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31/03/2011

Jean Védrines

 

9782213637716.gifJean Védrines, L'Italie la nuit (Fayard, 2008)

Si vous aimez l’Italie, vous partagerez sans aucun doute mon étonnement : oui, Jean Védrines est bien un auteur français ! Pourtant, dans la description de ces villages des Pouilles – Foggia, en particulier – des anciens, gens de peu pour la plupart, qui charrient dans leur mémoire tout un pan de l’histoire de l’Italie, tous les doutes sont permis … Un aveu de l’auteur, néanmoins : L'Italie est ma patrie imaginaire. C'est le travail de toute une vie de découvrir sa patrie imaginaire. C'est un vieux tropisme chez moi. Depuis mon enfance, je suis attiré par les "châteaux en Italie". Enfin, ce qui ne gâche rien, la langue est rugueuse, délicieuse, un brin roublarde ou désopilante selon les éclairages du récit. L’amusement est garanti dans cette heureuse surprise littéraire à ne pas manquer.

 

05:44 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

30/03/2011

Le poème de la semaine

Claire Genoux


Le lac peut bien lécher mes sandales

comme un chien trop fidèle

je n'ai qu'une envie

celle de plâtrer ses rives

et de sangler sa peau battante

au brouillard hivernal

car je ne veux plus de saisons

qu'il s'obstine à dresser sur nos toits

d'un coup de plume

je ferai souffler la bise

pour assécher son eau

 


Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

05:58 Écrit par Claude Amstutz dans Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

27/03/2011

Anne-Marie Jaccottet 1b

Bloc-Notes, 27 mars / Les Saules 

Voici quelques illustrations de l'artiste Anne-Marie Jaccottet, pour notre plus grand plaisir: 

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Anne-Marie et Philippe Jaccottet, Alain Madeleine-Perdrillat, Florian Rodari, Alain Paire: Arbres, chemins, fleurs et fruits - Aquarelles et dessins d'Anne-Marie Jaccottet (La Dogana, 2008)

http://www.galerie-alain-paire.com/

04:14 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Philippe Jaccottet | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Imprimer |  Facebook | | |

Anne-Marie Jaccottet 1a

Bloc-Notes, 27 mars / Les Saules 

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On connaît mal - ou mieux, pas du tout - les aquarelles et dessins de Anne-Marie Jaccottet, épouse du poète Philippe Jaccottet. Pourtant, son oeuvre délicate, dans le sillage d'un Pierre Bonnard par exemple, a été remarquée par de grands noms de la littérature, tels Yves Bonnefoy et Pierre-Albert Jourdan.

Florian Rodari a bien cerné l'oeuvre de l'artiste, quand il nous dit: Il y a dans les paysages d'Anne-Marie Jaccottet, mais dans ses natures mortes aussi, une sorte de porosité qui permet d'y circuler sans entrave, d'aller sans cesse du dehors à l'intérieur, par des passages qui n'arrêtent pas - peaux, treillis, portières, lisières, corbeilles - contenant sans enfermer. Le peintre ne recouvre jamais toute la surface de son papier, laissant en blanc certaines parties sur lesquelles reviennent des traits de crayon. L'intention est de permettre au regard de passer vite d'un plan à l'autre, de suivre le mouvement de la lumière qui court à l'arête, bondit d'objet à objet, franchit la distance sans s'arrêter à la nature de l'obstacle. Beau souci du peintre: ne pas s'attarder, garder le sentiment de la minute heureuse.

Philippe Jaccottet, au plus près de la perception de l'artiste, ajoute: Couleurs du monde, elle ne les a pas inventées, elle ne les a pas vues en rêve ou puisées dans les livres, elle n'est même pas allé les chercher loin; elles sont là, dans les fleurs et les fruits les plus communs, données au premier venu; à dire le vrai, de plus grand prix que tous les ors du temple, les gemmes, les joaux, les diadèmes des reines et des stars: couleurs des choses qui s'ouvrent, s'épanouissent puis se fanent, des choses qui gonflent, parfument, sont respirées et quelques fois mangées, puis se flétrissent; couleurs si mystérieuses d'être si communes, jubilatoires on ne sait trop comment ni pourquoi; de la plus claire à la plus sombre, de la plus sonore à la plus sourde, saisissable entre deux nuits - et notre vie elle-même, toute vulnérable qu'elle soit, fleurissant ainsi entre deux nuits, mais celles-là plus longues et plus profondes -, produisant en fin de compte, à force de patience et de soumission, un si beau chant...

105 aquarelles, pastels, dessins de Anne-Marie Jaccottet illustrent le présent ouvrage que vient compléter un entretien de Alain Paire avec l'artiste, ainsi qu'un texte de Alain Madeleine-Perdrillat consacré à l'approche de son oeuvre.

En écho à La promenade sous les arbres, écrit par son époux, ce voyage en pointillé dans l'espace habité, lève le voile de leurs clartés mises en commun.   

Anne-Marie et Philippe Jaccottet, Alain Madeleine-Perdrillat, Florian Rodari, Alain Paire: Arbres, chemins, fleurs et fruits - Aquarelles et dessins d'Anne-Marie Jaccottet (La Dogana, 2008)

photographie: Philippe et Anne-Marie Jaccottet, à Grignan, 12 octobre 2008

http://www.galerie-alain-paire.com/

04:13 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Littérature francophone, Littérature suisse, Philippe Jaccottet, Yves Bonnefoy | Lien permanent | Commentaires (3) | |  Imprimer |  Facebook | | |

25/03/2011

Le Passe Muraille

Le Passe-Muraille, no 85, mars 2011

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En préambule à ce nouveau numéro, Jean-Louis Kuffer nous parle - à propos de la naissance d'une nouvelle collaboration du Passe Muraille avec les éditions d'Autre Part - de nos désirs respectifs de passeurs, ajoutant: cela seul compte en effet, sur fond de saturation et d'empoigne, de gros tirages et de battage: que passent de nouvelles voix à travers le bruit... Telle est bien la vocation de ce journal depuis ses origines, et le sommaire de cette édition, une fois encore je l'espère, ne vous décevra pas sur ce point.

Sommaire du Passe-Muraille no 85, Mars 2011 - "Une nouvelle voix":

p.1

Editorial, "D'autre part, entre passeurs...", par Jean-Louis Kuffer

Inédit, "Le soleil", par Douna Loup

p.3

In memoriam, "Georges Haldas: La cotte des mots de Georges", par Georges Nivat

In memoriam, "Georges Haldas a rendu son passeport", par Serge Molla

p.4

In memoriam, "Georges Haldas: l'état de poésie ou la relation plénière", par Matthias Tschabold

p.5

Philip Roth, "L'effet papillon", par Matthieu Ruf

Andrés Barba, "Une force convulsive", par Claude Amstutz

p.6

Michel Layaz, "Vers la légèreté", par Pierre-Yves Lador

Nicolas Bouvier et Thierry Vernet, "Le fétiche de l'amitié", par Sébastien Meyer

p.7

Etienne Barilier, "La grâce, le vice et la vertu", par Pierre-Yves Lador

Jean-Yves Dubath, "Une épopée intimiste", par Jean-Louis Kuffer

Alain Bagnoud, "Bohème de province", par Jean-Louis Kuffer

p.8

Frédéric Jaccaud, "Plongée dans l'abîme", par Jean-François Thomas

In memoriam, "Anne-Lise Grobéty: dernier silence d'une musicienne", par Bruno Pellegrino

p.9

Poèmes inédits, "Horlogerie minutieuse de la mémoire", par Hughes Richard

p.10

Jean-Pierre Guéno, "L'âme des lettres", par Claire Julier

Xavier Mauméjean, "Magicien de l'uchronie", par Jean-François Thomas

p.11

Mathias Zschokke, "Un candide alémanique", par Jean-Louis Kuffer

Philippe Muray, "La prétention au bonheur", par Antonin Moeri 

p.12

Jean-Louis Kuffer, "Comme un nouveau souffle", par Antonin Moeri


Pour s'abonner et communiquer: http://www.revuelepassemuraille.ch/

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23/03/2011

Le poème de la semaine

Norge


Rien qu'un petit bonheur, Suzette,

Un petit bonheur qui se tait.

Le bleu du ciel est de la fête;

Rien qu'un petit bonheur secret.


Il monte! C'est une alouette

Et puis voilà qu'il disparaît;

Le bleu du ciel est de la fête.

Il chante, il monte, il disparaît.


Mais si tu l'écoutes, Suzette,

Si dans tes paumes tu le prends

Comme un oiseau tombé des crêtes,

Petit bonheur deviendra grand.


 

Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

09:59 Écrit par Claude Amstutz dans Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

21/03/2011

Tiziano Scarpa 1b

Bloc-Notes, 21 mars / Les Saules

En complément au Stabat mater de Tiziano Scarpa, voici celui d'Antonio Vivaldi. Avec l'interprétation d'Andreas Scholl, et l'Ensemble 415 dirigé par Chiara Banchini.


 

08:18 Écrit par Claude Amstutz dans Antonio Vivaldi, Bloc-Notes, Chiara Banchini, Musique classique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : musique classique | |  Imprimer |  Facebook | | |

Tiziano Scarpa 1a

Bloc-Notes, 21 mars / Les Saules

littérature; roman; livres

La Pietà était une des quatre institutions de la république vénitienne où l'on élevait les petites orphelines, leur offrant une éducation, un métier et une chance de s'insérer dans la société, pas seulement en leur trouvant un mari, mais en leur permettant aussi de donner des cours particuliers de musique. Certaines pensionnaires étaient membres de la formation musicale de l'orphelinat, grâce à laquelle affluaient le public, les bienfaiteurs et les donations nécessaires pour la bonne marche de cette maison de charité. La maîtrise instrumentale exceptionnelle des musiciennes de la Pietà attirait les auditeurs de toute l'Europe, surtout pendant les décennies où le père Antonio Vivaldi prêta son génie incomparable à cette institution.

Tiziano Scarpa est venu au monde dans ce lieu - une chambre de l'ancien orphelinat où Vivaldi enseignait et dirigeait ses élèves - devenu dans les années 60 la maternité de l'hôpital de Venise. Si on ajoute que son premier 33 tours reçu en cadeau était Les quatre saisons, on comprend qu'il a grandi et vécu à l'ombre de ce compositeur auquel il voue une si grande admiration. A ce dernier il consacre son dernier livre - il s'agit bel et bien d'une fiction romanesque - Stabat mater où se mêlent avec beaucoup de bonheur l'inspiration et la réalité.

Le fil conducteur du récit est celui de Cécilia, recueillie au XVIIe siècle à la Pietà. Pour échapper à l'univers austère et rigoureux de l'orphelinat dirigé par des religieuses, elle écrit à sa mère dont, avec douleur, elle imagine les contours, lui exposant sa quête identitaire, son amertume et son sentiment d'abandon. Cécilia confie aussi ses interrogations à cette tête - ses cheveux sont une masse de serpents noirs - représentant la mort et qui, magnanime, lui insufflera le souffle nécessaire pour que sa vie prenne un sens: Je ferai silence autour de toi, je ne réclamerai rien, parce qu'un jour tu me donneras tout, je t'offrirai par avance un peu de la paix qui te revient.

Et cette paix lui viendra par l'exercice du violon dont la pratique, chaque jour à l'église, suscitera l'admiration teintée d'un brin de jalousie du père Antonio Vivaldi, devant son incroyable talent. Davantage qu'un hommage au Maître, ce roman, qui baigne dans une atmosphère typiquement vénitienne, est un voyage méditatif dans l'âme des interprètes, dont la musique dévoile l'intimité mieux que les mots ne sauraient la traduire.

Nous sommes une enveloppe qui secrète de la musique. Nous sommes des fantômes qui soufflent une substance impalpable. On nous trouve belles parce que nous sommes mystérieuses et que nous diffusons de la beauté. L'artifice de la musique masque notre affliction, dit Cecilia. Plus loin encore: Nous sommes le son pur, la voix coupée du corps. (...) Nous jouons de la musique sous l'eau. Nous jouons de la musique dans le ventre de notre mère, dans les viscères de la mort. Nous sommes des poissons abyssaux et chantons de n'être jamais venus au monde. La musique se propage dans l'eau noire. Les hommes et les femmes de la ville marchent sur les rives, passent dans leurs barques. Nous sommes les sirènes qui chantent au fond de l'eau trouble, personne n'écoute notre chant noir.

Les amoureux d'Antonio Vivaldi et de Venise adoreront ce court divertissement et titillera, je l'espère, leur curiosité à propos du créateur de la Stravaganza dont les biographes depuis près de trois siècles, n'ont pas encore su délivrer tous les mystères, ni étouffer tous les rêves...  

Tiziano Scarpa, Stabat mater (Bourgois, 2011)

08:17 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Littérature étrangère, Littérature italienne | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

18/03/2011

Miguel Syjuco

Bloc-Notes, 18 mars / Les Saules

littérature; roman; livres

Connaissez-vous le grand écrivain philippin Crispin Salvador? Né le 21 février 1937, cet auteur de romans, de nouvelles et d'essais qui dit de lui-même qu'il a vécu neuf vies, laissa, outre ses oeuvres controversées, une réputation sulfureuse derrière lui: ses soirées arrosées en compagnie de Lawrence Durrell; un certain tango au clair de lune dansé tout nu à Yaddo avec, dit-on, Germaine Greer; sa relation tumultueuse avec Anita Ilyich, une ballerine biélorusse reine du disco et adepte précoce de l'échangisme; enfin, les insultes à l'encontre de Georg Solti au Palais Garnier - traité de iota - au début du second mouvement du Deuxième concerto pour piano de Sergueï Rachmaninov. Le 20 février 2002, exilé aux Etats-Unis, on retrouve son cadavre flottant dans l'Hudson, les bras meurtris largement ouverts, une couronne ensanglantée ornant son front fracassé.

Son ami et biographe, Miguel Syjuco en personne - s'appuyant sur les écrits de Crispin Salvador, les articles de presse le concernant, le fil des actualités, les humeurs des bloggeurs se lâchant à son sujet - nous retrace l'ascension, l'exil et la chute de ce génie provocateur pour les uns, pilleur de mémoire et traître à la patrie pour les autres, dont Matador, surtout, fit couler beaucoup d'encre: une allégorie sur l'impact néocolonialiste où les Etats-Unis représentaient le matador et les Philippines, le taureau courageux - nommé Piroy Gigante - de toute évidence condamné. S'en suivirent A cause de toi, un récit épique et une attaque en règle contre les proches de la famille Marcos. Interdit aux Philippines, bien entendu, ce texte aurait pu lui valoir le prestigieux Prix Nobel décerné cette année-là - malheureusement pour lui - à Naguib Mahfouz. Reste Autoplagiaire, un volume de 2'572 pages, ses mémoires et probablement le plus personnel de ses livres, à propos duquel les critiques se perdirent en conjonctures. Quant à son dernier manuscrit, Ponts embrasés, qui promettait un règlement de comptes sans concessions, avec pour cible les autorités politiques, religieuses et aristocratiques du pays, il ne verra jamais le jour, interrompu par la fin tragique de son auteur, très attaché à ce projet: C'est une oeuvre nécessaire. Parce qu'elle les impliquera tous. Tous ces gens qui ont affirmé que l'espoir était désespéré, et qui se sont mis à mendier leur part du butin. Ou bien ils ont calfeutré leurs maisons, se sont blottis à l'intérieur, ont lu les textes sacrés, et ont attendu, ignorant que Dieu juge plus sévèrement le péché d'omission que la faute commise.

Comme la bobine d'un vieux film, l'auteur, s'interrogeant sur la mort de Crispin Salvador - meurtre ou suicide? - et de son dernier écrit testamentaire, se livre à un exercice de prestidigitation exceptionnel pour appréhender, au fil de rencontres, citations et interviews agrémentées de savantes notes en bas de pages, un personnage hors du commun qui dans la vraie vie... n'a jamais existé! Un tour de force où Miguel Syjuco va jusqu'à se mettre lui-même en scène, mêlant l'imagination et la réalité avec une rare maîtrise.

Fascinant roman dans le roman, il mélange ainsi plusieurs styles de narration pour nous conter, par le biais de l'écrivain et de son biographe, 150 ans de l'histoire des Philippines. A travers leur parcours qui offre bien des points communs - l'exil, une famille fortement impliquée en politique, la passion des hamburger et des échecs, un goût immodéré des plaisanteries - il ne craint pas de laisser transparaître les multiples contradictions forgées par les apparences et qui insufflent toute la force à ce récit: Aucun poème n'a arrêté un char, a affirmé Seamus Heaney. Auden a dit que la poésie n'a aucun influence sur les événements. Foutaises! Je rejette tout ça en bloc! Qu'est-ce qu'ils savent de la mécanique des chars? Comment peut-on évaluer les qualités balistiques des mots? Des choses invisibles se produisent dans des moments impalpables. Ce qui devrait nous empêcher d'écrire, c'est précisément ce risque d'explosion. Sinon, à quoi bon?

La vérité, pour Miguel Syjuco, n'est-elle pas dans ce rêve où lui apparaît Crispin Salvador en train de taper à la machine. Il lui dit: Tu n'es plus occupé à être mort? L'auteur réplique: Je ne peux pas mourir encore. Je suis en train d'écrire ton histoire...

Le grand Orson Welles aurait sans doute tiré de ces acrobatiques échafaudages de la création forgeant les légendes ou mythologies à venir, un film inoubliable...

Miguel Syjuco, Ilustrado (Bourgois, 2011)

08:24 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Littérature étrangère | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

17/03/2011

Le choix des libraires

Bloc-Notes, 17 mars / Les Saules

littérature; essais; livres

Depuis 2006, Jean Morzadec crée et anime un site Internet, lechoixdeslibraires.com que je vous invite à visiter. Très bien présenté, en lien avec France Info, France Inter et France 5, il accorde une large place aux coups de coeur des libraires: près de 2'000 choix à ce jour. Vous y trouvez également une présentation par les éditeurs ou les auteurs, de titres susceptibles d'aiguiser votre curiosité, ainsi que la revue de presse consacrée au livre. 

De cette aventure et de ce partenariat est né un livre au format de poche - à peine 8 euros - Les écrivains préférés des libraires. 17 titres de l'année courante ont ainsi été choisis par Jean Morzadec. Si j'y retrouve l'écho des enthousiasmes de nombreux collègues - Vincent Borel, Tatiana Arfel, Blandine Le Callet, Mathias Enard ou Jérôme Ferrari - et de mes propres lectures mémorables - Fatou Diome, Fouad Laroui et Douna Loup -, l'intérêt de cet ouvrage tient en peu de mots, car plutôt que de recenser les critiques des lecteurs, visibles ailleurs, la parole a été donnée aux auteurs.

Ils nous parlent ainsi de leur dernier livre, mais aussi de son accouchement, des circonstances ou des conditions dans lesquelles ils ont vu le jour. La lecture, l'environnement ou leur appréhension du métier d'écrivain, leur perception des librairies et des librairies, leurs rêves enfin, tout cela dresse un profil d'auteurs dont, à ce jour, nous savons - heureusement peut-être - peu de choses.

Quelques éclairages sur l'écriture et le rôle des livres méritent d'être retenus. Par la plume de Tatiana Arfel par exemple, qui nous dit: Je ne sais pas à quoi servent les écrivains, mais je sais à quoi servent les livres; un livre sert à ouvrir, à étendre son âme, à sentir avec, à respirer plus grand, à se sentir plus libre. A quoi répond Douna Loup: La littérature permet au regard de s'affiner, de se complexifier. En tant que lectrice ou en tant qu'écrivain, c'est faire un voyage, se décentrer de sa propre perception de la vie, et ce déplacement enrichit notre accès au réel.

Les écrivains sont des témoins, des porteurs d'énergie, nous confie encore Vincent Borel. Et ils vivent d'espoir, attendent beaucoup du lecteur comme Fouad Laroui: Si mon livre peut introduire un peu plus de nuances et de compréhension dans les jugements, je pense alors que mon livre aura atteint son but

Fatou Diome, sur le même thème, use d'une jolie image: Je considère tous ceux qui me lisent comme les miens, parce qu'écrire, pour moi, c'est juste tendre la main de l'autre côté, c'est creuser un trou dans le mur existentiel et tendre la main. Toutes les personnes qui attrapent l'autre bout du livre et s'y intéressent, ce sont les miens, parce que nous partageons peut-être les mêmes révoltes, les mêmes lectures et les mêmes désirs pour un monde meilleur.

A propos de cette caverne d'Ali-Baba qu'évoque souvent une librairie - et que j'éprouve surtout quand je me ballade chez les autres - le mot de la fin revient à Marie-Sabine Roger: Si j'étais un chat, je ronronnerais en franchissant la porte d'une librairie. J'y entre comme d'autres en religion. J'anticipe la grâce...

Jean Morzadec présente: Les écrivains préférés des libraires (France Info/Hoëbeke, 2011)

http://www.lechoixdeslibraires.com/

photographie: Fouad Laroui

00:26 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Littérature francophone, Littérature suisse | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; essais; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |