Lire les classiques - Sully Prudhomme (27/04/2015)
Sully Prudhomme
Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux, Des yeux sans nombre ont vu l’aurore; Ils dorment au fond des tombeaux, Et le soleil se lève encore. Les nuits, plus douces que les jours, Ont enchanté des yeux sans nombre; Les étoiles brillent toujours, Et les yeux se sont remplis d’ombre. Oh! qu'ils aient perdu leur regard, Non, non, cela n’est pas possible! Ils se sont tournés quelque part Vers ce qu’on nomme l’invisible; Et comme les astres penchants Nous quittent, mais au ciel demeurent, Les prunelles ont leurs couchants, Mais il n’est pas vrai qu’elles meurent. Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux, Ouverts à quelque immense aurore, De l’autre côté des tombeaux Les yeux qu’on ferme voient encore.
Sully Prudhomme, Les solitudes - Poésies (L'Harmattan, 1995)
image: Sandro Botticelli, Portrait of a Young Woman (paintingdb.com)
00:03 Écrit par Claude Amstutz | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie; anthologie; livres | | Imprimer | Facebook |
Commentaires
Ce poème a toujours été pour moi une vraie émotion. Et cette émotion a le don de me bouleverser...Il est si vrai, si beau, qu'il me semble que tous les yeux des êtres de nos vies sont tournés ailleurs mais ne se sont pas éteints, au contraire... "les yeux qu'on ferme voient encore " Merci Claude pour le rappel d'un poème que j'aime beaucoup.
Écrit par : ATTUEL Josette | 17/11/2012