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16/09/2013

Vendanges tardives - De la Winchester

Un abécédaire: W comme Winchester

cinéma

J'avoue, mon cher Fred, que - contrairement à toi - j'éprouve bien souvent, au cinéma, une aversion tenace pour le western. En raison de ses héros fréquemment machos, frustres, plutôt racistes et conservateurs, avec la Bible dans une main et une Winchester dans l'autre. Mais surtout parce que, derrière les bons abolitionnistes du Nord et les exécrables Sudistes, ou les peaux-rouges sans foi ni loi, d'un côté - fossoyeurs de la civilisation - et les justiciers blancs à la morale irréprochable de l'autre - of course - je reconnais toute une image détestable de l'Amérique, exaltant les valeurs nationalistes à travers une vision manichéenne de la société, et qui aura survécu jusqu'à aujourd'hui.

Cela dit, mon approche du genre est assez caricaturale, je te le concède, même si nombreux traits de ces films aux personnages stéréotypés, se retrouvent parmi des cinéastes de renom tels Raoul Walsh - La piste des géants -, ou Anthony Mann - Winchester 73 - parmi d'autres.

Cette gigantesque production hollywoodienne des années 50 et 60 livre pourtant quelques exceptions mémorables - j'en ai choisi trois -  qui te réjouiront, parmi lesquelles le formidable Duel au soleil de King Vidor: Après avoir vu son père tuer sa mère et l'amant de celle-ci, Pearl est recueillie dans le ranch du sénateur McCanles. Le patriarche a deux fils, Jesse et Lewt, aussi différents qu'Abel et Cain. Partagée entre les frères ennemis, Pearl deviendra une furie, tourmentant et déchirant tous ceux qui la convoitent.... Dans ce film, les héros s'avèrent plus complexes que de coutume, avec un brave peu réjouissant et un noceur pas antipathique du tout, se disputant le coeur de la belle.

De même El Perdido de Robert Aldrich: Aussitôt arrivé au ranch des Breckenridge, Brendan O’Malley se fait engager pour aider au convoyage du cheptel du propriétaire. Il entreprend également la femme de celui-ci, qu’il a aimée il y a longtemps. Il se fait enfin rejoindre par Dana Stribling, qui l’accuse d’avoir tué son beau-frère et est bien décidé à le venger… Ici, les mécanismes habituels sont brouillés par des passions troubles et débouchent sur une fin empreinte de mélancolie et de dérision.

Enfin ce western crépusculaire - un pur chef-d'oeuvre - L'homme qui tua Liberty Valance de John Ford: Le sénateur Ransom Stoddard et sa femme se rendent en train dans la petite ville de Shinbone, pour assister à l’enterrement d’un dénommé Tom Doniphon. La presse locale est intriguée car à ses yeux, Doniphon est un sombre inconnu et la venue de Stoddard paraît de fait totalement énigmatique. Un journaliste insiste auprès du sénateur pour obtenir une explication, et celui-ci lui raconte alors les circonstances de sa rencontre avec Doniphon et un bandit nommé Liberty Valance, bien des années plus tôt... Toute l'émotion transpire dans ce qui n'est pas vu ni exprimé entre le héros présumé devenu sénateur et ce cowboy inconnu, autrefois son ami.

Au fait, sais-tu que John Ford fut l'idole cinématographique de Akira Kurosawa?





sources: AlloCiné et Wikipedia

extrait 1: Anthony Mann, Winchester 73 (1950) avec James Stewart, Shelley Winters et Dan Duryea

extrait 2: King Vidor, Duel au soleil (1946) avec Gregory Peck, Jennifer Jones et  Joseph Cotten

extrait 3: John Ford, L'homme qui tua Liberty Valance (1962) avec John Wayne, James Stewart et Lee Marvin

extrait 4: Robert Aldrich, El Perdido (1961) avec Kirk Douglas, Rock Hudson et Dorothy Malone

 

00:05 Écrit par Claude Amstutz dans Films inoubliables, Le monde comme il va | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma | |  Imprimer |  Facebook | | |

27/04/2013

Vendanges tardives - De Kurosawa

Un abécédaire: K comme Kurosawa

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Pour en revenir, Fred, à notre discussion de la nuit dernière, à propos du fossé qui se creuse entre les pauvres et les riches, n'importe où, sur tous les continents, je te propose ce soir - pour clore provisoirement le débat - d'aller au cinéma. Tu aimes, je le sais, autant que moi, les films de Akira Kurosawa, mais celui-ci, Entre le ciel et l'enfer - High and Low, en version anglaise - il se peut que tu n'en aies jamais entendu parler, moins célèbre que Les sept SamouraïsRashomon, Sanjuro, YohimboLa forteresse cachée, Le château de l'araignéeL'idiot, Vivre ou encore Dodes'kaden.

Réalisé en 1963, Entre le ciel et l'enfer est tiré - qui l'eut cru? - d'un thriller de Ed McBain, Rançon sur un thème mineur, librement adapté au cinéma par Akira Kurosawa. L'histoire? Celle de Gondo, chef d'entreprise prospère dans le commerce de la chaussure, habitant un quartier privilégié de Tokyo qui, un jour, reçoit à son bureau un coup de fil lui réclamant une rançon, s'il veut retrouver son fils vivant. Or, il s'avère que l'enfant enlevé est le fils de son chauffeur, non le sien. Et la demande de Takeuchi - le kidnappeur - demeure néanmoins inchangée. Que va-t-il décider? S'il paie, il sera ruiné!

Progressivement, tandis que la police s'efforce de retrouver la trace de l'argent, le spectateur quitte l'univers de l'air conditionné, des hommes d'affaires cyniques, de l'horizon propre et lisse qui baigne la demeure de Gondo, pour rejoindre un monde qui était jusqu'alors totalement occulté: celui des bas-fonds, de la prostitution, de la drogue et de la précarité.

Ainsi se justifie le titre du film, Entre le ciel et l'enfer, à travers cette lente et terrifiante confrontation de deux sociétés, dans la dernière partie du film - magistrale, l'un des points culminants dans l'oeuvre du maître - sur lesquels est posé le regard scrutateur et compatissant de Kurosawa, comme s'il semblait te dire qu'entre un Gondo qui, au début de l'histoire tout au moins, accepte le système, et Takeuchi qui se révolte contre lui, la frontière est mince, de même qu'entre le bien et le mal, la réussite et l'échec de ces deux hommes qui, va savoir, sont peut-être les deux faces de tout être humain.

Et de même qu'aujourd'hui, si Gondo aura appris quelque chose par cette terrible épreuve, Kurosawa, non sans ironie, laisse entendre que le ciel et l'enfer restent ce qu'ils sont - pour tous les autres - et qu'il n'y a pas de réponse satisfaisante à cette fracture de la nature humaine qui, dans ce film, entraîne chez le spectateur une sympathie pour Takeuchi qu'un Dostoïevski n'aurait pas désavouée... 

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Akira Kurosawa, Entre le ciel et l'enfer (1963)

avec Toshiro Mifune, Tatsuya Nakadai, Kyōko Kagawa, Tatsuya Mihashi, Isao Kimura, Kenjiro Ishiyama, Takeshi Katōo, Takashi Shimura et Tsutomu Yamazaki

Musique: Masaru Satô

00:15 Écrit par Claude Amstutz dans Films inoubliables, Vendanges tardives - Un abécédaire 2013 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma | |  Imprimer |  Facebook | | |

01/04/2013

Vendanges tardives - D'Alfred Hitchcock 1b

Un abécédaire: H comme Hitchcock

Pour le plaisir d'un grand moment de cinéma, voici deux films que vous pouvez découvrir ou revoir dans leur intégralité: Tourments / El de Luis Bunuel, avec sous-titres anglais; Une femme disparaît / A Lady Vanishes de Alfred Hitchcock, avec sous-titres français; enfin, un extrait de L'homme qui tua Liberty Valance / The Man Who Shot Liberty Valance, signé John Ford... 





04:14 Écrit par Claude Amstutz dans Films inoubliables, Vendanges tardives - Un abécédaire 2013 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : cinéma | |  Imprimer |  Facebook | | |

Vendanges tardives - D'Alfred Hitchcock 1a

Un abécédaire: H comme Hitchcock

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L'amusant, c'est le regard que les artistes posent sur leurs propres oeuvres. Au cinéma par exemple, cela peut te réserver quelques surprises. Ainsi, le film préféré de Luis Bunuel fut La vie criminelle d'Archibald de la Cruz, tourné au Mexique: l'histoire d'un homme qui dispose, grâce à une boîte à musique magique, le pouvoir de faire mourir les femmes simplement en souhaitant leur mort. Un divertissement plutôt léger à la fin heureuse, malgré cette griffe d'humour noir qui caractérise son metteur en scène.

Aussi surprenant, le choix de John Ford, avec Le soleil brille pour tout le monde dans lequel, sur fond de campagne électorale, des hommes se déchirent pour une femme, s'efforcent de discréditer les siens en déterrant de vieux secrets de famille. Un sujet intimiste traité avec beaucoup de délicatesse. Une approche assez éloignée de sa façon habituelle d'interroger l'histoire.

Enfin, Alfred Hitchcock! Lui aussi étonne. Pour sa période américaine, il a toujours avoué que son meilleur film était L'ombre d'un doute: traqué, un homme se réfugie chez sa sœur, où il retrouve sa nièce, qui porte le même prénom que lui, et qui lui voue une profonde admiration. Là aussi, au-delà de l'intrigue policière - secondaire ici - l'atmosphère est plutôt intimiste, voire empreinte d'une tendresse peu exprimée dans ses autres réalisations.

Cela dit, en ce qui me concerne, mon cher Fred, pour Luis Bunuel, je préfère Tourments / El, tourné également au Mexique en 1953; pour John FordL'homme qui tua Liberty Valance / The Man Who Shot Liberty Valance, en 1962; et pour Alfred Hitchcock, Une femme disparaît / A Lady Vanishes, pour sa période anglaise en 1938, même si les trois films cités par leurs auteurs les suivent de près...

Et toi, dis-moi: quels sont leurs films qui - entre tous - t'ont vraiment séduit?

Luis Bunuel, La vie criminelle d'Archibald de la Cruz / Ensayo de un crimen (1955), avec Miroslava Stern, Ernesto Alonso, Miroslava Stern, Rita Macedo,Ariadne Welter, Andrea Palma

John Ford, Le soleil brille pour tout le monde / The Sun Shines Bright (1953), avec Charles Winninger, Arleen Whelan, John Russell, Stepin Fetchit, Russell Simpson

Alfred Hitchcock, L'ombre d'un doute /Shadow of a Doubt (1943), avec Teresa Wright, Joseph Cotten, Hume Cronyn, Macdonald Carey

image: Teresa Wright et Joseph Cotten, dans: L'ombre d'un doute (1943)

04:14 Écrit par Claude Amstutz dans Films inoubliables, Vendanges tardives - Un abécédaire 2013 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma | |  Imprimer |  Facebook | | |