23/04/2012
Morceaux choisis - Ernest Pépin
Ernest Pépin
Un oiseau passeéclair de plumes dans le courrier du crépuscule Va vole et dis-leurDis-leur que tu viens d'un paysformé dans une poignée de mainun pays simple comme bonjouroù les nuits chantent pour conjurer la peur des lendemainsdis-leur que nous sommes une bouchéerépartie sur sept îles comme les sept couleurs de la semainemais que jamais ne vient le dimanche de nous-mêmes Va vole et dis-leurDis-leur que les maréesouvrent la serrure de nos mémoiresque parfois le passé souffle pour attiser nos flammescar un peuple qui oubliene connaît plus la couleur des joursil va comme un aveugledans la nuit du présentdis-leur que nous passons d'île en îlesur le pont du soleilmais qu'il n'y aura jamais assez de lumièrepour éclairer nos mortsdis-leur que nos mots vont de créole en créolesur les épaules de la mermais qu'il n'y aura jamais assez de selpour brûler notre langue Va vole et dis-leurDis-leur qu'à force d'aimer les hommesnous avons appris à aimer l'arc-en-cielet surtout dis-leurqu'il nous suffit d'avoir un pays à aimerqu'il nous suffit d'avoir des contes à raconterpour ne pas avoir peur de la nuitqu'il nous suffit d'avoir un chant d'oiseaupour ouvrir nos ailes d'hommes libres Va vole et dis-leur...
Ernest Pépin, Babil du songer (Ibis Rouge, 1997)
image: Sainte Anne/Guadeloupe (http://alainfoix.com)
19:50 Écrit par Claude Amstutz dans Littérature francophone, Morceaux choisis | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie; livres | | Imprimer | Facebook |
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