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26/05/2010

Le poème de la semaine

René Char


Je sais bien que les chemins marchent

Plus vite que les écoliers

Attelés à leur cartable

Roulant dans la glu des fumées

Où l’automne perd le souffle

Jamais douce à vos sujets

Est-ce vous que j’ai vu sourire

Ma fille ma fille je tremble

N’aviez-vous donc pas méfiance

De ce vagabond étranger

Quand il enleva sa casquette

Pour vous demander son chemin

Vous n’avez pas paru surprise

Vous vous êtes abordés

Comme coquelicot et blé

Ma fille ma fille je tremble


La fleur qu’il tient entre les dents

Il pourrait la laisser tomber

S’il consent à donner son nom

A rendre l’épave à ses vagues

Ensuite quelque aveu maudit

Qui hanterait votre sommeil

Parmi les ajoncs de son sang

Ma fille ma fille je tremble


Quand ce jeune homme s’éloigna

Le soir mura votre visage

Quand ce jeune homme s’éloigna

Dos voûté front bas et mains vides

Sous les osiers vous étiez grave

Vous ne l’aviez jamais été

Vous rendra-t-il votre beauté

Ma fille ma fille je tremble


La fleur qu’il gardait à la bouche

Savez-vous ce qu’elle cachait

Père un mal pur bordé de mouches

Je l’ai voilé de ma pitié

Mais ses yeux tenaient la promesse

Que je me suis faite à moi-même

Je suis folle je suis nouvelle

C’est vous mon père qui changez


Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

00:25 Écrit par Claude Amstutz dans Quelques traces de craie dans le ciel - Anth, René Char | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : anthologie; littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

Commentaires

Poème trés émouvant..

Écrit par : kass | 26/05/2010

Les commentaires sont fermés.