Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

08/04/2011

Malika Mokeddem 1b

Bloc-Notes, 8 avril / Les Saules

Malika Mokeddem sur Lechoixdeslibraires.com 

littérature; roman; interview; livres

1) Qui êtes-vous ? 

Une fille du désert algérien qui y a vécu la pire des claustrations, celle où les immensités n'étaient qu'un néant. Une terrible angoisse s'abattait sur moi lorsque je fixais l'abîme infranchissable de l'horizon. Je levais un livre à la hauteur de mon visage pour ne plus le voir. Les raisons de cet enfermement n'étaient, certes, pas seulement géographiques. La pauvreté ne nous permettait pas d'échapper à la fournaise des étés. La camisole des traditions m'empêchait de bénéficier des rares distractions locales. Mon refus des servitudes me dressait contre ma famille, plus tard contre la société, en un combat de chaque instant.

Ma seule liberté, acquise de hautes luttes, c'était de pouvoir lire. Et quelle liberté ! Les livres ont été mes seuls voyages durant toute mon enfance et mon adolescence. Ils ont structuré ma pensée, transformé ma véhémence et mes colères en ténacité, en résistance. Dans «Une passion dans le désert» Balzac écrit : «dans la littérature du désert, il y a tout, et il n'y a rien...C'est Dieu sans les hommes.» Pour moi le désert c'était les Écrivains sans dieu. Aucun.

Partie de l'Algérie pour fuir ses suffocations et continuer mes études de médecine en France, j'ai passé mes vacances d'été et tous mes moments de loisir à naviguer à travers la Méditerranée. C'est en pleine mer que j'ai apprivoisé l'horizon. Peu à peu, la mer est devenue mon désert assouvi. Et j'ai commencé à aimer le désert, à l'écrire en la traversant.

2) Quel est le thème central de ce livre ? 

Le roman s'ouvre sur une disparition. Celle de Léo, un passionné de voile dont le bateau a été retrouvé à la dérive en Méditerranée, à l'extrême sud de la botte italienne. Sa compagne, Shamsa, s'apprêtait à le rejoindre. Elle ne peut pas, elle ne veut pas croire à un accident. Elle part donc, à bord de «Vent de sable», sur les traces de Léo. Depuis huit ans, elle ne naviguait qu'avec lui. C'est la première fois qu'elle prend la mer seule. Elle qui fut abandonnée à sa naissance dans le désert algérien, elle qui a fui une Algérie devenue sanguinaire, la voici hantée par son passé. Mais pour affronter ce nouveau coup du sort, elle est portée par l'énergie du désespoir. Et surtout par le courage que donne un amour absolu.

Sur cette Méditerranée dont Shamsa connaît par coeur les méandres et les drames, elle seule sera sans doute capable de retrouver les chaînons manquants aux limiers de la police.

3) Si vous deviez mettre en avant une phrase de ce livre, laquelle choisiriez-vous ? 

«J'étais déserte et notre rencontre m'a rendue désirante.»

4) Si ce livre était une musique, quelle serait-elle ? 

Le ressac de la mer.

5) Qu'aimeriez-vous partager avec vos lecteurs en priorité ? 

Leur plaisir de lecture en miroir à celui que j'ai pris à écrire ce livre. Et puis que leur courrier m'attende dans ma boite aux lettres, m'accueille chez moi, comme d'habitude. Ces élans peuplent ma solitude de façon aussi discrète que profonde.

Malika Mokeddem, La désirante (Grasset, 2011)

04:16 Écrit par Claude Amstutz dans Bloc-Notes, Littérature francophone, Malika Mokeddem | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; roman; interview; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

Les commentaires sont fermés.