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01/09/2012

Morceaux choisis- Jean-Loup Charvet 1a

Jean-Loup Charvet

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Pleurer est une autre manière de voir, d'entendre, de parler, mais aussi et tout simplement d'aimer. (...) On pleure, comme on aime, sans savoir pourquoi ni comment. Nous ne sommes jamais maîtres de nos larmes, mais tenus par le mouvement qu'elles expriment. L'âme ne sait pas pour lors ni comment ni pourquoi elle aime. Elle ne sait ce qu'elle fait ni ce qu'elle dit, mais elle brûle, elle languit, elle meurt (François Malaval). Le sens de nos larmes, celui de notre amour, de nos actes ou de nos pensées nous sont donnés: nous avons à brûler, à languir, à mourir. (...)

C'est quand nous avons cédé sous le poids de la tristesse qu'éclate notre joie. (...) L'énergie interne de la larme est une énergie profondément jubilatoire. Joie, joie, pleurs de joie. Pascal ne professe pas sa foi, il la pleure. Seules les larmes possèdent cette intelligence du coeur pour témoigner de l'extase mystique. Les larmes que Dieu accorde sont mêlées de joie; on les sent couler sans les avoir recherchées (Thérèse d'Avila). Elles coulent presque à côté de nous, nous disent ce qu'elles sont, à distance de notre âme. Elles n'expliquent rien parce qu'elles ne savent rien. Nous ne comprenons pas pourquoi nous pleurons, car nous pleurons quand, précisément, nous cessons de comprendre.

Le sens de la vraie larme est de nous surprendre au-delà de nos logiques. Nous pleurons parfois sans presque nous en rendre compte, au-delà de nos simples sensations. L'âme est comblée d'une si immense tendresse, qu'elle voudrait fondre non de douleur, mais en larmes de joie. Elle s'en trouve baignée sans avoir rien senti, sans savoir quand elle a pleuré, ni comment (Thérèse d'Avila).

Si les larmes sont pour certains les premiers mots de l'enfance, elles ne font pourtant jamais de l'homme qui pleure un enfant: elles le rendent pareil à un enfant. Le langage d'une âme vraiment atteinte fait l'économie de tout discours comme de toute apparition. Car on ne parle pas plus des larmes que du sommeil d'un enfant. Tout juste de son imprécise joie.

Jean-Loup Charvet, L'éloquence des larmes - Livre/CD (Desclée de Brouwer, 2001)

image: Walter Firle (iamachild.wordpress.com)

11:10 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; spiritualité; anthologie; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

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