23/09/2012
Au bar à Jules - De Virgile
Un abécédaire: V comme Virgile
pour mon père
La scène se déroule un certain 24 septembre 1923, entre Renens et Lausanne. Ma grand-mère maternelle ressent de violentes contractions, signe que la naissance de mon père est imminente. Sur le chemin qui la conduit tant bien que mal à la Maternité au bras de son époux - un cheminot prénommé Alfred - s'empare d'elle un vent de panique d'une toute autre nature: aucun prénom n'a été envisagé pour le nouveau-né.
Peu imaginative et ayant bénéficié d'une instruction sommaire - elle se voit contrainte de quitter l'école à quatorze ans pour contribuer financièrement au ménage de ses parents - ma grand-mère emprunte une rue non loin de l'hôpital, lève les yeux, lit le nom: Virgile Rossel, un célèbre juriste, historien, écrivain, professeur et homme politique jurassien (1858-1933) établi à Lausanne à la fin de ses jours. Poète à ses heures, il laisse quelques beaux vers consacrés à son pays du Jura: Si mon petit pays qui se cache dans l'herbe n'a point de fier sommet, ni de ville superbe, si parfois on en parle avec un air moqueur, moi, je l'aime et le vois par les yeux de mon coeur.
Le nom de Virgile plaît bien à ma grand-mère. Et voilà, c'est dit. Mon grand-père ne bronche pas. La progéniture se nommera Virgile. Pour répondre à l'étonnement de ses camarades d'école, puis de ses collègues de travail - nous ne sommes pas en Italie! - jamais mon père ne racontera cette histoire qui circule pourtant dans les cercles familiaux depuis une soixantaine d'années. Ses proches - dont ma mère - l'ont pourtant toujours appellé Frédy... Un surnom sans doute plus léger à porter sous notre drapeau rouge à croix blanche...
image: Virgile Rossel (retrotrame.ch)
15:14 Écrit par Claude Amstutz dans Au bar à Jules - Un abécédaire 2012, Le monde comme il va, Rosebud | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |
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