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28/01/2015

La citation du jour

Sylvie Germain

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Elle est la peau du temps; du temps qui passe et glisse et disparaît, et sans cesse s'avance dans la clarté du jour, et sans cesse s'efface dans l'ombre, dans la brume, s'enfonce dans la nuit puis resurgit au jour. Elle est le mystérieux frisson qui parcourt la peau du temps, la fait trembler. Un frisson de fatigue, d'émoi, de tendresse ou de peine. Mais jamais de colère. Non, jamais lors de ses apparitions, il n'y eut en elle, autour d'elle, la moindre vibration de violence. Elle est la peau du temps, du temps des hommes. La tendre et vulnérable peau du visage et du corps des humains. La peau du coeur humain. Elle est l'infiniment doux frisson de compassion qui parcourt cette peau vaste comme le monde et longue comme l'histoire. Peut-être est-elle l'écho lointain de la pitié de Dieu. Cette pitié immense, immense et incessante qui parcourt le monde en suppliant qu'on la reçoive, qu'on écoute sa plainte. Cette pitié manante qui traverse l'histoire en boitant sous le fracas sans cesse recommencé des guerres, des crimes, de tout le sang versé. Mais on la chasse de partout, on ne sait qu'alourdir le poids de sa douleur, le poids de l'ombre et du sang et des larmes dans les plis de sa robe en haillons. Elle ne se lasse cependant pas d'en appeler à chacun, à tous.

Sylvie Germain, La pleurante des rues de Prague (Gallimard, 1992)

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24/01/2015

La citation du jour

Lewis Carroll

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Alice était en train de se demander (dans la mesure du possible, car la chaleur qui régnait ce jour-là lui engourdissait quelque peu l'esprit) si le plaisir de tresser une guirlande de pâquerettes valait la peine de se lever pour aller cueillir les pâquerettes, quand soudain un Lapin Blanc aux yeux roses vint à passer auprès d'elle en courant. Il n'y avait là rien de particulièrement extraordinaire d'entendre le Lapin dire entre ses dents : "Oh, là là ! Oh, là là ! je vais être en retard !" (Lorsqu'elle y repensa par la suite, elle admit qu'elle eu dû s'en étonner, mais, sur le moment, cela lui parut tout à fait naturel) ; pourtant, quand le Lapin s'avisa de tirer de son gousset une montre, de consulter cette montre, puis de se remettre à courir de plus belle, Alice se dressa d'un bond, car l'idée lui était tout à coup venue qu'elle n'avait jamais vu de lapin pourvu d'un gousset, ou d'une montre à tirer de celui-ci. Brûlant de curiosité, elle s'élança à travers champs à la poursuite de l'animal, et elle eut la chance de le voir s'engouffrer dans un large terrier qui s'ouvrait sous la haie.

Lewis Carroll, Tout Alice (coll. GF/Flammarion, 2006)

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19/01/2015

La citation du jour

Montesquieu 

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Si on ne voulait qu'être heureux, cela serait bientôt fait. Mais on veut être plus heureux que les autres, et cela est presque toujours difficile parce que nous croyons les autres plus heureux qu'ils ne le sont.

Montesquieu, Lettres persannes (coll. GF/Flammarion, 2003)

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17/01/2015

La citation du jour

Charles Ferdinand Ramuz

 

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Quand la récolte est bonne, elles sont pleines de gaieté et on les entend rire sous le fichu de couleur qu'elles se nouent autour de la tête. Elles vont, baissées, cueillant à droite, cueillant à gauche, ayant chacune une double rangée de ceps. Les hommes portent le raisin foulé à la bossette qui attend sur le chemin; ils passent entre les rangées déjà cueillies; et gare à celle qui a oublié une grappe. Un baiser par grappe oubliée, un baiser, c'est la punition! Les méchantes langues disent qu'il y en a, parmi les filles, qui font exprès d'oublier un grappillon, et que ça dépend du garçon.

Charles Ferdinand Ramuz, L'année vigneronne (Séquences, 1988) 

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15/01/2015

La citation du jour

Virginia Woolf

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La demeure possédait sa bibliothèque, une longue salle basse de plafond, tapissée de minces opuscules patinés, d'in-folio et de gros volumes de théologie. Les étagères étaient sculptées d'oiseaux picorant des grappes de fruits en bois... J'aimais cette pièce. J'aimais la vue sur la campagne qu'on avait de la fenêtre et la ligne bleue entre les arbres, au-delà de la lande, était celle de la mer du Nord. J'aimais y lire. On tirait le fauteuil pâle près de l'embrasure de façon que la lumière vienne éclairer la page par-dessus l'épaule.

Virginia Woolf, L'écrivain et la vie (coll. Rivages/Poche, 2008)

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12/01/2015

La citation du jour

 

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Jean de La Bruyère

L'on me dit tant de mal de cet homme, et j'y en vois si peu, que je commence à soupçonner qu'il n'ait un mérite importun qui éteigne celui des autres.

Jean de La Bruyère, Les Caractères ou les Moeurs de ce siècle (coll. Folio/Gallimard, 1975)

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09/01/2015

La citation du jour

André Velter

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Comment jeter encore un regard dans la tourmente où plus rien ne peut s'égarer? Poursuivre sans savoir quel seuil a été franchi, ni si le pied a pris appui de l'autre côté du mirage? Le crédit du hasard est épuisé. L'aura de la magie s'est éteinte. Je retrouve la voie violente et sage de l'illumination, quand l'expérience est un corps de lumière qui traverse la glace et les déblais, les visages, les cendres et jusqu'à la ferveur et au feu.

André Velter, L'amour extrême et autres poèmes pour Chantal Mauduit (coll. Poésie/Gallimard, 2007)

 

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01/01/2015

La citation du jour

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H.B. dit Stendhal

Toujours un petit doute à calmer, voilà ce qui fait la soif de tous les instants, voilà ce qui fait la vie de l'amour heureux. Comme la crainte ne l'abandonne jamais, ses plaisirs ne peuvent jamais ennuyer.

H.B. dit Stendhal, De l'amour (Coll. Garnier-Flammarion, 1965)

21:53 Écrit par Claude Amstutz dans H.B. dit Stendhal, La citation du jour | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : auteurs; citations; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

30/12/2014

La citation du jour

Pierre-Jean Jouve
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Il n'y a rien à raconter de l'amour sinon qu'il dure, et d'abord qu'il est, que l'on sent qu'il est, alors qu'on avait juré qu'il ne serait jamais! Qu'il est avec une chaleur sous les yeux, un tremblement dans les mains, qu'il est comme une coloration de la vie et de tous les objets, une coloration si belle et si déchirante qu'elle n'a pas le droit de baisser d'un millième de degré car aussitôt on craint qu'elle ne meure. On sent aussi que cette coloration sacrée est sous une menace perpétuelle, n'a rien de sûr, car elle dépend toujours de l'interprétation: lui tel qu'il est pour moi, moi telle que je suis pour lui, et en définitive le tourment, la force du désir viennent de ce que l'on désire à l'intérieur de soi mais dans l'autre. Aussi a-t-on tellement peur et l'amour fait-il tous ses efforts pour ressembler à un feu d'artifice.

Aventure de Catherine Crachat: Hécate (coll. Folio/Gallimard, 1991)

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25/12/2014

La citation du jour

William Shakespeare

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Non, jamais je ne planterai une seule de ces boutures dans mon jardin. De même que je ne voudrais pas que ce garçon me dise, si j'étais maquillée: c'est bien, et que ça lui donne envie de me faire l'amour. Prenez ces fleurs, c'est de la chaude lavande, de la sarriette, de la marjolaine, et puis le souci, qui se couche en même temps que le soleil et se lève en larmes en même temps que lui. Oui, toutes ces fleurs me manquent pour vous en faire des couronnes, et vous, mon doux ami, pour vous en couvrir tout entier. 

 William Shakespeare, Un conte d'hiver (Minuit, 1988) 

traduit par Bernard-Marie Koltès

image: Le Titien, Vénus d'Urbino / détail (ahsonic.tumblr.com)

08:16 Écrit par Claude Amstutz dans La citation du jour, Littérature étrangère, Théâtre, William Shakespeare | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : citations; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |