. Ne crois pas qu'elle aille s'endormir sous des branches ou reprendre souffle pendant que tu écris. Même quand tu bois à la bouche qui étanche la pire soif, la douce bouche avec ses cris doux, même quand tu serres avec force le noeud de vos quatre bras pour être bien immobiles dans la brûlante obscurité de vos cheveux, elle vient, Dieu sait par quels détours, vers vous deux, de très loin ou déjà tout près, mais sois tranquille, elle vient : d'un à l'autre mot tu es plus vieux. Quelques traces de craie dans le ciel,Anthologie poétique francophone du XXe siècle
09:23 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Littérature suisse, Philippe Jaccottet, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |
La citation du jour
Epictète
Si tu veux avancer dans l'étude de la sagesse, ne refuse point, sur les choses extérieures, de passer pour imbécile et pour insensé.
Epictète, Manuel (coll. Livre de poche/LGF, 2000)
image: detente-en-poesie.over-blog.com
08:28 Écrit par Claude Amstutz dans La citation du jour, Littérature étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; spiritualité; anthologie; citation; livres | | Imprimer | Facebook |