Le poème de la semaine (04/03/2015)

Valère Novarina

Aujourd'hui où tout pivote,
se déclenche,
s'enchaîne à grande vitesse
- et où nous pouvons partout reproduire, atteindre,
communiquer et tuer instantanément -,
la question de la représentation est au centre:
la question des images, la querelle des mots...
 
Il y a une lutte contre les images qui urge,
un combat à mener à nouveau contre l'envoûtement
et notre soumission aux idoles.
 
La poésie est comme un coup porté
au monde par-dedans.
C'est une forme acérée du langage,
une guerre dans la pensée contre ce qui est
autour de nous communément propagé:
les mots ne vibrent et ne répandent leurs fortes ondulations
que s'ils ont, comme la flèche,
frappé très exactement au coeur précis.
 
 
C'est alors qu'ils résonnent
comme des projectiles centrés juste.
Ecrire tranche,
et il n'y a rien de plus proche de l'action du poète
que l'ouïe méticuleuse,
la précision aiguë du juriste.
 
Jamais le théâtre,
en tant que lieu où l'image se fissure
et scène d'interrogation du langage,
n'aura été autant au coeur du monde.
 
Jamais la poésie n'aura été plus politique.
 
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle

09:24 Écrit par Claude Amstutz | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |