Le poème de la semaine (21/07/2010)
Yves Bonnefoy
Heurte.
Heurte à jamais.
Dans le leurre du seuil.
A la porte, scellée,
A la phrase, vide.
Dans le fer, n'éveillant
Que ces mots, le fer.
Dans le langage, noir.
Dans celui qui est là
Immobile, à veiller
A sa table, chargée
De signes, de lueurs. Et qui est appelé
Trois fois, mais ne se lève.
Dans le rassemblement, où a manqué
Le célébrable.
Dans le blé déformé
Et le vin qui sèche.
Dans la main qui retient
Une main absente.
Dans l'inutilité
De se souvenir.
Dans l'écriture, en hâte
Engrangée de nuit
Et dans les mots éteints
Avant même l'aube.
....................................................
Dans la bouche qui veut
D'une autre bouche
Le miel que nul été
Ne peut mûrir.
Dans la note qui, brusque,
S'intensifie
Jusqu'à être, glaciaire,
Presque la passe
Puis l'insistance de
La note tue
Qui désunit sa houle
Nue, sous l'étoile.
Dans un reflet d'étoile
Sur du fer.
Dans l'angoisse des corps
Qui ne se trouvent.
Heurte, tard.
Les lèvres désirant
Même quand le sang coule,
La main heurtant majeure
Encore quand
Le bras n'est plus que cendre
Dispersée...
Quelques traces de craie dans le ciel,
Anthologie poétique francophone du XXe siècle
00:03 Écrit par Claude Amstutz | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | | Imprimer | Facebook |