18/03/2013
Vendanges tardives - De la femme
Un abécédaire: F comme Femme
Notre ami commun Pierre-Yves me confia, voici peu, après un dixième verre de chouchen éclusé à la Taverne Le Normand, combien longtemps il s'est interrogé à ton sujet: toujours en compagnie de femmes, pétillantes et intelligentes, gracieuses et musiciennes pour la plupart, jeunes ou moins jeunes. Pourtant, jamais avec une seule. Tiens, me dit-il, même quand il m'invitait chez lui, tu avais beau chercher, tu ne trouvais dans son intérieur aucune trace de féminité. Ni fleurs, ni photographies, ni parfums flottant dans l'air comme les réminiscences d'un amour caché. Non, rien, pas une trace. Au point qu'il se demandait si tu n'étais pas gay, et qu'il n'était juste pas ton type...
Il me raconta que cet affreux malentendu se dissipa le jour où il te surprit devant l'Hôtel des Bons Amis, au bras d'une charmante fille rousse, qui gloussait et se frottait à toi, abandonnée à demi, rappelant la muse de Guillaume Appollinaire: Ses cheveux sont d'or on dirait, un bel éclair qui durerait ou ces flammes qui se pavanent dans les roses-thé qui se fanent... Imagine sa colère et sa stupeur, quand il réalisa que cette beauté fort élégante, avantageuse et jolie, qui manifestait tant d'impatience à ronronner dans ton lit de fortune, n'était autre qu'Yvette, sa femme! Sacré Fred!
Cela te fait rire? Vraiment? Je ne sais pas si tu devrais, car Pierre-Yves m'avoua que par pure vengeance, quelques semaines plus tard, il se jeta littéralement, comme un camé en état de manque, sur une brunette aux cheveux courts prénommée Eléonore, ingénue et ressemblant à une étudiante avec sa jupe plissée et son étui pour violon à bout de bras... Oui, tu as bien compris: il s'ébrouait avec ton Eléonore, le coquin! Ca t'en bouche un coin, pas vrai? Mais peut-être que la fin de cette histoire n'est qu'une plaisanterie revancharde de mauvais goût! Va savoir, les hommes sont si mauvais perdants, quand il s'agit de sexe...
Guillaume Apollinaire, La jolie roussse, dans: Le guetteur mélancolique, suivi de Poèmes retrouvés (coll. Poésie/Gallimard, 2007)
image 1 : roaphotography.wordpress.com
image 2: Jean-Louis Cornez /whitebalance.be/index.html
23:55 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Vendanges tardives - Un abécédaire 2013 | Lien permanent | Commentaires (0) | | Imprimer | Facebook |
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