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03/06/2015

Le poème de la semaine

Nadia Tuéni

Je vous salue,
vous qui êtes, dans la simplicité d'une racine,
avec la nuit pour chien de garde.
Vos bruits ont la splendeur des mots,
et la fierté des cataclysmes.
 
Je vous connais,
vous qui êtes, hospitaliers comme mémoire;
vous portez le deuil des vivants,
car l'envers du temps, c'est le temps.
 
Je vous épèle,
vous qui êtes, aussi unique que le Cantique.
Un grand froid vous habille,
et le ciel à portée de branche.
 
Je vous défie,
vous qui hurlez sur la montagne
usant les syllabes jusqu'au sang,
Aujourd'hui c'est demain d'hier,
sur vos corps un astre couchant.
 
Je vous aime,
vous qui partez avec pour bannière le vent.
Je vous aime comme on respire,
vous êtes le premier poème.
 
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle
 
 

 

02/06/2015

Morceaux choisis - Odilon-Jean Périer

Odilon-Jean Périer

littérature; roman; contes; livres

On rencontrait au milieu d'une avenue à la mode, d'énormes pierres pâles, inexplicables. Les oiseaux se taisaient. La pluie, odorante comme une chevelure, donnait de vraies pensées d'amour.

Enfin parurent les Etrangers. On en parlait à peine, vaguement. Tout le monde avait vu des anges, mais personne n'en croyait les yeux de son voisin. Ces personnages mystérieux se présentaient avec naturel, comme des amis qu'on retrouve au moment critique. Ils étaient debout dans les arbres, assis au bord des toits, en rang, sans ailes, maigres, décents, habillés de gris perle ou de bleu. Ils fumaient des cigarettes jaunes et minces comme des fétus de paille.  

Ceux qui les avaient rencontrés, guéris du jour au lendemain, s'entretenaient de poésie, d'amour, de liberté. Sans d'ailleurs qu'on s'accordât sur leur aspect. Certains les avaient vus sourire, d'autres pleurer, d'autres se taire, et le visage uni comme un verre de lait. Mais tous parlaient d'eux avec tendresse.

Les plus forts ou les plus sages des hommes, à qui rien n'était révélé, se moquèrent quelque temps de ces visions. Mais bientôt touchés par la grâce, on les vit se mettre en chasse, les yeux grands ouverts sur leur ciel vide, cherchant des dieux de tout leur coeur. Ils se consumaient de désir, mordant leurs poings de philosophes, passant une main tremblante sur leurs célèbres têtes chauves. 

Déjà toutes les petites filles avaient leur ange, ami intime. Ces princes volaient comme en rêve, sans nul effort, le petit doigt à la couture du pantalon. Embrassant leur gracieuse proie, ils allaient s'asseoir dans les arbres. Chaque marronnier abritait plusieurs couples sans ailes. Le mouvement du vent dans les feuilles se mêlait au bruit des baisers. 

Les philosophes se traînaient sous les arbres. Plusieurs y moururent, desséchés comme des cigales, après une petite chanson. Car la mort faisait d'eux des poètes et ils se lamentaient enfin aussi mélodieusement que possible.

Perchés dans les branches odorantes, les anges et les jeunes filles, unissant leurs doigts légers, écoutaient non sans une charmante mélodie, agoniser ces vieux messieurs à leur ombre rafraîchissante. 

Odilon-Jean Périer, Le passage des anges (Editions Finitude, 2007)

 image: Wim Wenders, Les ailes du désir (1987)

12:16 Écrit par Claude Amstutz dans Contes, Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; roman; contes; livres | |  Imprimer |  Facebook | | |

01/06/2015

La musique sur FB - 1676 J.Brahms

Johannes Brahms

Ein deutsches Requiem, Op 45

 

Barbara Bonney, Bryn Terfel

Swedish Radio Choir

Eric Ericson Chamber Choir

Berliner Philharmoniker

Claudio Abbado


05:57 Écrit par Claude Amstutz dans Claudio Abbado, Johannes Brahms, La musique sur Facebook, Musique classique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : musique classique; facebook | |  Imprimer |  Facebook | | |